Un sujet occupe malheureusement les musulmans, depuis quelques années, à chaque début et fin du mois de Ramadan. Il s’agit d’une controverse jamais aboutie sur le fait de vouloir unifier les musulmans autour d’une seule date pour commencer et finir le mois de Ramadan, et cela, dans toutes les régions du monde.
Certes, un tel objectif est louable. Mais il est important de s’interroger sur sa faisabilité et surtout sur son statut juridique. En effet, est ce que l’apparition de la lune sur une région du monde oblige le reste des musulmans à débuter ou cesser le jeûne ?
Or, il est évident qu’il a été rare, à l’échelle de l’histoire, d’observer une unanimité des musulmans dans le début et la fin du mois de Ramadan après les temps prophétiques. Une fois que les musulmans se sont dispersés, il a été presque impossible de s’accorder sur une telle chose. D’ailleurs, même aux temps des compagnons, il a été rapporté la divergence sur le début et la fin du mois de ramadan. Dans le Sahih de l’imam Muslim, Muhammad ibn Harmalah a rapporté que Kurayb fut envoyé par Umm al Fadl bint al Harith vers Mu’awiyah qui était au Shâm et qu’il dit : « J’arrivai au Shâm et remplis ma mission. Le croissant de Ramadan apparut alors que j’y étais encore. Je vis le croissant la nuit de vendredi. Puis, je revins à al Madinah à la fin du mois. ‘Abdullah ibn ‘Abbas se mit à me questionner et il évoqua le croissant : « Quand avez-vous vu le croissant ? ». Je dis : « je l’ai vu la nuit de vendredi ». Il me dit : « tu l’as toi-même vu ? » Je répondis « oui et les gens l’ont vu. Ils ont jeûné et Mu’awiyah a jeûné. » Il dit : « Quant à nous, nous l’avons vu la nuit du samedi. Nous ne cesserons de jeûner jusqu’à atteindre trente jours ou que nous le revoyons ». Je dis : « la vision de Mu’awiyah ne te suffit-elle pas ? » il dit : « Non, voici ce que le messager d’Allah ﷺ nous a ordonné de faire. » [1]
Si ce fut vrai aux temps des compagnons qui étaient proches de l’ère prophétique et qui, en ce moment, vivaient sous un gouvernement unique, cela l’est encore plus pour les musulmans postérieurs. En atteste l’existence, dans les questions traitées par les fuqaha, du cas de celui qui commence le jeûne dans un pays et le finit dans un autre, alors que les deux régions n’avaient pas vu le croissant au même moment.
Il apparaît donc que l’unité de l’Islam ne se trouve pas dans le fait de jeûner et de rompre le jeûne le même jour. Il apparaît au contraire, au vu de la parole des savants de notre école, que la vision du croissant concerne une partie des musulmans et non leur entièreté.
Différemment de ce qui est répandu souvent sur la position de l’école malikite, nos savants ne se réfèrent pas à la vision globale. Autrement dit, l’apparition de la lune à un endroit du monde n’implique pas que tous les musulmans jeûnent en même temps que le pays où le croissant a été aperçu. En effet, les malikites ont adopté une position équilibrée et intermédiaire entre la vision globale des hanafites et celle locale des shafiites. Dans notre école, il n’est effectivement pas fait cas de la différence des levers du soleil. Mais l’apparition de la lune oblige seulement ceux qui ne sont pas très éloignés du lieu de vision. Quant à ceux qui sont très éloignés, cette vision ne s’applique pas à eux.
Dans son Mukhtasar, l’imam Ibn ‘Arafah a dit : « Nos savants sont unanimes pour dire que la vision ne s’applique pas sur une distance pareille à celle de l’Andalousie au Khurasan. » [2]
Ibn Juzay a dit : « Si les gens d’un pays voient le croissant, sa vision oblige les autres pays, en concordance avec al Shafi’iy et différemment de Ibn Majishun. Mais cette vision n’oblige pas les pays très éloignés, comme entre le Hijaz et l’Andalousie. » [3]
Dans jawahir al iklil : « L’obligation du jeûne englobera toute personne à qui la vision a été rapportée par deux gens dignes de confiance ou un groupe important, qu’il soit d’un pays proche ou lointain. Mais elle ne s’applique pas à celui qui est d’un pays très lointain. » [4]
Al Qarafiy, dans al Dhakhirah, explique la raison de l’adoption d’un tel avis : « Règle : Allah a désigné les horaires comme des causes des règles juridiques, à l’image de l’aube, du zénith du soleil ou de la vision du croissant. De même, il a désigné les actes comme causes comme par exemple le vol ou la fornication. Or, les heures diffèrent selon les régions. Quand le soleil est à son zénith pour une population, l’aube se lève pour une autre, le ‘asr entre pour une autre, le soleil se couche dans une autre région et on se trouve au milieu de la nuit pour une autre. Cela se passe ainsi à chaque mouvement du soleil d’un degré à un autre. Ces différents degrés sont en eux-mêmes l’aube, le lever du soleil, le zénith, le coucher, la mi-nuit, la mi-journée et les autres noms servant à graduer le temps selon les différents endroits. Allah s’adresse à chaque population selon ce qui est visible dans sa région et non dans toutes les régions. Il ne demande point à un peuple d’agir selon le zénith d’un pays autre que le sien ou son aube. Ceci est agréé par tout le monde.
