As salamu ‘alaykum,
Pourquoi vous les ash’aris :
Wa ‘alaykumus salam,
Votre question renseigne sur une chose : vous n’adhérez pas au madhhab des ash’aris, non pas par réfutation de leurs positions, mais par ignorance et désinformation de ce qu’ils professent. Nous allons vous démontrer cela en résumant la réponse car nous comptons traiter cette question avec plus de détails pour montrer l’approche des ash’aris par rapport aux attributs dits anthropomorphiques.
Votre première question est de savoir pourquoi dans notre école il est interdit de traduire les termes Wajh et Yad alors que nous le faisons pour d’autres attributs comme l’Audition et la Vision.
Nous vous disons simplement : parce que ceci est la position des Salaf et cela suffit comme argument pour le doué d’intelligence. En effet, notre maître et guide, vers Allah, l’imam Nu’man Ibn Thabit a dit dans al fiqh al akbar : « Tout ce que les savants ont évoqué en langue perse comme attributs d’Allah, que son Nom soit exalté, il est permis de le prononcer à l’exception de Yad en langue perse. » [1]
Le chaykh ‘Ali Ibn Sultan al Qariy indique la raison de la spécification du terme Yad, disant : « Je suis en effet arrivé à la conclusion que les salafs sont unanimes à ne pas interpréter le terme Yad. L’imam al Ash’ariy les a suivis en cela. »
Le fait qu’il soit interdit strictement de traduire Yad vient du fait que les Salaf se sont toujours refusés à l’interpréter et à lui chercher un sens possible. Le traduire dans une autre langue reviendrait à lui donner un sens qu’aucun parmi les meilleurs de la ummah ne lui a donné. En effet, si on traduit par « main » dans la langue française, on attribue à Allah un organe incontestablement. Or, celui qui attribue à Allah un organe comme celui des créatures est un apostat adorateur d’idole sans conteste. Ainsi, al Qariy a dit :
« Quant au verset : « Le Yad d’Allah est au-dessus de leurs mains ». Celui dit qu’il s’agit d’une main au sens véritable mais dont on ne connaît pas le comment, on lui rétorque que cela n’a jamais été la parole des salafs. En effet, le terme main désigne un organe sans conteste. Or, attribuer cela à Allah est impossible du fait de l’assimilation et de l’anthropomorphisme qui en naissent. »
Quant au terme Wajh et ce qui y ressemble, le plus sûr et authentique est de s’abstenir de le traduire. Mais il n’y a pas d’interdiction de le traduire si on prend en compte l’interdiction de l’assimilation et de l’anthropomorphisme et que l’on adopte une des paroles rapportées par les Salaf. En effet, dans son Sahih, l’imam al Bukhariy a donné un sens possible au terme Wajh : « Tout est périssable si ce n’est son Wajh » c’est-à-dire, si ce n’est sa Royauté » [2]
Celui qui adopte une telle traduction, reproche ne lui sera pas fait.
Quant à votre question portant sur le fait de voir l’Audition comme attribut à la différence de Yad et Wajh, nous vous disons que votre connaissance de ceux que vous réfutez est limitée.
En effet, le madhhab de l’imam al Ash’ariy, en entier, n’a jamais cessé d’affirmer que Yad et Wajh sont des attributs d’Allah ! Cela ne fait absolument l’objet d’aucune divergence parmi les savants de ce madhhab qui ont établi ses fondements. Dans tabyin al kadhib al muftariy, rapportant les positions adoptées par l’imam al Ash’ariy, le hafiz Ibn ‘Asakir a dit : « Les Mu’tazilah ont dit : « Allah a un Yad qui est dans le sens de son bienfait et de Sa Puissance. Il a un Wajh qui est dans le sens de son Etre ». Les hashwiyah ont dit de leur côté : « Il a un Yad qui est un organe et un Wajh qui est une image » Quant à lui (l’imam Abul Hassan ‘Ali al Ash’ariy), il a pris le chemin entre les extrêmes et a dit : « son Yad est un attribut. Son Wajh est de même un attribut comme l’est l’Audition et la Vision » [3]
Or, vous voyez bien que vous réfutez une école dont vous ne connaissez que peu de chose. Les savants ash’aris sont unanimes sur le fait d’affirmer ces attributs de Yad et de Wajh. Ils sont de même unanimes à lui nier toute qualification d’organe ou toute relation avec une corporalité. Le Qadiy Ibn Rushd a dit : « Quant à ce dont Il s’est lui-même qualifié dans son livre, informant qu’il avait un Wajh, deux Yad, deux ‘Ayn, il n’y a pas de place à la raison sur cela. Cette information nous est parvenue par transmission et il est obligatoire d’y porter foi et d’y croire sans existence de modalité ou de limitation. En effet, Allah n’a point de corps, d’organe et encore moins d’image. » [4]
Cependant, ils ont divergé pour savoir si ces attributs étaient liés à son Essence ou à Ses actions. C’est ainsi que le Qadiy Abu Bakr considère qu’ils sont bien des Attributs de son Essence. Cette position est celle pour laquelle nous optons car elle semble être la position de l’imam al Ash’ariy. En effet, dans al maqalat al Islamiyyah, il a réfuté la parole des Mu’tazilah qui avaient donné une interprétation limitée aux attributs Yad et Wajh prétendant qu’ils se référaient respectivement à Son Bienfait ou à Sa Puissance. Dans Tamhid al awa’il, le Qadiy Abu Bakr dit : « Les attributs d’Essence sont ceux dont Allah n’a été cessé d’être qualifiés par eux. Il s’agit de la Vie, de la Science, la Puissance, l’Audition, la Vision, la Parole, la Volonté, l’Eternité, le Wajh, les deux ‘Ayn, les deux Yad, la colère, la satisfaction. Ces deux derniers sont sa Volonté comme nous l’avons explicité » [5]
D’autres parmi les savants postérieurs ont opté pour considérer le Wajh et le Yad comme des attributs d’action dont il était possible, dans le contexte des versets ou des hadiths, de chercher une signification possible. Cela ne nous agrée pas car, comme nous l’avons montré plus haut, les salaf n’ont pas donné de sens possible à Yad. Celui qui fait pareil pour le Wajh en restant dans les paroles attribuées aux Salaf, comme l’exemple de l’imam al Bukhariy, nous considérons qu’il s’agit d’une divergence acceptable.
Quant à l’argument concernant le fait de Lui attribuer un Yad différent de celui des créatures, quelque soit la position adoptée parmi ces deux précédemment citées, votre argument est nul et non avenu.
En effet, la Vie est un attribut de sens, qui nous est venu d’un texte. Mais cet attribut est obligatoire rationnellement envers Allah dans le sens où, si n’attribuait pas à Allah la Vie, l’implication obligatoire serait de lui attribuer son contraire, à savoir la mort. De même, si on ne Lui attribuait pas l’Audition, la Parole, la Science, il serait obligatoire de le décrire par leurs contraires à savoir la surdité, la mutité ou le silence et l’ignorance. Et certes, comme notre Seigneur est Exalté au-dessus de cela ! Le Qadiy a dit dans Tamhid al Awa’il : « Si on dénue Allah de ces attributs alors qu’il est prouvé qu’il en est attribué, il serait obligatoire de le qualifier par leurs contraires à savoir la cécité, le silence, la mutité et la surdité. Or, tous ces qualificatifs sont des défauts et les musulmans sont unanimes à dire qu’ils sont les attributs des accidents. Il n’est pas permis d’attribuer cela à l’Etre Primordial. De sorte, il est obligatoire qu’Il soit Audient, Voyant et Parlant » [6]
Or, l’affirmation des ces attributs n’induit en rien d’attribuer à Allah ce qui Lui est impossible, différent du fait de Lui attribuer une main ou des yeux. Même si le sens de ces attributs ne nous est pas connu, similairement à l’attribut de Yad ou de Wajh, il est impensable et totalement impossible de pas décrire Allah par ces attributs, contrairement à Yad et à Wajh. En effet, même si on considère que Yad et Wajh sont des attributs d’Essence, ce n’est que par un texte transmis du coran et de la sunnah que cette information nous est parvenue. Rationnellement, il n’est pas obligatoire d’attribuer à Allah le Wajh et le Yad car l’absence de leur attribution n’implique pas un défaut pour Allah ou n’implique pas de lui attribuer le contraire de ces attributs.
