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19 septembre 2015

Les sacrifices (al-dahaya)

بسم الله الرحمن الرحيم
الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Les sacrifices font référence à l’égorgement d’une tête de bétail le jour du ‘id al adha et les deux jours qui le suivent. Le mot arabe qui désigne cet acte d’adoration est udhiyyah ou idhiyyah ou dahiyyah. Quant au pluriel, il se forme en dahâyâ ou adâhiyy ou même adâh. Le nom a été formé du mot duhâ qui désigne le moment où le soleil s’est levé complètement. Selon le Qadi ‘Iyyad ibn Musa, les sacrifices ont été nommés ainsi du fait que les musulmans effectuent l’égorgement à ce moment de la journée. De même le nom du ‘id al adha vient du fait que la prière est faite au moment du duhâ[1]

Dans un hadith rapporté par al Hakim : « les compagnons demandèrent : O messager d’Allahﷺ, qu’est donc ce sacrifice ? Il répondit « c’est une sunnah de votre père Ibrahimﷺ ». Ils dirent alors « qu’avons-nous comme récompense dessus, o messager d’Allah ? » Il dit « Pour chaque poil de laine, vous aurez une bonne action » Ils rétorquèrent : « De laine ? » Il redit «  Pour chaque poil de laine, vous aurez une bonne action ».

Selon at Tabaraniy, le prophète ﷺ a dit « L’homme ne fait aucune action meilleure en ce jour que de verser du sang sauf s’il s’agit d’un lien de parenté qui est renoué ».

Dans al kabir, il rapporte aussi « Aucun argent n’est dépensé dans une chose qui soit plus aimée d’Allah qu’un animal égorgé le jour du ‘id »

Le statut du sacrifice

Le sacrifice du jour du ‘id est une sunnah appuyée (sunnah mu’akaddah) pour toute personne, homme ou femme, pubère ou non, qui en a les moyens et qui n’est pas à Mina ce jour là. Al Bayhaqiy rapporte dans as sunan al kubra « trois choses sont pour moi des obligations et pour vous surérogatoires : le sacrifice, le witr et deux raka’at de duha » En est donc dispensé le pauvre [2] qui n’a pas les moyens de se procurer une bête au jour du sacrifice. Il n’est pas demandé au pauvre de s’endetter, même s’il peut rembourser ce prêt plus tard, contrairement à ce qui est répandu parmi les gens. En est dispensé aussi le pèlerin (hajj) qui est à Mina ce jour-là. Le sacrifice du ‘id n’est pas une sunnah pour lui, même si Mina est son lieu d’habitation habituel.

Le moment du sacrifice

Le sacrifice s’étale sur trois jours, les 10, 11 et 12 de Dhul Hijjah.

Le sacrifice n’est valide que s’il se fait de jour. Egorger l’animal après le coucher du soleil est en tous cas non valide. Cependant, les règles diffèrent selon le jour dans lequel on sacrifie.

Pour le premier jour du sacrifice, le temps de validité commence après l’accomplissement de la prière et de la khutbah. Selon un hadith rapporté par Bara’ « La première chose que nous faisons dans ce jour est de prier et ensuite de revenir pour sacrifier. Celui qui fait cela aura accompli notre sunnah. Quant à celui qui sacrifie (avant), c’est juste de la viande qu’il aura ramené à sa famille et il n’aura rien accompli du rite ». Celui qui aurait sacrifié avant verrait son sacrifice invalide.

Une autre condition s’ajoute pour le musulman, le fait que l’imam ait fini de sacrifier lui-même son animal. Les savants ont divergé sur la dénomination de l’imam, pour savoir s’il s’agissait du chef de l’Etat ou de l’imam de la ville. L’avis solide est le fait qu’il s’agisse de l’imam de la localité. Il sera obligatoire pour le musulman d’attendre le sacrifice de l’imam avant de procéder au sien, dans le cas où l’imam aurait ramené son sacrifice au lieu de la prière. Si ce n’est pas le cas et qu’on sait que l’imam sacrifiera quand même, il sera obligatoire d’attendre une durée correspondant au temps d’un sacrifice avant de procéder au sien. Si malgré cela on avait sacrifié avant l’imam, ce sacrifice serait valide car la condition est d’attendre son sacrifice. Effectuer le sacrifice le premier jour est meilleur que de l’effectuer aux jours suivants, même si on sacrifie entre le zénith du soleil et son coucher.

Pour les deux jours suivants, le temps du sacrifice commence au lever de l’aube, c’est-à-dire à la prière de Subh. Cependant, il existe un temps préférentiel de sacrifice qui est entre l’aube et le zénith du soleil. Ainsi, il sera plus apprécié de sacrifier au troisième jour avant le zénith que de sacrifier au deuxième jour après ce moment.

Que doit-on sacrifier ?

Le meilleur à sacrifier en ce jour est le mouton. Selon Anas « Le messager d’Allahﷺ sacrifia deux béliers blancs bien cornus. Il les égorgea de sa main, prononça le nom d’Allah ainsi que le takbir et posa ses pieds sur son côté » [3]

Le mouton à scarifier doit avoir une année complète révolue, même de peu comme un jour. Le messager d’Allah ﷺ a dit « Ne sacrifiez qu’une bête qui a déjà perdu ses incisives. Si cela vous est difficile, sacrifiez alors un mouton de l’année » [4]

Si cela est impossible pour le musulman, il lui sera préférable de sacrifier une brebis remplissant les mêmes conditions.

Viennent ensuite selon l’ordre de préférence le bouc, la chèvre, le bœuf (ou taureau), la vache, le chameau et enfin la chamelle.

Les caprins devront avoir une année révolue franchement. Cela revient à ce que l’animal soit entré dans sa deuxième année au moins d’un mois.

