Relations sociales
16 avril 2019

Se marier après la fornication

بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على آله و أصحابه أجمعين

J’ai un frère qui vit maritalement avec une femme musulmane. Or, ils ont décidé de se marier et je leur ai indiqué qu’il fallait attendre un certain délai. Ils me rétorquent qu’ils n’ont pas l’intention de faire des enfants et que ce délai n’a pas à être appliqué. Qui a raison ?

Réponse

Wa ‘alaykumus salam,

Nous espérons que cette réponse vous trouvera en bonne santé ainsi que toute votre famille.

La première chose à laquelle nous exhortons ce membre de votre famille, ainsi que sa compagne, est de se repentir de ces péchés et de revenir à Allah avec contrition. Le musulman ne doit point se montrer désespéré de ses péchés et au contraire, doit les regretter en se repentant devant Allah, qui est le Grand Pardonneur.

Dans le Sahih de Muslim Ibn Hajjaj, le prophète ﷺ a dit : « Par Celui qui détient ma personne, Si vous ne péchiez pas, Allah vous ferait disparaître et ferait venir un autre peuple qui pécherait et Lui demanderait pardon. Et Il leur pardonnerait. » [1]

Cette parole indique l’obligation pour le musulman d’être un repentant sincère, malgré ses péchés. Il y a ici une belle approche qui montre qu’Allah attend de ses serviteurs un repentir permanent de leurs péchés. Ceci est  donc une exhortation à ne jamais désespérer de la Miséricorde d’Allah et à se repentir, quel que soit l’amoncellement de nos péchés.

Concernant la question de base, dans l’école de l’imam Malik, comme vous l’avez effectivement indiqué, la femme doit observer une période vacuité de son utérus avant de procéder à un mariage, si elle a entretenu une relation sexuelle. L’observation de cette période n’est pas soumise à une quelconque volonté de faire des enfants. Elle n’est non plus pas soumise à un quelconque test scientifique qui écarterait la grossesse.

En effet l’observation de cette période de vacuité de l’utérus est un droit d’Allah et non un droit des humains, ce qui implique que, même si on était assuré de cette vacuité, il serait quand même obligatoire de rester le temps prescrit sans se marier après la relation sexuelle commise hors mariage. Cette position est celle qui est adoptée par la majorité des savants, y compris par les savants de l’école malikite quand la femme concernée est de condition libre.  On ne peut opposer à cette observation de la vacuité de l’utérus le fait que les personnes ayant commis la fornication aient pris leurs précautions pour ne pas avoir d’enfant ou qu’ils n’aient pas l’intention, à l’avenir, de concevoir d’enfant.

En tout premier lieu, ces précautions ne rapportent pas la certitude absolue sur l’absence ou la disparition du sperme du fornicateur dans l’utérus de sa partenaire. Cette certitude n’est obtenue que par l’observation de cette période de vacuité.

La Qadiy ‘Abdul Wahhab al Baghdadiy a dit dans al Ma’unah : “Il n’y a pas d’alternative à l’observation du délai de vacuité car la grossesse ne peut être infirmée que par la connaissance de la vacuité de l’utérus. Cette connaissance est obtenue par les cycles menstruels.[2]

En second lieu, comme nous l’avons déjà dit plus haut, l’observation de ce délai est un droit d’Allah et s’impose à la femme ayant entretenu une relation avec un homme, même si elle parvient à la certitude de l’absence d’enfant par un autre moyen que les cycles menstruels.

L’imam al Qarafiy a dit: “La période de vacuité, vue globalement, a majoritairement un aspect d’adoration, même si son sens peut être appréhendée par la raison globalement. En effet, elle a été légiférée pour voir démontrer la vacuité de l’utérus et éviter le mélange des lignages. De ce point de vue, elle peut être appréhendée par la raison. Mais d’un autre côté, la période de vacuité reste obligatoire pour la viduité d’une fille dans son berceau ou encore pour une femme en cas de divorce ou de viduité malgré qu’on sache que son utérus est vide du fait de la disparition prolongée de son époux ou pur une autre cause. Ceci conforme l’aspect cultuel. Comme l’aspect d’adoration dans la période de vacuité est avéré, il sera obligatoire de l’observer après constatation de ce qui la rend obligatoire, dans tous les cas de figure, que l’on sache que l’utérus est vide ou non, pour se conformer à sa dimension adorative.[3]

Les savants malikites ont assimilé l’observation de cette période pour la femme libre fornicatrice à la période de vacuité liée à la mort du mari ou au divorce dans leurs règles. C’est dans cette idée que nos savants ont considéré tout mariage conclu dans la période de vacuité après la fornication comme étant nul et devant être annulé sans divorce.

En effet, Allah a prescrit l’observation de cette période de vacuité pour la femme ayant consommé son mariage selon un contrat licite : “O prophète, quand vous divorcez les femmes, divorcez dans leur période de vacuité et observez cette période[4]

Nos savants considèrent que cet ordre n’est pas seulement limité à la préservation du lignage issu d’un mariage licite mais s’applique aussi à une relation sexuelle basée sur un quiproquo, un viol ou tout simplement une fornication.

Tout mariage qui serait fait sans observation de cette période de vacuité, même à la suite d’une fornication, sera ainsi invalide.