Il en est de même pour le croissant dont l’apparition diffère d’autres endroits. Il peut apparaître au levant et n’apparaître au couchant qu’une nuit après selon le degré de lunaison. Cette chose est connue nécessairement par celui qui observe cette question.
L’implication de cette règle est que chaque peuple est concerné par le croissant de sa région. La règle s’appliquant à une autre région ne l’oblige pas, même si l’information de l’apparition est confirmée de manière absolue. Il en est de même pour l’aurore, qui ne nous concerne pas même si nous savions que l’aube était levée sur ceux qui sont à notre orient. C’est cela qu’a indiqué al Bukhariy dans le hadith en le mettant sous le titre « A chaque pays sa propre vision ». Il n’a en effet jamais été rapporté de ‘Umar ou d’un des khulafa’ qu’il écrivait aux gens des autres pays ou leur envoyait un émissaire pour leur dire qu’il avait vu le croissant et qu’ils devaient jeûner. Au contraire, ils laissaient les gens avec leur propre vision. Ainsi, cela est devenu une pratique sur laquelle les gens se sont entendus. » [5]
De là, il est incongru de faire de l’observation de la lune sur une partie éloignée du globe un élément qui obligerait tous les musulmans à jeûner.
Cela est encore plus incongru de considérer qu’il faille, dans tous les cas, se référer aux autorités qui contrôlent le Hijaz, et de fait les deux Haram, pour déclarer l’entrée ou la sortie du mois de Ramadan dans un pays qui lui est éloigné. Un prétexte qui est pris pour avancer cette idée est que les lunaisons indiquent le temps du Hajj et qu’il n’est pas possible de diverger avec la Mecque aussi bien dans l’établissement du mois de Ramadan que celui des mois qui le suivent jusqu’au Hajj. Cette question se pose donc, non seulement pour le Ramadan, mais aussi pour la détermination du jour de la fête du sacrifice.
Or, un tel argument est à coup sûr bancal et rejeté. Comme toutes les autorités, celles de la Mecque sont soumises à l’erreur et peuvent se méprendre sur la date d’entrée du mois de Ramadan. Pis, il est possible que la détermination des jours du Hajj, notamment du jour de ‘Arafah, soit erronée comme l’ont indiqué nos savants.
Dans le Mukhtasar de l’imam Khalil, l’auteur a dit à propos de la station de ‘Arafah pour le hajj : « (elle sera valide) même si la majorité se trompe mais pour le dix uniquement. » [6]
L’explication de cette parole est que la station de ‘Arafah sera valide et qu’il ne sera pas demandé de refaire un autre hajj pour les musulmans qui se seront trompés dans la détermination de l’entrée du mois et n’auront pas stationné au neuvième jour. Mais la validité doit répondre à deux conditions :
Cette question explicitement citée indique que l’observation faite à la Mecque ne lie pas les autres musulmans d’une part. D’autre part, le fait que les autorités de la Mecque émettent l’avis d’une apparition de la lune, même pour le mois le plus sacré de l’année, comportant une adoration qui se fait uniquement sur cette ville, n’est pas exempte d’erreur. Nos savants indiquent même la possibilité que le hajj ne soit pas valide pour tous les musulmans pour une erreur de détermination de l’entrée du mois. Si cela est avéré pour le hajj dont l’établissement est limité à la Mecque, que dire donc de l’entrée du mois de Ramadan ou de Shawwal qui concerne le monde entier ?
Or, même si le madhhab de notre imam Malik consacre l’obligation d’observer la lune pour déterminer le début du mois sur une grande région, l’annonce de l’entrée du mois revient en premier lieu aux autorités politiques des musulmans.