De sorte, nous affirmons l’existence de ces attributs et l’ignorance totale de leur sens tout en niant la modalité, la corporalité et la limitation. Cependant, si nous les traduisons les attributs de sens (sifat al ma’niy), c’est parce que leur sens n’implique en rien l’attribution d’un organe à Allah et que, d’un autre côté, il n’est pas possible de ne pas décrire Allah par ces attributs.
Allah demeure le plus savant en toutes circonstances.
[1] Al fiqh al akbar de l’imam Abu Hanifah
[2] Sahih al Bukhariy, kitab al tafsir
[3] Tabyin al kadhib al muftariy, page 150
[4] Al Muqadimat al mumahidat, page 20, édition dar al gharb al islamiy
[5] Tamhid al awa’il wa talkhis al dala’il, pages 298-299, Editions Mu’asasah al kutub al thiqafiya
[6] Tamhid al Awa’il wa talkhis al dala’il, page 46, Editions Mu’asasah al kutub al thiqafiyah
La croyance est le fondement de la religion car sans croyance saine, toute action faite par le musulman est sujet à caution. En effet, la validité des actions de l’homme est conditionnée à une croyance ferme en Allah et ses messagers, mais aussi à une croyance conforme à la révélation. De sorte, connaître les bases de la croyance est une obligation pour chaque musulman.
Al Akhdariy a dit :« La première chose qui est obligatoire au mukallaf [1] est l’assainissement de sa foi »[2], c’est-à-dire, par la science des attributs d’Allah, de ce qui peut lui être attribué ou non ainsi qu’à ses messagers.
Cette connaissance se fait par le biais de la science du Tawhid qu’ont établie les imams pieux Abul Hassan al Ash’ari et Abul Mansur al Maturidiy ainsi que ceux qui les ont suivis. Parmi ceux qui ont écrit de courts traités exposant cette science, se trouve le chaykh ‘Abdul Wahid ibn ‘Ashir al Ansariy. Nous allons procéder à une présentation de la croyance islamique par le biais de son célèbre « al murshid al mu’in ‘ala daruriy min ‘ulum ad din ». Nous allons effectivement expliquer la partie traitant de la croyance. Le chaykh a dit :
Introduction au livre de la croyance qui aidera le lecteur à atteindre son but
L’auteur expose dans ces vers le jugement rationnel ainsi que ses catégories, ce qui est obligatoire pour le mukallaf ainsi que les conditions du taklif.
Notre jugement rationnel est établi sans…appui sur l’empirisme ou le texte
Le jugement est la perception de la chose, soit en en acceptant l’existence, soit en la niant. Par exemple, dire que la partie d’une chose est obligatoirement moindre que la chose elle-même est un jugement dont l’acceptation est communément admise. Le jugement se divise donc en trois catégories : le jugement rationnel, textuel et empirique et c’est le sens de la parole du chaykh. La raison n’a donc pas besoin d’un texte ou d’une expérience vécue pour accepter une chose qui lui est conforme. Chacun de ces jugements fluctue entre ce qui est accepté ou non. Le jugement rationnel a comme critère ce que la raison accepte comme l’affirmation que la partie est toujours moindre que le tout et la négation que le nombre trois soit pair. Le jugement textuel est celui qui nous est venu par la révélation avec comme exemple l’affirmation que les cinq prières sont obligatoires et la négation de cette obligation pour la prière de Duha. Et si le jugement n’entre dans aucune de ces deux catégories, à savoir ce dont la connaissance nous vient soit par la révélation ou la raison, il s’agira alors d’un jugement empirique. Affirmer que boire de l’alcool rend ivre est un jugement empirique de même que nier que boire de l’eau rassasie.
Les catégories qui lui sont liées sont énumérés…et il s’agit de l’obligation, l’impossibilité et la possibilité
L’obligatoire est ce dont la négation n’est pas acceptable…et ce dont l’affirmation est niée par la raison est l’impossible
Le possible est ce dont l’acceptation des deux proposition est égale...Chacune divisée en nécessaire et spéculatif
Le jugement rationnel quant à lui n’accepte que trois possibilités. Soit, la raison affirme et nie la chose en même temps et cette catégorie est celle du possible. Soit, elle ne peut en accepter que l’affirmation et ceci est la catéogrie de l’obligatoire. Soit, elle ne peut en accepter que la négation et ceci est l’impossible. Ces catégories concernent donc les choses qui peuvent être appréhendées par la raison et chaque catégorie est divisée en « nécessaire » et « spéculatif ».
Par exemple, une connaissance rationnelle obligatoire et nécessaire est le fait que le nombre deux soit plus grand que le nombre un. Cette connaissance n’a point besoin d’un raisonnement logique et s’impose d’elle-même. Quant à une connaissance obligatoire et spéculative, on peut citer en exemple la primordialité d’Allah. En effet, on ne peut ariver à sa connaissance qu’après un effort intellectuel. Un exemple de connaissance rationnelle impossible et nécessaire est le fait que le mouvement et la stabilité ne s’appliquent pas en même temps sur un corps. Et une impossibilité spéculative sera le fait qu’Allah soit un corps. Parmi les choses possibles par spéculation, le fait qu’Allah châtie l’homme pieux et fasse entrer au paradis le mécréant ou le pervers.
Tambih sur l’utilisation du kalam : l’utilisation des preuves rationnelles pour établir les éléments de croyance islamiques a donné naissance à un certains nombre de sciences tournant autour de celle du Tawhid. S’il est vrai que les Salaf n’usaient pas de ces méthodes, réfuter leur utilisation est un manque de discernement évident. En effet, la raison est la seule base commune entre les humains. Par quel autre moyen autre que la raison pourrait-on prouver l’Existence d’Allah à des gens qui ne croient pas à la Révélation ? C’est pour cela d’ailleurs que la science du Tawhid est constituée en grande partie de la réfutation des doctrines non-musulmanes, exclusivement sur la base des preuves rationnelles.
Ensuite, ces preuves rationnelles ont été utilisées par Allah Lui-même dans le coran, après qu’Il ait appelé les gens à raisonner. En effet, Il dit : « S’il y avait deux dieux en eux (les cieux et la terre), ils auraient été détruits » [3] ou encore : « Allah n’a point pris d’enfant et il n’y a pas d’autre dieu avec Lui ; sinon, chaque dieu partirait avec ce qu’il a créé et ils se combattraient l’un l’autre » [4].
Ces versets sont des illustrations claires de l’utilisation de la raison pour établir l’unicité d’Allah. Les gens du Kalam n’ont fait que reprendre ces deux arguments développés ici. On voit donc que cette science a ses racines dans la Parole d’Allah et en combattre l’utilisation ne ferait que restreindre les possibilités de convaincre de la véracité de cette religion.
Ceci étant, il faut éviter l’éxagération dans cette voie. Certes, cette science est louable pour les savants qui s’y spécialisent. Au contraire, il faut encourager les étudiants à s’y intéresser car l’Islam est confronté à l’athéisme qui se targue d’être rationnelle. Or, la science du Kalam contient en elle assez d’arguments pour réfuter de telles assertions.
Hors de ce public, il faut apprendre le minimum obligatoire de cette science à savoir une ou deux preuves rationnelles (et textuelles) des attributs d’Allah et des prophètes. Aller au-delà peut-être dangereux. En effet, connaître les détails des preuves de cette science est une obligation communautaire (fard kifayah), alors qu’il suffit au musulman, comme obligation personnelle (fard ‘ayn) de connaître cette science en gros.
