La salat des ‘idayn est une des prières surérogatoires qui sont des sunnah mu’akaddah dans notre école, à savoir des sunnah très appuyées. Il s’agit de la prière du ‘id al fitr, au premier de Shawwal et de la prière du ‘id al adha au dix de Dhul Hijjah.
Le caractère appuyé de cette sunnah est prouvé par la divergence qui existe à son sujet. En effet, est-elle une obligation individuelle au lieu d’une sunnah ? Ou bien, s’agit-il d’une sunnah individuelle mais d’une obligation communautaire ? Ces deux positions ont trouvé leurs défenseurs parmi les imam du madhhab et les andalous. Cependant, ce qui est retenu est son caractère de sunnah appuyée.
La prière du ‘id est une sunnah pour toute personne sur qui la prière de jumu’ah est obligatoire. Il faut inclure dans cette définition donc tout homme pubère, libre, résident dans une ville et n’étant pas voyageur. Cela exclut de même la femme, l’enfant, le voyageur et les gens vivant dans des petites bourgades éloignées de plus d’un farsakh[1] d’une mosquée. Cependant, à toutes ces personnes, il est recommandé d’assister à la prière. Il sera détesté à un résident de voyager après le fajr de ce jour s’il sait qu’il ratera la prière.
Cette prière n’est non plus pas une sunnah appuyée ou une recommandation pour les pèlerins se trouvant à Mina au jour du sacrifice. Bien au contraire, établir la prière du ‘id en groupe à Mina est considéré comme une innovation blâmable. Mais elle reste une sunnah pour les gens de Makkah.
La prière du ‘id se fait de préférence hors d’une mosquée, dans un terrain vague. En effet, tenir la prière du ‘id dans une mosquée est une innovation blâmable sauf en cas de nécessité dans l’école de Malik. La seule exception est la prière dans le masjid al Haram.
« Selon Abu Hurayrah, la pluie tomba le jour du ‘id et le prophète ﷺ pria le ‘id dans la mosquée. » [2]
Cela implique que la prière ne se faisait pas normalement dans la mosquée.
Son temps est celui de la permission de la prière surérogatoire, quand le soleil s’est levé de la hauteur d’une lance arabe et se termine au zénith du soleil. Les gens se réuniront alors au lieu de la prière, sans accomplir de prière surérogatoire, ni avant, ni après la prière. En effet, la prière y est détestée sauf si la salat al ‘id se tient dans une mosquée. Selon Ibn ‘Abbas : « Le messager d’Allah ﷺ sortit pour le jour du adha ou du fitr et pria deux raka’at sans avoir prié autre chose avant ou après. » [3]
La prière débute avec la sortie de l’imam. Il n’y a à cette prière ni adhan, ni iqamah. Selon Jabir Ibn Samurah : « J’ai prié le ‘id avec le messager d’Allah ﷺ plus d’une ou deux fois et il n’y avait ni adhan ni iqamah. » [4]
La salat du ‘id se compose de deux raka’at récitées à voix haute. II sera recommandé à l’imam de réciter la sourate al A’la ainsi que al ash Shams ou al ghashiyah ou une sourate de cette longueur.
La prière s’accomplit avec sept takbir lors de la première rak’ah, y compris la takbirah al ihram. Dans la seconde rak’ah, on prononcera cinq takbir, sans compter celui du relèvement de la prosternation. Selon Nafi’ : « J’ai prié al fitr et al adha avec Abu Hurayrah et il faisait sept takbir à la première rak’ah avant la récitation et cinq à la deuxième rak’ah avant la récitation. » [5]
Ces takbir se feront à voix haute. On ne lèvera les mains cependant que lors de la takbirah al ihram. Si le maliki suit un imam priant selon une autre école ou qui se trompe sur le nombre de takbir, il ne le suivra pas, même s’il fait le takbir dans la deuxième rak’ah après la sourate, comme les hanafis ou fait huit takbir comme les shafi’is.