Il est clair que les piliers de l’Islam ne peuvent s’accomplir, pour une grande majorité, que sous la dictée d’un gouverneur musulman. Le jeûne n’échappe pas à cette règle. L’annonce faite par un gouverneur oblige ceux qui sont sous son commandement à commencer ou à rompre le jeûne. En effet, cette annonce relève du témoignage et seul le gouverneur et ses représentants peuvent le recueillir pour établir la vérité de l’annonce.
Deux modes uniquement échappent à la détermination du gouverneur. Ce sont, respectivement, la vision d’un groupe important d’hommes, de femmes et d’enfants qui rendent le mensonge impossible. Nos savants devanciers ont indiqué qu’il fallait comprendre par cela la population entière d’une ville par exemple. Le second moyen est l’écoulement du trentième jour de Sha’ban. Dans ces deux cas, il n’est nul besoin de l’approbation ou de l’infirmation du gouverneur pour débuter le jeûne. Au contraire, lui-même doit se soumettre à ces preuves. Mais quand il est question de témoignage, il est obligatoire pour tout musulman de suivre l’autorité politique ou ceux qu’elle a désignés pour déterminer l’entrée ou la sortie du mois.
Dans al Muqadimat, l’imam Ibn Rushd a dit : « Le jeûne de Ramadan devient obligatoire selon cinq voies : que la personne voit le croissant elle-même ; que le gouverneur informe que la vision du croissant a été confirmée pour lui ; qu’une personne digne de confiance ou une groupe de gens lui annonce qu’un groupe important a vu le croissant ; qu’une personne digne de confiance ou qu’un groupe l’informe qu’un autre pays a jeûné un autre jour par la vision d’un groupe important ou par la confirmation de la vision auprès de leur juge, il sera obligatoire de rattraper dans ce cas ; que deux personnes dignes de confiance lui annoncent qu’ils ont vu le croissant, ou même une seule personne digne de confiance, dans un lieu où il n’y a pas de gouverneur qui fait scruter le croissant. » [8]
Cette obligation explique la possibilité qui a existé, aux temps du prophète ﷺ et des premiers khulafa’, de commencer le jeûne pour tous les musulmans en se basant sous une même date et sous une même annonce. Dans l’école de l’imam Malik, si un gouverneur unique existe pour les musulmans, sa déclaration oblige tous les musulmans à observer le mois de Ramadan.
Dans al Mudawwanah, l’imam ‘Abdus Salam al Tanukhiy a dit : « Si un homme voit le croissant du Ramadan tout seul, lui est-il obligatoire d’en informer le gouverneur selon la position de Malik ? Il répondit (à savoir Ibn al Qasim) : Oui, car il se peut qu’un autre que lui l’ait vu et leurs deux témoignages seront corroborés. » [9]
L’obligation n’est donc pas de jeûner séparément mais uniquement d’informer le chef de l’Etat ou ses représentants de l’apparition de la lune. Ce n’est qu’une fois que l’autorité politique aura vérifié et accepté l’information que le début du jeûne pourra être annoncé.
A contrario, celui qui a vu la lune seul et dont le témoignage a été rejeté devra de toutes façons jeûner, lui et sa famille. Cette obligation qui lui incombe n’exclut pas que le reste des musulmans, eux, devront jeûner uniquement sur instruction de l’autorité politique.
Sahnun dit toujours, au même livre : « Celui qui a vu le croissant du Ramadan seul et dont l’imam a rejeté le témoignage, devra t- il jeûner ? » Il répondit (à savoir Ibn al Qasim) : Oui. Je dis : « est-ce la position de Malik ? » Il répondit : « oui. »
Ce qui confirme encore plus la dimension politique de la déclaration du début et de la fin du Ramadan est que celui qui voit le croissant de Shawwal seul, ne devra en aucun cas rompre le jeûne tant que l’imam ne l’aura pas annoncé. Cela indique de même que l’acceptation des témoignages est une affaire qui concerne uniquement le gouverneur et ses représentants, qui seuls sont habilités à déclarer l’entrée ou la fin du Ramadan.
Dans al Muqadimat : « Cette vision restreinte (à savoir celle de quelques personnes, différemment de la vision du grand groupe) ne concerne que les gouverneurs. Si le gouverneur confirme la vision du croissant par le témoignage de deux personnes fiables, il ordonnera aux gens de jeûner ou de rompre et il les prendra sous sa responsabilité. » [10]
Il résulte de ce fait que l’annonce faite par un chef d’Etat lie ceux qui sont sous sa direction, selon l’avis du madhhab. Quand il s’agit d’un khalif unique, il est évident que les musulmans jeûneront ensemble. Mais quand les états sont eux-mêmes éclatés, la pratique est devenue telle que chaque population suivra son gouverneur.
