Relations sociales
20 février 2018

Donner en dot des cours de coran ?

بسم الله الرحمن الرحيم
الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Donner en dot des cours de coran ?

Est-il possible que, comme dot, je promette à ma femme de lui enseigner une partie du coran ?

Réponse

La dot est une des conditions de validité du mariage. Parmi ses caractéristiques, il y a l’obligation qu’elle ait une valeur quantifiable et non qu’elle soit symbolique, comme le fait de se marier sans dot ou le fait de réciter quelques versets. Allah a dit : « Quiconque parmi vous est incapable de se marier en (donnant) une richesse avec des croyantes libres, qu’il le fasse avec des esclaves croyantes » [1].

Le fait qu’Allah ait mentionné l’incapacité de se marier par l’absence de richesses indique clairement que la dot doive avoir une valeur monétaire. Contrairement à ce que se dit parmi les gens du commun, lire une partie du coran pour la proposer comme dot est invalide et un tel mariage devra être annulé.

Dans sa glose sur al sharh al kabir, l’imam ad Dusuqiy a dit : « Quant au fait de lire une partie du coran pour elle en la lui proposant comme dot, cela est nul sans l’ombre d’une divergence » [2].

Cependant peut-on épouser une personne en contrepartie d’un service quantifiable, comme le fait d’enseigner le coran ou une de ses parties ou encore le fait de proposer un service pour un temps ?

Dans l’école de l’imam Malik, cette question fait l’objet de divergence. L’avis le plus solide est qu’agir ainsi est interdit si on connaît l’interdiction par avance.

Le Chaykh Dardir a commenté ainsi les paroles du Chaykh Khalil ibn Ishaq dans son Mukhtasar : « [et] ils ont divergé [sur l’interdiction] c’est-à-dire de célébrer un mariage [par un service] tiré d’une maison, d’un esclave ou d’une bête dans la mesure qu’il fasse de la dot un profit tiré d’une de ces choses selon une période fixée [ainsi que de lui enseigner du coran] selon une portion limitée que ce soit par la mémorisation ou par l’explication [ ou de lui faire faire le Hajj] » [3].

Dans Jami’ al umahat, Ibn al Hajib a dit : « Quand la dot est un service comme un travail pour une période donnée ou le fait de lui enseigner du coran, Malik l’a interdit. Ibn al Qasim l’a détesté et Asbagh l’a permis. Si ce type de mariage est célébré cependant, il est valide selon le Mashhur » [4].

Dans la glose de al Dusuqiy : « En résumé, la parole portant sur l’interdiction d’une telle pratique vient de Malik et ceci est l’avis le plus solide. » [5].

Mais l’interdiction d’une telle pratique implique t-elle l’invalidité du mariage qui aura été lié avec comme dot la promesse d’enseigner le coran ? Cette question fait aussi l’objet d’une divergence entre ceux qui ont opté pour l’interdiction, la permission et la détestation. Et parmi ceux qui ont opté pour l’interdiction, une divergence existe sur la prépondérance de l’avis indiquant l’annulation du mariage avant sa consommation ou la validité sans restriction. Ce qui est rapporté des maîtres du Madhhab est, en sus de l’interdiction, l’obligation d’annuler ce mariage avant sa consommation. Mais s’il est consommé, l’homme devra verser la dot des femmes de même catégorie.

Ibn ‘Arafah a rapporté à ce propos cinq positions : « la première est la détestation (de cette pratique) mais le mariage est maintenu. La seconde est l’interdiction avec l’annulation avant la consommation et le maintien après avec la dot des femmes de même catégorie. La troisième, si ce service est accompagné d’un versement en nature, cela est permis. En l’absence, on se retrouve dans la seconde position. La quatrième, en l’absence d’un versement en nature, on revient à la seconde position. S’il y a versement, on annule avant la consommation et on maintient après contre la somme en nature et la valeur du service. La cinquième, on accepte la somme et le service » [6].

Il semble que la seconde position ait été celle des savants antérieurs du madhhab.

Dans al Istidhkar, Ibn ‘Abdil Barr a mentionné à propos du mariage en échange de l’enseignement du coran : « Ibn al Qasim a rapporté de Malik qu’il a dit : « Il n’y a pas de bien dans ce mariage. On l’annulera avant la consommation. S’il est consommé, on donnera à la femme la dot des femmes de sa catégorie ».

Ibn Al Qasim a dit : « On fera de même pour celui qui se marie en échange de l’abandon de la compensation pénale (qisas). Il lui devra la dot des femmes de sa catégorie » [7].

Al Lakhmiy a dit : « Le mariage est annulé avant la consommation et on ne lui donnera rien (à la femme). Par contre, après la consommation, il est maintenu et on donnera à la femme la dot des femmes de sa catégorie et le mari lui rendra la valeur de son travail » [8].