Si les Salaf ont été véhéments contre cette science, c’était justement à cause de l’éxagération des gens de l’innovation. Ainsi, il s’en est trouvé qui ont déclaré non croyant la personne qui ne connaissait pas l’intégralité des preuves rationnelles. Al Ghazaliy a dit : « Un groupe a exagéré en déclarant mécréants le commun des musulmans. Ils prétendent que celui qui ne connaît pas les éléments de croyance avec leurs preuves telles qu’ils les ont présentées est mécréant. Ils ont ainsi réservé le paradis à une petite élite des gens du Kalam » [5].
La première chose obligatoire à celui qui atteint le taklif… pouvant réfléchir est de connaître
Allah et ses messagers par leurs attributs… ainsi que ce qui y est lié comme preuves
L’auteur établit ensuite la première chose obligatoire pour celui qui a atteint le taklif, à savoir le mukallaf.
Le mukallaf est celui qui est sujet aux injonctions et interdictions de l’Islam. En d’autres termes, les jugements légaux ne s’appliquent qu’à lui, exclusivement de ceux qui n’ont pas rempli les conditions du taklif.
Tout mukallaf a comme première obligation de connaître Allah par ses attributs et les preuves y menant, au même titre que ses prophètes. Cette connaissance est tout simplement la science sur ce qui est permis, obligatoire et impossible d’attribuer à Allah et ses messagers.
Il existe une divergence sur la question de la première obligation. Un groupe de savants de notre école, parmi eux l’imam al Ash’ariy, est d’avis qu’il s’agit de la réflexion même menant à la connaissance. Pour d’autres, il s’agit de la volonté de réflexion sur le monde qui nous entoure comme le soutient l’imam al Juwayniy. Mais en réalité, toutes ces propositions se rejoingnent car la volonté et la réflexion sont le chemin de la connaissance qui est obligatoire pour chacun.
Sachant la réflexion ainsi que le connaissance d’Allah obligatoires pour chaque mukallaf, peut-on considérer valide la foi de celui qui adhère à la religion sans preuve ? L’adhésion sans preuve (taqlid) implique que le sujet croie sur l’indication d’une personne sans faire un effort de réflexion et de probation. Elle est donc le contraire de la connaissance qui se fait par la preuve et est une adhésion ferme sans doute.
Les savants sont unanimes pour déclarer interdit le taqlid dans la foi.
Ibn Hajib a dit : « La foi est la confirmation de la vérité et il s’agit d’une disposition intérieure suivant une connaissance selon l’avis le plus véridique. Il ne suffit donc pas de suivre quelqu’un sur cette question selon l’avis solide » [6].
Ils ont divergé ensuite sur l’obligation de la réflexion : est-elle obligatoire dans l’absolu ou seulement pour celui qui en a la capacité ? Le second avis est celui qui est retenu et c’est pourquoi le chaykh a dit [pouvant réfléchir]. La personne ne sera désobéissante qu’à condition de délaisser la réflexion s’il en a la capacité.
D’un autre côté, les mu’tazilah ont réfuté la foi de celui qui fait le taqlid, parce que le taqlid est contraire à la connaissance et donc à la fermeté dans la foi. Ce qui est retenu est que le muqallid est bien croyant , à condition de croire avec fermeté. Cette croyance avec fermeté est de sorte que si, par exemple, celui qu’il suit quittait l’Islam, le muqallid resterait ferme dedans par conviction. L’auteur de la Jawharat at Tawhid a dit :
Il a dit [7] : s’il reste ferme par la parole d’un autre, cela suffit… sinon, il ne sort pas de la perdition
Quant au musulman qui a été élevé dans un environnement musulman, à qui on a inculqué les élements de foi depuis l’enfance et a eu des informations sur le prophète ‘alayhis salatu was salam et ses miracles, cela lui suffit comme réflexion et probation et sa foi est établie.
Tambih : Les maîtres soufis ont en plus de cela établi l’obligation d’arriver à la connaissance par l’expérimentation mystique.
Ibn ‘Arabiy a dit en résumé : « Il y a cinq degrés de foi :
Ces deux catégories de personne sont toutes deux voilées
Ceux qui sont à ces deux stations ont une démarche inductive du Créateur vers la créature
Ce qui est obligatoire pour le musulman, ce sont les deux premières catégories. Les autres sont un don qu’Allah fait à qui Il veut.
Le taklif a comme condition la raison…ainsi la puberté par le sang ou la grossesse
Ou par le sperme ou la pilosité… ou encore par l’atteinte de dix-huit années
Après avoir indiqué ce qui était obligatoire au mukallaf par rapport à sa croyance, le chaykh donne les conditions qui rendent responsable la personne.
Le taklif a comme définition terminologique l’imposition d’une charge ou demander quelque chose qui comporte une charge. Cela revient à dire que le taklif est le fait que la personne soit destinataire des règles de la l’Islam, à savoir l’obligation, l’interdiction, la détestation, la recommandation et la permission.
De fait, le taklif ne concerne que les hommes et les jinns, à l’exclusion des anges et des animaux. Ce qui est décisif dans le taklif, c’est la possibilité de choisir entre l’obéissance et la désobéissance, ce qui n’est pas un attribut des anges et des animaux.
Les conditions du taklif sont au nombre de trois, alors que le chaykh n’en a cité que deux :
« la plume est levée pour trois personnes :le fou jusqu’à ce qu’il guérisse ; l’endormi jusqu’à ce qu’il se réveille ; l’enfant jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de raison » [8].
La puberté a ses signes comme le rappelle l’auteur. Il s’agit d’abord, pour la femme, de l’apparition de ses menstrues. Un autre signe est l’apparition d’une grossesse si le signe précédent ne s’est jamais manifesté.
Le reste des signes est partagé par les deux sexes. Un signe évident de la puberté est l’éjaculation, comme le vise le chaykh par sa parole [ par le sperme]. Il s’agit de l’éjaculation de sperme par l’homme ou la femme qui marque ainsi sa maturité sexuelle. Les caractères sexuels secondaires sont aussi des signes de puberté. Le chaykh a cité la [pilosité], à savoir la pilosité des aisselles, du pubis, la moustache, la barbe.
Si aucun de ces signes n’apparait, on considère ue l’individu devient mukallaf à l’atteinte de dix-huit ans.
Donc, la mécréance ne peut être avérée qu’après avoir reçu le message de l’Islam. De sorte, ces gens qu’on appelle ceux de la fitrah (nature première) sont aussi destinés au paradis selon l’avis des ash’aris. Celui qui n’a pas reçu le message de l’Islam est donc sauvé, même s’il adore des idoles, professe l’atéhisme ou quelqe chose de similaire. Cette position est différente de celle des compagnons de l’imam Abul Mansur al Maturidiy qui estiment que celui qui n’a pas reçu le message de l’Islam sera jugé sur la conception du bien et du mal dans son environnement. En effet, ils estiment que cette connaissance est liée à la raison et est une obligation d’Allah pour chaque personne, même si elle n’a pas reçu la révélation.
Le sens de l’atteinte de l’appel du prophète ‘alayhis salatu was salam est tout simplement de recevoir la nouvelle de l’arrivée d’un prophète arabe s’appelant Muhammad, qui vient de la part d’Allah et confirme les messagers précédents. En d’autres mots, si la personne comprend l’expression de la shahadah « point de dieu qu’Allah, Muhammad est son messager », elle devient responsable.
Cela implique aussi que le taklif ne se limite pas aux musulmans seulement, mais à tous ceux qui remplissent les conditions citées. Quiconque est pubère, raisonnable et a entendu parler du prophète ‘alayhis salatu was salam est destinataire des règles de l’Islam. S’il ne répond pas à cet appel, il sera châtié pour ses manquements aux ordres d’Allah dans l’au-delà selon l’avis des malikites, contrairement aux hanafites qui estiment qu’ils ne sera châtié que pour sa mécréance.
D’un autre côté, ces sont conditions cumulatives. Celui qui ne remplit pas une seule de ces conditions aura comme destination le paradis.