Dans al Jawahir, il est rapporté que Ibn Majishun a dit : « Si l’apparition de la lune est confirmée auprès d’un gouverneur par la vision de deux témoins, similairement aux autres règles juridiques, son ordre ne concerne pas ceux qui ne sont pas sous son autorité, sauf s’il est commandeur des croyants (à savoir, s’il est khalif de toute la ummah). » [11]
De sorte, même la détermination précédemment indiquée, à savoir l’obligation de jeûner si la lune a été vue dans une grande aire géographique, est sujette à caution quand la vision de la lune a été attestée par témoignage. Dans ce cas-là, ce n’est pas la distance entre les pays qui sera déterminante mais plutôt le nombre de gouverneurs et leur déclaration de l’entrée du mois de Ramadan.
Il est clair de là que les paroles qui sont rapportées de l’imam Malik et de ses compagnons sur l’obligation de rattraper quand une autre contrée rapporte avec vu la lune s’applique uniquement au cas où l’imam de la communauté est unique.
Dans al Nawadir d’Ibn Abi Zayd, Ibn Majishun a dit : « Si tous les gens d’un pays voient la lune du mois de Ramadan et qu’ils le voient tous de manière claire sans avoir besoin de recourir au témoignage individuel, il serait obligatoire aux autres contrées de rattraper un jour s’ils ne jeûnent pas. S’ils ont jeûné par le biais du témoignage judiciaire, la recherche d’une preuve et de la probité des témoins, le jeûne ne sera obligatoire qu’avec l’approbation de ceux sous l’autorité politique de qui ils sont. Mais il sera obligatoire pour les gens dont le gouverneur confirme cette information par le témoignage, pour eux et pour ceux qui leur sont proches et sont sous son autorité. Celui qui n’a pas jeûné par défaut d’information parmi eux devra rattraper un jour. Par contre, si le commandeur des croyants écrit à un pays où la lune n’est pas apparue pour conformer le témoignage qu’il a accepté ou la vision (d’un grand groupe), il sera obligatoire (à ceux qui n’ont pas jeûné) de rattraper. Le khalife, à l’égard de l’ensemble des musulmans, tient le même rôle que le gouverneur d’une contrée pour ses administrés. » [12]
Ibn Majishun rajoute à cela : « Ceci est la parole de Malik et de ses compagnons. » [13]
En d’autres termes, la déclaration de l’entrée du mois de Ramadan par témoignage est une affaire uniquement politique. Si les musulmans sont sous l’autorité d’un chef unique, tel que nous l’exige la shari’ah, sa déclaration obligera tous les musulmans à débuter ou arrêter le jeûne s’il leur en intime l’ordre. Or, comme l’a fait remarquer l’imam al Qarafiy, ceci n’était pas l’habitude des khulafa du prophète ﷺ qui s’abstenaient d’envoyer des lettres pour intimer aux gens de jeûner et donc, les laissaient débuter et arrêter le mois selon leur propre observation. Si au contraire les musulmans ne sont plus soumis à chef d’Etat unique, ce qui est une innovation interdite et une situation déplorable, il sera quand même obligatoire pour chaque musulman de suivre la détermination de son autorité s’il déclare l’entrée du Ramadan ou confie à des experts cette charge. Le musulman jeûnera donc selon la déclaration de son chef d’Etat.
Il faut noter cependant qu’il ne sera pas permis, dans notre école, de suivre l’imam s’il adopte une méthode qui est contraire à la sunnah pour déterminer l’entrée ou la sortie du mois.
Dans al Durr al Thamin, l’imam ibn Mayyarah a dit : « Shihab al Qarafiy a dit, le rapportant de Sanad : « si le gouverneur accepte le calcul astronomique et établit le croissant par cela, il ne sera pas suivi à cause du consensus des salafs sur l’avis contraire. » [14]
Mais s’il adopte une méthode qui fait l’objet de divergence entre les savants et qu’une des écoles de fiqh a adoptée, il sera obligatoire de le suivre dans cela, même si cela revient à agir contre l’avis de sa propre école, selon l’avis défendu par le shaykh Khalil.