Si l’imam diminue le nombre de takbir et s’en rend compte avant d’effectuer la génuflexion, il devra compléter les takbir et reprendre la récitation. Après le salam, il fera une prosternation d’oubli pour avoir rajouté la récitation. Si par contre il ne se rend compte de son erreur qu’après la génuflexion, il continuera la prière. Avant le salam, il fera une prosternation d’oubli pour les takbir manqués. S’il se relève de la génuflexion pour compléter les takbir, sa prière devient-elle invalide ? Deux thèses d’égale valeur s’affrontent.
Le prieur qui trouve l’imam entrain de faire les takbir devra entrer en prière avec lui et le suivre dans les takbir. Quand l’imam aura fini, il complétera le nombre de takbir qu’il a manqué. S’il le trouve en train de réciter, il fera le nombre de takbir qui correspond à la première rak’ah. S’il arrive à la deuxième rak’ah, il fera la takbirah al ihram et prononcera cinq takbir. Une fois que l’imam aura fini, il se relèvera en disant le takbir [6] et prononcera six autres takbir. S’il doute à quelle rak’ah est l’imam, il fera sept takbir. S’il se trouve qu’il s’agissait en fait de la deuxième, il rattrapera quand même la première avec sept takbir, dont celui du relèvement de la prosternation.
Si par contre le musulman n’a pu assister à aucune génuflexion avec l’imam, il devra rattraper les deux rakat. Comme il est entré dans la prière par la takbirah al ihram, il n’aura point à la refaire. Une fois que l’imam aura prononcé le salam, il se relèvera et fera six takbir, en plus du takbir pour se relever. A la deuxième rak’ah, il fera cinq takbir en plus du takbir pour se relever.
Après la prière, il sera recommandé pour l’imam de faire une khutbah. Selon Ibn ‘Arafah, cette khutbah est sunnah et non seulement recommandée. Il devra s’agir de ceux khubah distinctes, avec une assise recommandée entre les deux. Cette khutbah devra obéir aux règles de celle de la jumu’ah. Seulement, on y prononcera le takbir à son début au lieu de la louange et les prieurs les répéteront après l’imam. De même, l’écouter et s’y taire n’est pas obligatoire mais recommandé, contrairement à la parole d’ibn al Qasim. Si la khutbah se fait avant la prière, il sera recommandé de la refaire après elle. Pour la prière du sacrifice, l’imam rappellera ses règles ainsi que son origine.
En outre, l’imam devra se tenir sur le sol et non monter sur le minbar, différemment de la jumu’ah. En effet, monter sur le minbar en cette occasion est une innovation blâmable. Selon jabir : « J’ai assisté à la prière avec le prophète ﷺ le jour du ‘id, il commença par la prière avant la khutbah sans adhan ni iqamah. Puis quand il eût fini, il se leva appuyé sur Bilal et tint une khutbah aux gens… » [7]
Il est recommandé au musulman en ce jour de multiplier le takbir. En effet, pour celui qui prie ainsi que l’imam, il sera demandé de commencer le takbir de la sortie de sa maison jusqu'au moment où débute la prière. Ce takbir devra se faire à voix haute, c'est-à-dire dans la mesure pour se faire entendre par un voisin proche. Il sera aussi recommandé de répéter ce takbir après chaque prière obligatoire, à partir du zuhr du 10 de Dhul Hijjah. On cessera cette pratique après le subh du 13 de Dhul Hijjah qui est le dernier jour de la station à Mina. La forme du takbir est selon Malik : « Allahu Akbaru Llahu Akbaru Llahu Akbar ! La ilah illa Allah ! Allahu Akbaru Llahu Akbaru Llahu Akbar ! wa li Llahil hamd ! »
Le prophète ﷺ a dit : « les jours du tashriq sont des jours de manger, de boire et de dhikr d’Allah. » [8]
Nafi’ a rapporté de Ibn ‘Umar : « Il faisait le takbir après la prière de zuhr du jour du sacrifice jusqu’à la prière de fajr du dernier jour du tashriq» [9].