Tambih sur les arabes de la Jahiliyyah : les arabes avant l’Islam sont aussi des gens de la Fitrah et sont au paradis. En effet, aucune révélation ne leur était destinée comme il est dit dans le coran : « Pour que tu avertisses un peuple dont les ancêtres n’ont pas été avertis » [11].
Cela implique donc que ces arabes n’ont pas reçu un message qui les aurait obligés à professer l’unicité d’Allah, même s’il restait des traces de cette unicité chez certains. Ensuite, le message de sayyiduna ‘Isa ‘alayhis salam, à savoir le christianisme, ne les concernait pas, contraiement à l’assertion de an Nawawiy. En effet, l’Injil était une révélation destinée exclusivement aux juifs et non aux autres peuples.
De sorte, les ancêtres du prophète ‘alayhis salatu was salam sont eux aussi des gens de la Fitrah et du paradis, à plus forte raison son père et sa mère, qu’Allah les agrée. Et ne sera pas pris en compte l’avis de celui qui s’est isolé, a dépassé les limites de la pudeur et les a condamnés au feu. Il a été dit :
Je suis convaincu que le père du prophète ainsi que sa mère…ont été ressuscités par le Seigneur Généreux et Créateur [12]
Et ils ont témoigné de la véracité de son message…de vérité et voici un prodige d’al Mukhtar
Voici le hadith et celui qui le prétend faible… est lui-même faible et dénué de vérité (haqiqah)
Tambih : sur les pseudo-soufis de notre époque qui se sont abreuvés des écrits des bouddhistes et autres mécréants et se sont détournés de la sunnah. Ils prétendent que toutes les religions sont valides et plus particulièrement celle des juifs et des chrétiens, que ceux là ne sont pas mécréants et iront au paradis, même s’ils renient l’Islam. Et qu’il n’y a point besoin de suivre sayyiduna Muhammad ‘alayhis salatu was salam pour être sauvé, accéder à la connaissance d’Allah et entrer au paradis
La réponse à eux adressée est : si vous êtes convaincus de cette assertion, devenez juifs ou chrétiens et nous verrons qui aura le dernier mot ! Si les juifs et chrétiens sont des croyants, les musulmans sont-ils donc les mécréants ? Si leur religion est valide, l’Islam ne peut donc être valide car deux choses contradictoires ne peuvent être vraies en même temps. Si les juifs et chrétiens habitent le paradis, l’enfer a été préparé pour les musulmans alors ?
En réalité, cette croyance est très grave car elle contredit le coran clair, la sunnah et le consensus des musulmans. La foi a été établie clairement par Allah et il s’agit de la croyance en Lui, en ses messagers, aux anges, à ses livres, au jour dernier et au destin. Allah dit : « Le messager a cru en ce qui lui a été révélé de son Seigneur, ainsi que les croyants. Tous croient en Allah, en ses anges, en ses livres et ses messagers. Nous n’excluons aucun d’entre eux » [13]. Il dit : « O les croyants, croyez en Allah, en ses messagers, au livre qu’Il a envoyé à son messager ainsi qu’au livre envoyé avant. Quiconque mécroit en Allah, en ses anges, en ses messagers, en ses livres et au jour dernier s’est certes égaré d’un égarement lointain » [14].
Dans le célèbre hadith de Jibril : « La foi est que tu croies en Allah, en ses anges, en ses messagers, en ses livres, au jour dernier ainsi qu’au destin, favorable ou défavorable » [15].
Or, ni les juifs, ni les chrétiens n’entrent dans cette catégorie de la foi.
Les juifs sont des mécréants du fait qu’ils ont nié la prophétie de sayyiduna ‘Isa, ‘alayhis salam ainsi que l’Injil, en plus d’avoir nié l’Islam. Ensuite, ils ne croient ni à la résurrection, ni au jugement.
Allah dit à leur propos : « O les croyants, soyez des auxiliaires d’Allah comme a dit ‘Isa aux apôtres « Qui sont mes auxiliaires vers Allah ? » Les apôtres dirent « nous sommes les secoureurs d’Allah ». Une partie des Banu Isra’il crut alors qu’une autre partie mécrut » [16].
Quant aux chrétiens, ils ont mécru en Allah en lui attribuant la trinité, en l’assimilant à sayyiduna ‘Isa ou en faisant son fils, en plus de leur méréance en l’islam. Allah dit : « Ont mécru ceux qui ont dit « Allah est le Messie fils de Maryam » [17]. Il dit : « Ont mécru ceux qui ont dit « Allah est troisième de trois » [18].
La mécréance des non-musulmans en général est clairement établie par le fait de nier la révélation de l’Islam et la venue du prophète ‘alayhis salatu was salam. Il suffit en effet de mécréance de mécroire à sayyiduna Muhammad dont le nom est inscrit sur la porte du paradis. Il est encore une autre cause de mécréance le fait de nier la Parole d’Allah qui est le coran. Après cela, comment peut-il rester une once de foi dans le cœur ? Allah dit parlant des juifs : « Quand il leur est venu un livre d’Allah confirmant ce qui était avec eux alors qu’avant ils cherchaient la victoire par son biais contre mécréants. Quand (le livre) leur vint, ils mécrurent en lui. Que la malédiction d’Allah soit sur les mécréants ! » [19]. Il dit : « Et quand on leur dit « croyez en ce qu’a envoyé Allah » ils disent « On croit en ce qui nous a été envoyé » et ils mécroient en ce qui est venu après » [20].
Il dit, montrant clairement que les juifs et chrétiens sont des associateurs et donc des mécréants, contrairement à sayyiduna Ibrahim : « Ils disent « soyez juifs ou chrétiens, vous serez bien-guidés ». Dis :« plutôt, la religion d’Ibrahim, en exclusivité. Lui n’était pas parmi les associateurs » [21].
Il dit aussi : « O les gens du livre, pourquoi mécroyez-vous aux versets d’Allah alors que vous êtes témoins ? » [22].
Il dit : « Quiconque désire une autre religion que l’Islam, cela ne lui sera pas accepté et il sera parmi les perdants au jour dernier. Comment Allah guiderait-Il un peuple qui a mécru après avoir cru et atteste que le messager est de vérité et que les preuves leur sont venues ? » [23].
Allah établit aussi la mécréance de ceux qui croient en certains prophètes et nient les autres : « Ceux qui mécroient en Allah ainsi que ses messagers et veulent distinguer enter Allah et ses messagers en disant « nous croyons en certains et mécroyons en certains » et veulent prendre un chemin intermédiaire… voilà certes les vrais mécréants » [24].
Il déclare aussi la mécréance de quiconque mécroit au coran et en son dernier messager :
« Ceux qui ont mécru et ont démenti nos versets, voici les gens de l’enfer » [25]. « Ceux qui ne croient pas en Allah et son messager…nous avons préparé le feu pour les mécréants » [26].
Les versets à ce propos abondent et cette évocation succinte convaincra l’aveugle. Quiconque veut explorer la question n’aura qu’à lire les versets de ce rappel sage.
Quant à la sunna, elle est tout aussi claire : « Par celui dont l’âme de Muhammad est entre sa Main, il n’y a personne qui entende parler de moi dans cette communauté, qu’il soit juif ou chrétien, et meure sans croire à ce qui avec quoi j’ai été envoyé sans être parmi les gens du feu » [27].
An Nawawiy a dit, en commentant ce hadith : « sa parole [ Il n’y a personne qui entende parler de moi dans cette communauté] c’est-à-dire de ceux qui sont vivants à mon époque ainsi qu’après moi jusqu’au jour de résurrection [28]. Il leur est obligatoire à tous d’entrer dans son obéissance et il a mentionné les juifs et les chrétiens comme avertissement pour les autres qui n’en sont pas. En effet, les juifs et chrétiens ont un livre. Si telle est leur destination malgré qu’ils ont un livre, ceux qui n’ont pas de livres sont dans une situation pire » [29].
Que ceux-là qui se réclament soufis suivent les pas de leurs prédécesseurs dans cette voie car aucun d’entre eux n’a suivi l’hérésie qu’est le pérennialisme.