Quant aux bovins, ils devront avoir atteint l’âge de trois ans et être entrés dans la quatrième année, même de quelques jours.

Quant aux camélidés, ils devront atteindre cinq années et être entrés dans la sixième.

La bête égorgée devra être exempte de défauts flagrants. Elle ne devra pas être borgne, de sorte que son œil ne voie pas.

Elle devra être normalement constituée, sans aucun membre ni organe en moins. Si l’animal est châtré, cela ne constitue pas un défaut car contribuant à la qualité de la viande.

N’est pas non plus acceptée la bête muette, sourde ou celle ayant une mauvaise odeur à la gueule.

L’animal devra aussi être exempte d’avoir de petites oreilles, de ne pas avoir de moelle dans ses os par maigreur extrême, de ne pas avoir de queue, que cela soit naturel ou non. Quant à l’animal qui a une queue coupée, il est toléré le manque de moins d’un tiers de l’organe.

De même, s’il s’agit d’une brebis, elle ne devra pas être dépourvue de lait à cause d’un pis stérile.

N’est pas non plus valide le sacrifice d’un animal frappé de folie, ou celui qui serait malade visiblement ou galeux ou atteint de diarrhée chronique.

L’animal qui boite ostensiblement ne sera pas valide pour le sacrifice. Parmi les défauts rédhibitoires, le fait que l’animal perde plus d’une dent en dehors de la cause naturelle ou qu’il ait perdu plus d’un tiers d’une oreille.

En conclusion, l’animal devra être normalement constitué, dans un embonpoint général et sans défaut visible.

Qui effectue le sacrifice ?

Il est recommandé au propriétaire de l’animal de procéder lui-même au sacrifice. En effet, le sacrifice constitue une grande adoration et il convient au musulman de se rapprocher de son Seigneur par ce biais. De la même manière que sacrifier constitue une sunnah pour tout homme ou femme, il n’y a pas de distinction pour y procéder. Nous entendons par cela que la femme elle aussi, qui aurait un ovin à sa disposition, accomplit une grande recommandation en procédant elle-même au sacrifice.

Cependant, il est possible de déléguer le sacrifice à une autre personne, à condition qu’elle soit musulmane. Le sacrifice par délégation effectué par un non-musulman, fût-il chrétien ou juif, est invalide. Le délégué devra être désigné par le propriétaire de l’animal. Il ne peut pas s’agir d’une personne qui égorge sans aucune désignation préalable et sans intention d’égorger pour le propriétaire, sous peine d’invalidité du sacrifice.

Il sera aussi invalide dans notre école de s’associer pour sacrifier une seule bête. Si un groupe se cotise pour acheter un seul animal et le sacrifier pour le groupe, ce sacrifice ne sera valide pour aucun d’entre eux.

Quant au fait d’associer des gens dans la récompense du sacrifice, cela est permis. Cette permission se fait sous trois conditions :

  • que la personne associée soit de la famille du propriétaire du sacrifice, comme son frère, son époux, son père, son cousin...
  • qu’elle soit à la charge du propriétaire de l’animal, que cette charge soit obligatoire (comme l’épouse ou le fils) ou non (comme l’époux ou le frère)
  • qu’elle habite dans la même maison que celui qui offre le sacrifice

Si une de ces conditions manque, l’association à la récompense n’est pas valide.

Recommandations liées au sacrifice

Il est recommandé de choisir un animal bien portant et gras. Le bélier est préféré à l’animal châtré sauf si ce dernier est plus gras. De même, il sera préféré le mâle à la femelle, un ovin au caprin, un caprin aux bovins et camélidés. Quant à la préférence du bovin sur le camélidé, le Qadi Ibn Rushd l’a déclaré comme l’avis le plus probable.

Celui qui aura l’intention de sacrifier au jour du ‘id adoptera comme convenance de ne pas se couper les cheveux et ongles, comme imitation des pèlerins.

Il sera aussi recommandé, sans avoir valeur d’obligation, de faire aumône d’une partie du sacrifice à des musulmans. Il n’y a pas de limite minimale ou maximale dans cette aumône.

Il sera par contre détesté de tondre la bête avant de la sacrifier. Cette désapprobation est liée au fait de ne pas déprécier l’animal et s’applique à un moment proche de l’égorgement. Il sera aussi réprouvé de boire du lait de la bête avant le sacrifice.

Il sera par contre totalement interdit de vendre quoi que ce soit de l’animal sacrifié, que ce soit sa peau, sa laine, sa viande... On ne pourra pas, le cas échéant, payer le boucher d’une partie de la viande. De même le troc d’une partie de l’animal contre quoi que ce soit d’autre sera interdit.

و صلي الله و سلم علي سيدنا محمد و علي آله


[1] At Tawdih.
[2] Le pauvre désigne dans le fiqh celui qui a juste ce qui lui suffit dans l’année pour ses besoins indispensables (nourriture, habillement, logement...) et qui ne peut faire d’excès hors de cela.
[3] Rapporté par Muslim et al Bayhaqiy :  عن أنس قال ضحى النبي صلى الله عليه وسلم بكبشين أملحين أقرنين ذبحهما بيده وسمى وكبرووضع رجله على صفاحهما
[4] Rapporté par Muslim et les auteurs des sunan, sauf at Tirmidhi : قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : لا تذبحوا إلا مسنة إلا أن يعسر عليكم فتذبحوا جذعة من الضأن
Nous avons traduit le mot المسنة par la bête ayant perdu ses incisives. Nous avons traduit جذعة par mouton de l’année. Ce mot désigne, dans le cas des ovins, l’animal qui vient d’avoir une année, selon l’avis le plus appuyé des savants de la langue.

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