Dans al sunan al kubra, l’imam al Bayhaqiy a rapporté de Sa’id ibn al Musayyib : “Basrah ibn Abi Basrah al Ghifâriy a avait épousé une jeune fille non mariée. Quand il cohabita avec elle, il trouva qu’elle était enceinte. Il en informa le prophète qui les sépara et dit : “ Quand elle aura accouché, appliquez-lui la peine de la fornication”. Il lui donna en même temps sa dot pour la consommation du mariage.[5]

Le fait de les séparer indique qu’épouser une femme dans sa période d’observation de la vacuité de son utérus est interdit en plus de rendre un tel mariage nul.

Dans al Mudawwanah, l’imam Sahnun a dit: “j’ai dit : “ Que penses-tu d’un homme qui commet la fornication avec une femme? Peut-il l’épouser après cela ? Il dit (à savoir Ibn al Qasim) : Malik a dit : “Oui, il peut l’épouser. Mais il ne l’épousera que quand elle observera la vacuité de son utérus du sperme illégitime.[6]

Ibn al Qasim a dit de son côté : “A chaque fois qu’il y a une relation illégitime, on ne peut entretenir une relation légitime qu’après une période de vacuité.[7]

Dans notre école, tout mariage contracté dans la période de vacuité entraîne sa nullité. Les contractants pourront cependant se marier une fois que la période de vacuité sera terminée, mais uniquement par un nouveau contrat.

Si le mariage est consommé à la suite de sa conclusion pendant la période de vacuité, ces deux personnes seront à tout jamais interdites si la femme a commis la fornication avec un autre homme que celui avec qui le contrat a été conclu. Cela revient à dire qu’ils ne pourront jamais se remarier et cela, même si la consommation a été faite hors de la période de vacuité.

A contrario, si le mariage a été conclu avec l’auteur de la fornication et qu’il s’en est suivie la consommation, il n’y aura pas d’interdiction éternelle de se marier.

Par consommation, il ne faut pas entendre seulement la relation sexuelle. En effet, tout acte qui était interdit avant le mariage entre deux personnes de sexe différent est vu comme une consommation à l’image d’un baiser ou d’une caresse.

Dans al Muwatta, l’imam Malik a rapporté que ‘Umar ibn al Khattab a dit : “Pour toute femme qui est dans sa période de vacuité et contracte un mariage, si son mari n’a pas consommé le mariage, ils seront séparés. Elle finira la période de vacuité pour son premier mari et le second lui fera des avances à la fin de celle-ci. S’il a consommé le mariage, ils seront séparés, elle finira sa période de vacuité du premier et y rajoutera la période du second. Mais il ne leur sera plus possible de se marier à tout jamais.” [8]

Dans le Mukhtasar de l’imam Khalil, l’auteur dit : “(Il sera interdit) de prononcer une parole explicite comme avances faites à une femme dans sa période de vacuité ou faite à son responsable, comme son tuteur, de la même manière (que cela est interdit) pour la femme qui observe ce délai pour la fornication. Ils seront à tout jamais interdits s’ils entretiennent une relation sexuelle (après un mariage), même par quiproquo, ou qu’ils font les préliminaires sexuels, même après la période de vacuité.[9]

De là, il est clair qu’il est interdit d’épouser une femme tant que son délai de vacuité n’est pas écoulé, si elle a commis la fornication.

Ce délai est de trois cycles de règles après l’acte de fornication. Quand la femme verra ses menstrues la troisième fois après l’acte, sa période de vacuité sera finie. Si elle ne peut plus voir ses menstrues par âge avancé ou pour cause de maladie, elle observera la période de trois mois lunaires.

Si la femme est enceinte, il sera tout autant interdit de l'épouser. Le terme de son délai de vacuité sera à son accouchement.

وصلّى الله وسلّم على سيّدنا محمد وعلى آله


[1] Sahih Muslim, livre du repentir, page 712, Editions Alfa
وَالَّذِي نَفْسِي بِيَدِهِ لَوْ لَمْ تُذْنِبُوا لَذَهَبَ اللَّهُ بِكُمْ ، وَلَجَاءَ بِقَوْمٍ يُذْنِبُونَ فَيَسْتَغْفِرُونَ اللَّهَ فَيَغْفِرُ لَهُمْ
[2] Al Ma’unah, volume 1, page 615, éditions Dar al kutub al ‘ilmiyyah
[3] Anwar al buruq fi anwa’ al furuq, volume 1, page 1003, Editions dar al salam
[4] Sourate al Talaq, verset 1
يَٰٓأَيُّهَا ٱلنَّبِىُّ إِذَا طَلَّقْتُمُ ٱلنِّسَآءَ فَطَلِّقُوهُنَّ لِعِدَّتِهِنَّ وَأَحْصُوا۟ ٱلْعِدَّةَ
[5] Sunan al kubra, volume 7, page 254, éditions Dar al kutub al ‘ilmiyyah
[6] Mudawwanah al kubra, livre du mariage second, volume 2, page 173, éditions Dar al kutub al ‘ilmiyyah
[7] Al Mudawwanah al kubra, livre de la vacuité de l’utérus, volume 2, page 375 Editions Dar al kutub al ‘ilmiyyah
[8] Al Muwatta’, livre du mariage, page 312, éditions maktabah al islam al jadid
[9] Mukhtasar Khalil, livre du mariage

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