Al Ghazaliy a dit : « La mécréance est de renier le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam ou une chose avec laquelle il est venu. La foi est de croire en tout ce avec quoi il est venu. Les juifs et les chrétiens sont des mécréants du fait de leur négation du messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam » [30].
Il faut surtout savoir que celui qui porte une telle croyance, celle de la validité d’une autre religion que l’Islam ou que l’on puisse avoir la foi hors de l’Islam ou accéder au paradis en reniant le prophète ‘alayhis salatu was salam a apostasié de sa religion et est devenu lui-même mécréant. En effet, cette question fait partie des connaissances obligatoires de la religion que la personne n’est pas excusée d’ignorer. D’ailleurs, pour avoir une foi valide, le musulman doit professer avec certitude sa foi en Allah et n’éprouver aucun doute sur l’abrogation des autres religions, fussent-elles révélées.
L’imam as Sawiy a dit : « Quant à celui qui doute, s’illusionne ou hésite, il est mécréant par consensus (ijma’), à l’image de celui qui dit : « les musulmans ont une religion. Les chrétiens ont une religion. Seul Allah sait qui d’entre eux est sur la vérité » [31].
Le Qadiy ‘Iyad ibn Musa a dit :« il y a ijma’ sur la mécréance de celui qui ne proclame pas la mécréance des juifs et des chrétiens ou de tout non-musulman ou bien ne se prononce pas sur leur mécréance ou même en doute. Le Qadiy Abu Bakr (Ibn Tayyib al Baqillaniy) a dit :« tout simplement parce les textes et l’ijma’ s’accordent sur leur mécréance. Quiconque ne se prononce pas sur cela aura démenti les textes clairs ou bien en aura douté. Douter ou démentir les textes ne peut se produire que pour un mécréant » [32].
Il dit aussi : « A mécru celui qui ne déclare pas la mécréance de celui qui adhère à autre que l’Islam ou ne se prononce pas dessus ou même doute ou déclare leur voie authentique et même s’il professe l’Islam en apparence » [33].
An Nawawiy a dit : « A mécru celui qui ne déclare pas la mécréance de celui qui adhère à autre que l’Islam, comme les chrétiens, ou ne se prononce pas dessus ou même doute ou déclare leur voie authentique et même s’il professe l’Islam en apparence et y croit » [34].
A suivre…
[1] Nous reviendrons infra sur le sens de ce mot
[2] Mukhtasar al Akhdariy
[3] Sourate al ambiya, v 22
.لَوْ كَانَ فِيهِمَا آلِهَةٌ إِلَّا اللَّهُ لَفَسَدَتَا
[4] Sourate al mu’minun, v 91
مَا اتَّخَذَ اللَّهُ مِن وَلَدٍ وَمَا كَانَ مَعَهُ مِنْ إِلَهٍ إِذاً لَّذَهَبَ كُلُّ إِلَهٍ بِمَا خَلَقَ وَلَعَلَا بَعْضُهُمْ عَلَى بَعْضٍ
[5] Sharh as Sawiy ‘ala jawharah at tawhid
[6] ‘Aqidah Ibn Hajib
[7] Le pronom renvoie au Chaykh Taj ad Din as Subkiy qui avance que la divergence sur cette question n’est que terminologique
[8] Rapporté par Abu Dawud as Sijistaniy :
عن ابن عباس قال أتي عمر بمجنونة قد زنت فاستشار فيها أناسا فأمر بها عمر أن ترجم مر بها على علي بن أبي طالب رضوان الله عليه فقال ما شأن هذه قالوا مجنونة بني فلان زنت فأمر بها عمر أن ترجم قال فقال ارجعوا بها ثم أتاه فقال يا أمير المؤمنين أما علمت أن القلم قد رفع عن ثلاثة عن المجنون حتى يبرأ وعن النائم حتى يستيقظ وعن الصبي حتى يعقل قال بلى قال فما بال هذه ترجم قال لا شيء قال فأرسلها قال فأرسلها قال فجعل يكبر
[9] Sourate al isra, v 15
وَمَا كُنَّا مُعَذِّبِينَ حَتَّى نَبْعَثَ رَسُولاً
[10] Sourate al Qasas, v 59
وَمَا كَانَ رَبُّكَ مُهْلِكَ الْقُرَى حَتَّى يَبْعَثَ فِي أُمِّهَا رَسُولاً يَتْلُو عَلَيْهِمْ آيَاتِنَا وَمَا كُنَّا مُهْلِكِي الْقُرَى إِلَّا وَأَهْلُهَا ظَالِمُونَ
[11] Sourate Ya Sin, v 6
.لِتُنذِرَ قَوْماً مَّا أُنذِرَ آبَاؤُهُمْ
[12] Il s’agit d’un hadith rapporté par al Khatib et qui a été jugé comme fabriqué ou d’une extrême faiblesse par les savants.
[13] Sourate al baqarah, v 285
آمَنَ الرَّسُولُ بِمَا أُنزِلَ إِلَيْهِ مِن رَّبِّهِ وَالْمُؤْمِنُونَ كُلٌّ آمَنَ بِاللّهِ وَمَلآئِكَتِهِ وَكُتُبِهِ وَرُسُلِهِ لاَ نُفَرِّقُ بَيْنَ أَحَدٍ مِّن رُّسُلِهِ
[14] Sourate an nisa, v 136
.يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُواْ آمِنُواْ بِاللّهِ وَرَسُولِهِ وَالْكِتَابِ الَّذِي نَزَّلَ عَلَى رَسُولِهِ وَالْكِتَابِ الَّذِيَ أَنزَلَ مِن قَبْلُ وَمَن يَكْفُرْ بِاللّهِ وَمَلاَئِكَتِهِ وَكُتُبِهِ وَرُسُلِهِ وَالْيَوْمِ الآخِرِ فَقَدْ ضَلَّ ضَلاَلاً بَعِيداً
[15] Rapporté par Muslim et Bayhaqiy
[16] Sourate as saff, v 14
يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آَمَنُوا كُونوا أَنصَارَ اللَّهِ كَمَا قَالَ عِيسَى ابْنُ مَرْيَمَ لِلْحَوَارِيِّينَ مَنْ أَنصَارِي إِلَى اللَّهِ قَالَ الْحَوَارِيُّونَ نَحْنُ أَنصَارُ اللَّهِ فَآَمَنَت طَّائِفَةٌ مِّن بَنِي إِسْرَائِيلَ وَكَفَرَت طَّائِفَةٌ
[17] Sourate al ma’idah, v 17
لَّقَدْ كَفَرَ الَّذِينَ قَآلُواْ إِنَّ اللّهَ هُوَ الْمَسِيحُ ابْنُ مَرْيَمَ
[18] Sourate al ma’dah, v 73
لَّقَدْ كَفَرَ الَّذِينَ قَالُواْ إِنَّ اللّهَ ثَالِثُ ثَلاَثَةٍ
[19] Sourate baqarah, v 89
وَلَمَّا جَاءهُمْ كِتَابٌ مِّنْ عِندِ اللّهِ مُصَدِّقٌ لِّمَا مَعَهُمْ وَكَانُواْ مِن قَبْلُ يَسْتَفْتِحُونَ عَلَى الَّذِينَ كَفَرُواْ فَلَمَّا جَاءهُم مَّا عَرَفُواْ كَفَرُواْ بِهِ فَلَعْنَةُ اللَّه عَلَى الْكَافِرِينَ
[20] Sourate al baqarah, v 89
.وَإِذَا قِيلَ لَهُمْ آمِنُواْ بِمَا أَنزَلَ اللّهُ قَالُواْ نُؤْمِنُ بِمَا أُنزِلَ عَلَيْنَا وَيَكْفُرونَ بِمَا وَرَاءهُ
[21] Sourate al baqarah, v 135
وَقَالُواْ كُونُواْ هُوداً أَوْ نَصَارَى تَهْتَدُواْ قُلْ بَلْ مِلَّةَ إِبْرَاهِيمَ حَنِيفاً وَمَا كَانَ مِنَ الْمُشْرِكِينَ
[22] Sourate Ali ‘Imran, v 70
يَا أَهْلَ الْكِتَابِ لِمَ تَكْفُرُونَ بِآيَاتِ اللّهِ وَأَنتُمْ تَشْهَدُونَ
[23] Sourate Ali ‘Imran, v 85-86
وَمَن يَبْتَغِ غَيْرَ الإِسْلاَمِ دِيناً فَلَن يُقْبَلَ مِنْهُ وَهُوَ فِي الآخِرَةِ مِنَ الْخَاسِرِينَ