Dans al Tawdih, il a dit : « Si le gouverneur décrète le jeûne par le témoignage d’une seule personne, il n’est permis à personne d’y contrevenir car son jugement porte sur une question d’ijtihad. » [15]
Les pays sans autorité politique musulmane sont une situation qui n’est pas totalement inédite sur certains aspects. Ces aspects sont par exemple la difficulté à se mettre d’accord sur un mode de détermination. Aussi, il faut compter la fiabilité de l’information transmise dans des régions où l’observation n’est pas centralisée. C’est pour ces raisons que les malikites ont indiqué, dans un pays sans autorité politique, que le musulman devra se référer à ceux en qui il fait confiance, sans lier l’obligation du jeûne à l’apparition dans un quelconque autre pays.
En d’autres termes, vu la largesse dont les malikites ont fait preuve sur cette question, il est possible pour les musulmans dans ces situations d’établir le mode par lequel ils commenceront et finiront le jeûne. C’est peut-être ici le lieu d’indiquer la pertinence de la fatwa de notre école qui établit que l’observation de la lune se fera sur une grande région géographique, comme par exemple l’Europe occidentale ou l’Afrique du nord. Or, en l’absence d’autorité politique, l’entrée du jeûne ne se fait pas sur la base du témoignage mais uniquement par le biais de l’information. Si l’information est confirmée, sans besoin forcément que ce soit par des témoins dont la probité sera mise à l’épreuve, il sera obligatoire de jeûner si la lune est apparue dans un pays proche. La réponse est pareille pour les pays où le gouverneur musulman ne s’occupe guère des affaires des musulmans.
Dans al Nawadir : « ‘Abdul Malik (Ibn Majishun) a dit : « S’il existe un endroit où il n’y a pas d’imam, leur affaire devra se résoudre par concertation pour le jeûne et le croissant. Ou s’il y a quelqu’un qui s’y connaisse, ils devront prendre cela en considération et le scruter (le croissant). Celui pour qui le croissant est confirmé par sa propre vision ou par la vision de quelqu’un en qui il a confiance, il devra jeûner et rompre selon cette information. Et cela s’applique aussi aux gens qu’il dirige (sa famille en l’occurrence). » [16]
Cette souplesse des savants malikites indique leur sagesse dans des pays où l’autorité politique n’existe pas. Il s’agit ici d’un appel clair à la concertation des musulmans, surtout dans les pays européens qui regroupent des musulmans suivant des écoles et des pensées différentes. L’union des musulmans représente une cause primordiale dans un même pays, concernant le début et la fin du mois du jeûne. Nous militons pour le regroupement des musulmans et de leurs instances autour d’un organisme indépendant qui aura le matériel et la compétence nécessaire pour scruter le début et la fin des mois lunaires et ainsi unifier les musulmans autour d’un calendrier. La mise sur pied d’une telle instance, dont des exemples existent déjà, permettra d’avoir une information fiable au niveau européen. Il sera ainsi possible pour les musulmans d’observer la lune en Europe occidentale et de dire si elle est apparue avec certitude.
وصلّى الله وسلّم على سيّدنا محمد وعلى آله
[1] Sahih Muslim, livre du jeûne, chapitre : « montrant que chaque pays a sa propre vision et que si le croissant est vu dans un pays, il n’oblige pas les autres pays qui en sont éloignés. »
[2] Mukhatasar fiqhiy de Ibn ‘Arafah, volume 2, page 59, édité par la Fondation Khalaf Ahmad Khabtur.
[3] Qawanin al fiqhyiyah, page 79.
[4] Jawahir al iklil, volume 1, page 202, Editions dar al kutub al ‘ilmiyyah.
[5] Al Dhakhirah, volume 1, page 491, éditions dar al gharb al islamiy.
[6] Mukhtasar Khalil, chapitre du Hajj et de la ‘umrah, page 64, éditions Maktabah al ‘asriyyah.
[7] Cette question indique qu’il faille mieux observer correctement la lune que de précipiter l’annonce de sa naissance, au risque de décaler le mois d’un jour et d’invalider le hajj.
[8] Al muqadimat al mumahidat, volume 2, page 196, éditions al Quds.
[9] Al Mudawwanah al Kubra, livre du jeûne, volume 1, page 266, Editions Dar al kutub al ‘ilmiyyah.
[10] Al muqadimat al mumahidat, volume 2, page 195, éditions al Quds.
[11] ‘aqd al Jawahir al thaminah, volume 1, page 250, éditions dar al gharb al islamiy.
[12] Al nawadir wal ziyadat, volume 2, page 11, éditions dar al gharb al islamiy.
[13] Ibidem.
[14] Al durr al thamin wal mawrad al ma’in, page 367, éditions Dar al kutub al ‘ilimiyya.
[15] Al tawdih, volume 2, page 249.
[16] Al nawadir wal ziyadat, volume 2, page 12, éditions dar al gharb al islamiy.