Il est de même recommandé pour celui à qui il n’est pas demandé d’effectuer cette prière ou celui qui l’a ratée à la mosquée, de l’effectuer, que ce soit en groupe ou seul.
Le musulman fera le ghusl en ce jour, qu’il aille à la prière ou non. En effet, ce ghusl, différemment de celui de la jumu’ah, est pour le jour et non pour la prière. En effet, selon Ibn ‘Abbas : « le messager d’Allah ﷺ faisait le ghusl au jour du fitr et du adha. » [10]
Il est demandé au musulman aussi de s’abstenir de manger avant la prière pour le ‘id al adha et, au contraire, de rompre son jeûne pour le ‘id al fitr.
De même, il s’habillera de neuf, même s’il ne s’agit pas d’un habit blanc. L’homme se parfumera différemment de la femme si elle craint une quelconque tentation par son parfum.
Une des plus grandes recommandations sera aussi de passer la nuit du ‘id dans la prière et le dhikr. En effet, le messager d’Allahﷺ a dit : « Celui qui passe la nuit du Fitr et du adha en prières, son cœur ne mourra pas quand mourront les cœurs. » [11]
[1] Le farsakh est équivalent à 5km selon l’avis qu’un mil équivaut à 3.500 dhira’
[2] Rapporté par Abu Dawud dans ses sunan
عن أبي هريرة : أنه أصابهم مطر في يوم عيد ، فصلى بهم النبي - صلى الله عليه وسلم - العيد في المسجد
[3] Rapporté par Muslim, a Darimiy et al Bayhaqiy
ن ابن عباس أن رسول الله صلى الله عليه وسلم خرج يوم أضحى أو فطر فصلى ركعتين لم يصل قبلها ولا بعدها
[4] Rapporté par Muslim
عن جابر بن سمرة قال : صليت مع النبي - صلى الله عليه وسلم - العيد غير مرة ، ولا مرتين بغير أذان ولا إقامة
[5] Rapporté par Malik dans al Muwatta
عن نافع مولى عبد الله بن عمر أنه قال شهدت الأضحى والفطر مع أبي هريرة فكبر في الركعة الأولى سبع تكبيرات قبل القراءة وفي الآخرة خمس تكبيرات قبل القراءة
[6] Cette position est certes étonnante car dans l’école, celui qui ne rattrape qu’une rak’ah se relève sans takbir. Ad Dusuqi a rapporté de notre Chaykh Ahmed Zarruq que le chaykh Al Qawariy donnait une telle fatwa pour ne pas créer de confusion chez les musulmans. C’est le cas d’une position faible qui sert à établir un avis fort.
[7] Rapporté par Muslim, an Nasa’iy et al Bayhaqiy
وعن جابر - رضي الله عنه - قال : شهدت الصلاة مع النبي - صلى الله عليه وسلم - في يوم عيد ، فبدأ بالصلاة قبل الخطبة ، بغير أذان ولا إقامة ، فلما قضى الصلاة قام متكئا على بلال
[8] Rapporté par Muslim
عن النبي - صلى الله عليه وسلم - : أيام التشريق أيام أكل وشرب ، وذكر الله
[9] Rapporté par al Bayhaqiy dans ses Sunan
عن نافع ، عن ابن عمر : أنه كان يكبر من صلاة الظهر يوم النحر إلى صلاة الفجر ، من آخر أيام التشريق
[10] Rapporté par al Bayhaqiy dans ses Sunan
عن ابن عباس قال : كان رسول الله - صلى الله عليه وسلم - يغتسل يوم الفطر ويوم الأضحى
[11] Rapporté par at Tabaraniy dans al Kabir
عن عبادة بن الصامت أن رسول الله - صلى الله عليه وسلم - قال "" من أحيا ليلة الفطر وليلة الأضحى لم يمت قلبه يوم تموت القلوب