كَيْفَ يَهْدِي اللّهُ قَوْماً كَفَرُواْ بَعْدَ إِيمَانِهِمْ وَشَهِدُواْ أَنَّ الرَّسُولَ حَقٌّ وَجَاءهُمُ الْبَيِّنَاتُ وَاللّهُ لاَ يَهْدِي الْقَوْمَ الظَّالِمِينَ
[24] Sourate an nisa’, v 150-151
إِنَّ الَّذِينَ يَكْفُرُونَ بِاللّهِ وَرُسُلِهِ وَيُرِيدُونَ أَن يُفَرِّقُواْ بَيْنَ اللّهِ وَرُسُلِهِ وَيقُولُونَ نُؤْمِنُ بِبَعْضٍ وَنَكْفُرُ بِبَعْضٍ وَيُرِيدُونَ أَن يَتَّخِذُواْ بَيْنَ ذَلِكَ سَبِيلاً
أُوْلَـئِكَ هُمُ الْكَافِرُونَ حَقّاً
[25] Sourate al ma’idah, v 86
وَالَّذِينَ كَفَرُواْ وَكَذَّبُواْ بِآيَاتِنَا أُوْلَـئِكَ أَصْحَابُ الْجَحِيمِ
[26] Sourate al fath, v 13
وَمَن لَّمْ يُؤْمِن بِاللَّهِ وَرَسُولِهِ فَإِنَّا أَعْتَدْنَا لِلْكَافِرِينَ سَعِيراً
[27] Rapporté par Muslim :
عن أبي هريرة رضي الله عنه عن رسول الله صلى الله عليه وسلم أنه قال والذي نفس محمد بيده لا يسمع بي أحد من هذه الأمة يهودي ولا نصراني ثم يموت ولم يؤمن بالذي أرسلت به إلا كان من أصحاب النار
[28] Comme il est connu, la Ummah du prophète ‘alayhis salatu was salam est toute l’humanité jusqu’au jour du jugement
[29] Al minhaj fi shrah Muslim ibn Hajjaj
[30] Faysal at tafriqah baynal islam wal zandaqah
[31] Sharh as Sawiy ‘ala jawharah at tawhid
[32] Ash Shifa’ bi ta’rif huquq al mustafa
[33] Idem
[34] Rawdah at talibin
La vision d’Allah est assurément la consécration suprême du musulman et du croyant. Percevoir La Divinité est le plus grand bienfait qui puisse être donné à l’homme qui a un cœur ou prête l’oreille tout en étant témoin. Ainsi, Allah a dit : « Pour ceux qui ont atteint al Ihsan, le bien et même encore plus ! » [1] C’est-à-dire la vision de leur Seigneur.
Ainsi, cette vision est un élément de foi qui a été confirmé par les versets clairs et à sens unique et aussi par l’abondance de narrations prophétiques. Elle fait partie de la ‘aqidah de ahlus sunna wal jama’ah.
La vision d’Allah est classée par les gens du Kalam parmi les choses possibles [2]. En effet, rien ne s’oppose à cette possibilité et sayyiduna Musaﷺ en est la preuve. Dans la sourate al a’raf : « Seigneur, laisse moi te voir. « Tu ne me verras pas. Mais regarde la montagne, si elle tient à sa place, tu me verras » [3].
As Sawiy dit : « Nous disons que la vision d’Allah est possible car Allah l’a conditionnée à une chose possible rationnellement, c’est-à-dire, le fait que la montagne reste à sa place quand Il descend vers elle. Et toute chose qui est liée à une possibilité est elle-même possible. Allah dit « Si elle tient à sa place tu me verras » et a lié sa vision au fait que la montagne tienne à sa place à Sa descente et cela est rationnellement possible. Aussi, Musa, l’homme qui a parlé à Allah, a demandé à voir Allah. Si cela n’avait pas été possible, il ne l’aurait pas demandé. Sinon, il aurait demandé cette vision en étant ignorant de sa possibilité et cela est inconcevable pour les prophètes. » [4]. Il dit aussi : « la preuve que cette vision est possible est tout simplement qu’Allah est Existant. Or, tout existant peut être vu » [5].
As Suyutiy dit au tafsir de ce verset : « Il l’a informé qu’il ne le verrait pas et n’a pas dit « on ne peut me voir ». Ceci montre la possibilité da sa vision » [6].
La vision d’Allah est donc une chose possible. Elle n’a été niée que par les Mu’tazilah qui ont dévié de la vérité et ont interprété les versets clairs du coran et rejeté les hadiths du messager d’Allah, ‘alayhis salatu was salam. Leurs arguments peuvent être résumés en deux positions :
Les gens de la vérité se sont réunis sur le fait qu’Allah sera vu par ses serviteurs croyants dans l’au-delà, dans le paradis. Allah dit en effet : « Il y aura des visages joyeux ce jour là, regardant leur Seigneur » [9]. Les textes de la sunna quant à eux font légion sur cette question et cette information est du degré du tawatur. Nous en citons le plus célèbre : « O messager d’Allah, verrons-nous notre Seigneur au jour de la résurrection ? » Il dit « Avez-vous un problème pour voir la pleine lune ? ». Il fut répondu : « Non, O messager d’Allah » Il continua « Avez-vous un problème pour voir le soleil quand il n’y a pas de nuage ? » « Non plus, O messager d’Allah ». Il dit : « C’est ainsi que vous verrez votre Seigneur au jour de la résurrection » [10].
As sawiy dit : « Les gens de la sunna sont unanimes sur la vision d’Allah dans l’au-delà. Les versets et hadiths rapportés sur ce sujet doivent être pris au sens apparent et ne pas être interprétés » [11].
Il dit aussi : « la vision d’Allah au paradis sera selon les états des serviteurs. La vision des gens du commun sera pour le jour du jumu’ah. Sur cela, il n’y a pas de distinction entre les hommes et les femmes selon l’avis solide. » [12].
Quant aux mécréants et aux hypocrites le summum de leur châtiment sera d’être voilés d’Allah et de ne point le voir dans sa réalité. Dans le hadith, Allah dira : « ... qu’attendez vous ? ». Ils diront « nous attendons notre Seigneur ». Il dira « Je suis votre Seigneur ».Ils diront « Nous attendrons jusqu’à le voir ». Il se manifestera à eux en riant. Et il sera donné à chaque homme d’entre eux de la lumière, qu’il soit croyant ou hypocrite... » [13].
Ce hadith prouve que les hypocrites verront Allah. Seulement, ils seront voilés de sa réalité et ne sauront pas le reconnaître. C’est à eux qu’est en réalité destiné ce verset « O non ! Ils seront voilés de leur seigneur ce jour là » [14].
La plupart des savants ont rejeté cet avis et ont opté pour le fait que les mécréants ne verront pas Allah du tout. Le chaykh de nos chuyukh, sayyiduna Ahmed Zarruq dit :« Allah a fait de cette vision une faveur accordée aux croyants dans la vraie demeure, dans l’au-delà. Les mécréants n’ont donc aucune part de cette faveur. Allah dit « O non ! Ils seront voilés de leur Seigneur ce jour là »[15].