Cependant, nombre parmi les postérieurs ont adopté la position de la validité dans l’absolu d’un tel mariage et de l’acceptation du service comme dot, même s’il reste interdit de procéder à cela.

Ainsi, al Dusuqiy a dit : « Ce qu’a indiqué le commentateur (NDT : à savoir le Chaykh Dardir), que l’avis préférable est l’interdiction d’une telle pratique avec la validité dans l’absolu est ce qu’a expliqué l’auteur (NDT : à savoir Khalil ibn Ishaq) dans al Tawdih » [9].

En effet, le chaykh Dardir a dit : « L’avis préférable est que ce mariage est valide et maintenu, avant et après la consommation pour ce qu’il a donné comme service. Il n’y a donc pas d’annulation du mariage de même que quand il y a location de service même si cela est interdit de prime abord » [10].

Donc, selon cette prépondérance donnée par l’imam Dardir, même s’il est interdit de recourir à la proposition d’un service comme dot, un tel mariage reste valide, ne sera pas annulé et le mari ne sera pas dans l’obligation de verser une quelconque dot en nature. Cet avis a été porté par certains des savants postérieurs en considération de l’histoire sayyidina Musa ﷺ avec sayyidina Shu’ayb ﷺ et en prenant en compte la divergence entre l’interdiction absolue et la permission absolue.

L’imam al Mawwaq a dit : « Le mashhur est que ce mariage ne sera pas annulé, qu’il soit consommé ou non, qu’il donne une autre dot ou non » [11].

Le chaykh ‘Illish a dit dans ce sens : « Le mariage ne sera pas annulé après la consommation. Et le mashhur est qu’il ne sera pas non plus annulé avant la consommation et il sera maintenu avec la valeur du service, même s’il reste interdit de procéder ainsi de prime abord à cause de la divergence existante » [12].

Or cet avis soulève une question, comment interdire une telle dot tout en validant le mariage dans tous les cas ? Le chaykh ‘Illish répond à cet écueil : « Ibn al Hajib a dit à propos d’un service comme de la servir pour une période donnée ou de lui enseigner le coran : « Malik l’a interdit, Ibn al Qasim l’a détesté et Asbagh l’a permis. Si un tel mariage se produit, il est maintenu selon l’avis mashhur. »

Dans al Tawdih, (le shaykh Khalil ibn Ishaq) a dit : « sa parole [s’il se produit, il est maintenu selon l’avis mashhur] est une déduction de la position attribuée à Malik sur l’interdiction. Selon l’avis déclarant cela licite ou détestable, il n’y a pas de divergence sur le maintien du mariage. Le mariage est maintenu selon l’avis mashhur en considération de la divergence sur cette question. L’avis que défend l’auteur est considéré par l’auteur d’al jawahir comme la parole de la plupart de nos compagnons »

Il a dit ensuite : « Le propos de Ibn Rashid et de Ibn ‘Abdis Salam disant que le maintien du mariage est la preuve que le mashhur est la détestation de prime abord n’est pas pertinent. En effet, il est possible que la règle soit de prime abord l’interdiction et, si ce mariage est célébré, qu’il soit valide. C’est ce qui apparaît de la parole de l’auteur (NDT : Ibn al Hajib) car il a attribué la position de l’interdiction à Malik, comment donc l’avis mashhur pourrait être contraire au sien ? »[13].

En conclusion : Il est interdit de présenter comme dot le fait d’enseigner le coran à sa future femme. Cependant, si le mariage est conclu avec cette dot, il est valide et sera maintenu sans avoir à donner une autre dot que celle qui a été fixée.

Et Allah demeure le plus savant.

وصلّى الله وسلّم على سيّدنا محمد وعلى آله


[1] Sourate an Nisa, v25
وَمَن لَّمْ يَسْتَطِعْ مِنكُمْ طَوْلاً أَن يَنكِحَ الْمُحْصَنَاتِ الْمُؤْمِنَاتِ فَمِن مِّا مَلَكَتْ أَيْمَانُكُم مِّن فَتَيَاتِكُمُ الْمُؤْمِنَاتِ
[2] Hashiyah al Dusuqiy ‘ala al sharh al kabir
[3] Aal Sharh al kabir ‘ala Mukhtasar Khalil
[4] Jami’ al Umuhat dit Mukhatasar Ibn al Hajib
[5] Hashiyah al Dusuqiy ‘ala al sharh al kabir
[6] In extenso, tel qu’il est cité dans Maram al Mujtadiy. Nous n’avons pas trouvé la référence exacte de cette parole de l’imam Ibn ‘Arafah.
[7] Al Istidhkar
[8] Mukhtasar fiqhi de l’imam Ibn ‘Arafah
[9] Hashiyah al Dusuqiy ‘ala al sharh al kabir
[10] Sharh al kabir ‘ala mukhtasar Khalil
[11] Al taj wal iklil de l’imam al Mawwaq
[12] Minah al jalil ‘ala Mukhtasar Khalil
[13] Minah al Jalil

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