Les musulmans sont unanimes sur la possibilité de voir Allah dans un rêve. Il est dit dans Tuhfah al murid [16] : « Quant au fait de voir Allah dans un rêve, le Qadi ‘Iyad a rapporté qu’il n’y a aucune divergence sur son occurrence et sur sa véracité. Le shaytan ne peut se faire passer pour Lui, comme pour les prophètesﷺ . D’autres que lui ont évoqué une divergence. Certains d’entre eux ont dit : « chaytan peut se faire passer pour Lui, différemment d’un prophète. La différence est que le prophète est un homme et qu’il est obligé que celui qui se fait passer pour lui essaie de tromper autrui. Cela est différent pour notre Maître Suprême dont l’affaire est connue. Certains ont dit : « Il n’est pas possible qu’il (le shaytan) prenne la forme d’un ange ni du soleil ni de la lune ni d’une étoile brillante ni même d’un nuage dans lequel se trouverait de l’eau. » Il a été aussi rapporté que l’imam Ahmed a vu notre Maître Suprême dans son sommeil quatre-vingt dix-neuf fois. Il dit : « J’eus le désir de le voir une centième fois pour lui poser une question ». Quand il Le vit, il dit :« Mon maître et mon Seigneur, par quoi se rapprochent le plus de toi les rapprochés ? » Il dit : « Par lecture de ma Parole ». Ahmed rétorqua :« Avec sa compréhension ou sans sa compréhension ? » Il dit :« O Ahmed, avec ou sans compréhension ». Celui qui est vu, même s’il vient sous une forme impossible à Allah, il s’agit de Lui effectivement. Et s’il vient sous la forme d’un homme par exemple, cet homme n’est pas Lui dans la réalité. Il s’agit plutôt d’une de ses créatures et il est dit dans ce cas qu’on aura vu Son Seigneur dans une forme de sagesse qui apparaît à ceux qui le voient comme indiquant telle et telle chose. D’autres ont dit aussi qu’il s’agissait de lui en vrai mais que son apparence sous cette forme relève de l’idée qu’en avait déjà celui qui Le voit. Mais dans la réalité, Il n’a point cette apparence. Un soufi a dit qu’il avait vu son Seigneur dans le sommeil sous Son apparence. On lui demanda :« comment l’as-tu vu ? » Il dit « Ma vue intérieure s’est retournée sur ma vue et toute ma vision devint intérieure. Et j’ai alors vu celui à qui rien ne ressemble ».
Quant à la vision d’Allah en état d’éveil, les gens du kalam l’ont rejetée à l’unanimité. Malgré qu’ils ont déclaré sa possibilité dans ce monde comme dans l’autre, ils ont réfuté son occurrence dans le monde d’ici-bas. Ils tiennent pour argument le fait qu’Allah ait refusé sa vision à sayyidina Musaﷺ . Aussi, il est dit dans le hadith « vous ne verrez pas votre Seigneur tant que vous ne serez pas morts » [17]. Al Qushayriy a cependant rapporté de l’imam al Ash’ariy une deuxième position, sur la possibilité d’occurrence de cette vision dans le monde [18]. Il est dit « Celui qui prétend voir Allah à l’état d’éveil avec les yeux de sa tête est un égaré qui égare, un pervers. Il a même été dit que c’est un apostat ». Il est dit aussi que la sagesse qu’Allah ne soit pas visible dans ce monde tient du fait que si le pieux le voyait, le pécheur aurait l’argument de dire que s’il l’avait vu aussi, il n’aurait pas désobéi. De même, si le désobéissant le voyait, il serait meilleur que le pieux. Alors que si les deux le voyaient il n’y aurait pas de préférence de l’un sur l’autre.
Nous disons : peut-être que cette position est liée au fait de voir l’Essence d’Allah. Quant au fait de voir les isharat vers cette Essence, nul ne peut le nier, à moins d’abjurer le coran. Effectivement, Allah dit à propos de sayyiduna Musaﷺ : « Et quand il vint vers Elle, il fut appelé « Béni soit celui qui est dans le feu et ceux qui sont autour ». Et louange à Allah, le seigneur des mondes. O Musa, je suis Allah le Puissant et Sage » [19].
At Tabariy dit à propos de Celui qui est dans le feu : « les gens du tafsir ont divergé dessus. Certains ont dit qu’Il visait Lui-même. C’est Lui-même qui était dans le feu et ce feu n’était autre que sa Lumière, comme l’ont dit une partie des gens du ta’wil. Nous a rapporté Muhammad Ibn Sa’d qui dit « Mon oncle m’a rapporté en disant : mon prère m’a rapporté selon ibn ‘Abbas sur Sa Parole « Et quand il vint vers Elle, il fut appelé « Béni soit celui qui est dans le feu.. » que cela visait Allah Lui-même. Il a dit : la Lumière du Maître des mondes était dans l’arbre » [20].
Al Qurtubiy dit : « Ce qui montre la véracité de l’interprétation de ibn ‘Abbas est le hadith suivant qui a été rapporté par Muslim dans son sahih, par ibn Majah dans ses sunan avec une chaîne remontant à Abu Musa, que le prophète ﷺ a dit : « Allah ne dort point et il ne Lui convient pas de dormir.Il rabaisse la balance et l’élève. Son voile est la Lumière. Il la dévoilait, les souffles de Son Visage brûleraient toute chose sur qui tombe son Regard ».
Ainsi, la vision à l’état d’éveil d’une indication de l’Essence d’Allah est confirmée dans le coran, en plusieurs endroits. De même, les musulmans se sont mis d’accord sur le fait que le prophète ﷺ a vu Allah à l’état d’éveil et non en rêve. Dans le hadith rapporté dans le sahih Muslim, on demanda au prophèteﷺ s’il avait vu son Seigneur. Il dit « Une lumière, je Le vois en ce moment » [21]. Et dans une autre version rapportée par Muslim « j’ai vu une Lumière ».
An Nawawiy dit : « En résumé, l’avis préférable est que le messager d’Allahﷺ a vu son Seigneur avec les yeux de la tête la nuit de Isra’ selon le hadith de Ibn ‘Abbas et d’autres que nous avons déjà cités. » [22].
L’imam Badr ad din al ‘ayniy dit quant à lui : « Al Tabaraniy a rapporté avec une chaîne forte dans al Awsat selon ibn ‘Abbas que le messager d’Allah ﷺ avait vu son Seigneur deux fois. Il a dit d’autre part « Muhammad a vu son Seigneur comme Il a parlé à Musa, donné son amitié à Ibrahim et sa vision à Muhammad ». Il apparaît de cela que ce que visait ibn ‘Abbas est la vision avec l’œil » [23].
La vision à l’état d’éveil par le prophète ﷺ est acceptée par les savants en général. Mais ils ont réfuté cette possibilité pour autre que lui. Quant à la l’accusation de perversité et d’apostasie de celui qui prétendrait voir Allah avec les yeux de la tête dans ce monde, ceci ne peut concerner que la vision de l’Essence Sublime. Quant à la vision par l’œil du cœur ou la vision d’une indication de l’Essence par les yeux de la tête, il n’y a absolument aucune preuve pour la réfuter. Bien au contraire, cette vision a été confirmée au sujet de Sayyiduna Musaﷺ dans plusieurs versets du coran. Malgré cela, les gens du kalam n’ont pas accepté la possibilité de ce type de vision. Nous disons qu’il n’y a rien qui s’oppose à ce qu’un serviteur voit Allah par son cœur ou le voit selon une Isharah avec les yeux de la tête. Si ce type de vision a été affirmée pour le prophète ﷺ et sayyiduna Musa ﷺ , elle est aussi possible pour un wali, selon le principe que tout miracle de prophète est possible comme prodige pour un wali. Il faudrait dans ce cas un texte clair qui montrerait qu’une telle vision est impossible à autre que le prophèteﷺ .
Al Ustadh [24] dit : « Abul Hassan al Ash’ariy disait : le miracle ne peut apparaître que pour les véridiques car il s’agit du moyen de dévoiler le véridique du menteur. Il est aussi possible que pareil se produise pour quelqu’un qui n’est pas un prophète parmi les awliya ‘. Il s’agira alors d’un prodige pour eux » [25].
L’imam des haramayn dit : « Certains de nos compagnons ont penché pour l’avis que ce qui peut arriver comme miracle à un prophète ne peut se produire, en terme de degré et d’occurrence, au wali en tant que prodige... Mais cet avis n’est pas pertinent...Ce qui est reconnu à notre avis est que tout fait hors du commun peut se produire comme prodige » [26].
Ensuite, il n’y a pas d’argument du coran pour réfuter la vision d’Allah par les modalités qu’on a décrites. Le verset dit « les yeux ne peuvent l’atteindre », dans le sens où les yeux de la tête ne sauraient le percevoir dans son entièreté. Le verset suivant montre par contre la possibilité de la vision pour l’œil du cœur.
« Vous sont venues des visions intérieures (Basa’ir) de votre Seigneur, quiconque voit le fait pour lui et quiconque reste aveugle, ce sera contre lui » [27].
Ibn ‘Ajibah al Hassaniy dit : « La vision d’Allah est possible et se produit pour les soufis dans les deux mondes. Cependant, ne l’atteignent dans ce monde que l’élite de l’élite spirituelle. Ils obtiennent cette vision par la contemplation [28] et par les yeux. Et ceci ne se produit qu’après l’extinction et l’extinction de l’extinction après la mort du nafs, son affranchissement et la disparition de sa réalité et de ses traces » [29].
Quant au hadith « vous ne verrez votre Seigneur tant que vous ne mourrez pas », la réponse est dès lors claire. Vous ne le verrez tant que vous ne serez pas morts de vos passions et de vos nafs. C’est ainsi que l’ont compris les gens de la contemplation directe (mushahadah). Beaucoup d’entre eux, dont l’orthodoxie ne peut être remise en doute, ont ainsi attesté de leur vision d’Allah, selon les modalités qu’on a déjà décrites encore une fois. Ce qui conforte cet avis est le hadith rapporté par d’innombrables voies sur la vision d’Allah au jour de la résurrection. Dans ce hadith, il est dit au sujet des gens de la foi « ...Allah leur viendra dans une forme différente de celle qu’ils avaient connue... » [30]. Dans la version de Muslim, il est dit « ... Dans la forme la plus basse qu’ils l’avaient vu... ». Cela prouve que ces croyants avaient connu Allah dans ce monde au moins sous une forme, comme le dit textuellement le hadith. Le chaykh al Sha’raniy a dit : « Voir l’Essence d’Allah ne peut qu’être exempt de formes, de figurations. Cependant, le serviteur ne peut concevoir cette Essence que par un moyen qui se présente comme une indication réelle dans une forme de beauté qui sied à la Beauté Divine Réelle et figurative. Celle-ci ne peut être qualifiée de forme ni de couleur ou de représentation. Cependant, cette indication est une Réalité et une vérité car elle est le moyen de connaître (l’Essence réelle) » [31].
Il est rapporté de al Junayd, l’imam des deux groupes qu’un homme lui demanda « O Abal Qasim, as-tu vu ton Seigneur lors de tes adorations ou crois-tu être arrivé à Lui par ton cœur ? ». Al Junayd répondit « O toi le questionneur, sache que nous n’adorons pas un Seigneur que nous ne voyons pas ! Cependant, nous ne l’assimilons pas à ce que nos yeux voient, pas plus que nous ne l’assimilons à ce que nous ignorons. Nous ne serions pas à même de l’exempter de ressemblance dans ce cas. » L’homme demanda : « Dans ce cas, comment l’as-tu vu ? ».Il répondit : « La modalité est connue pour l’homme, inconnue pour le Seigneur. Les yeux de la tête ne sauraient le voir dans ce monde par vision directe. Mais les cœurs le connaissent par les réalités de la foi puis s’élèvent de la connaissance à la vision par contemplation directe de la lumière de la gratitude » [32].
En résumé, la vision d’Allah est totalement possible dans ce monde et dans l’autre. Allah sera vu par ses serviteurs au paradis et selon le coran, la sunna et le consensus des gens de la vérité. Quant à la vision dans ce monde, bien que possible, les savants ont nié son occurrence. La vision de l’Essence Sainte est interdite selon le consensus de tous les musulmans. Cependant, les textes clairs du coran et de la sunna et les paroles des gens du goût, de la lumière et de la connaissance montrent que cette vision est possible s’il s’agit d’une indication de l’Essence et non de l’Essence même.
Allah reste le plus Savant
[1] Sourate Yunus, v 26
[2] Le possible est dans la science du kalam ce qui peut ou non survenir
[3] Sourate al a’raf, v 143
[4] Sharh as Sawiy ‘ala jawharah at tawhid
[5] idem
[6] Tafsir al jalalayn
[7] Rapporté par al Bayhaqiy dans dal’ail an nubuwwah, adh Dhahabiy dans as siyar et al Khatib : أَخْبَرَنَا أَخْبَرَنَا أَبُو عَبْدِ اللَّهِ الْحَافِظُ , أنا حَمْزَةُ بْنُ الْعَبَّاسِ الْعَقَبِيُّ , ثنا عَبْدُ الْكَرِيمِ بْنُ الْهَيْثَمِ , حَدَّثَنَا أَحْمَدُ بْنُ صَالِحٍ , ثنا ابْنُ وَهْبٍ , أَخْبرَنِي يَحْيَى بْنُ أَيُّوبَ , عَنْ مُحَمَّدِ بْنِ عَجْلانَ , عَنْ نَافِعٍ , عَنِ ابْنِ عُمَرَ : أَنَّ عُمَرَ بْنَ الْخَطَّابِ ، بَعَثَ جَيْشًا , وَأَمَّرَ عَلَيْهِمْ رَجُلا يُدْعَى سَارِيَةَ ، قَالَ : فَبَيْنَا عُمَرُ يَخْطُبُ ، قَالَ : فَجَعَلَ يَصِيحُ , وَهُوَ عَلَى الْمِنْبَرِ : يَا سَارِيَةُ الْجَبَلَ ، يَا سَارِيَةُ الْجَبَلَ . قَالَ : فَقَدِمَ رَسُولُ الْجَيْشِ , فَسَأَلَهُ , فَقَالَ : يَا أَمِيرَ الْمُؤْمِنِينَ ، لَقِينَا عَدُوَّنَا فَهَزَمُونَا وَإِنَّ الصَّائِحَ لَيَصِيحُ ، يَا سَارِيَةُ الْجَبَلَ ، يَا سَارِيَةُ الْجَبَلَ ، فَشَدَدْنَا ظُهُورَنَا بِالْجَبَلِ , فَهَزَمَهُمُ اللَّهُ ، فَقِيلَ لِعُمَرَ : إِنَّكَ كُنْتَ تَصِيحُ بِذَلِكَ
[8] Sourate al an’am, v 103
[9] Sourate al qiyamah, v 22 et 23
[10] Rapporté par Bukhariy et Muslim et la plupart des auteurs de sunan
[11] Sharh as sawiy ‘ala jawharah at Tawhid
[12] ibid
[13] Rapporté par Muslim, Ahmed, ad Darimiy : نَحْنُ يَوْمَ الْقِيَامَةِ عَلَى كَوْمٍ فَوْقَ النَّاسِ ، فَيُدْعَى بِالْأُمَمِ وَبِأَوْثَانِهَا وَمَا كَانَتْ تَعْبُدُ ، الْأَوَّلَ فَالْأَوَّلَ ، ثُمَّ يَأْتِينَا رَبُّنَا بَعْدَ ذَلِكَ ، فَيَقُولُ مَا تَنْتَظِرُونَ ؟ ، فَيَقُولُونَ : نَنْتَظِرُ رَبَّنَا ، فَيَقُولُ : أَنَا رَبُّكُمْ ، فَيَقُولُونَ : حَتَّى نَنْظُرَ إِلَيْهِ " ، قَالَ : " فَيَتَجَلَّى لَهُمْ عَزَّ وَجَلَّ وَهُوَ يَضْحَكُ ، وَيُعْطِي كُلَّ إِنْسَانٍ مِنْهُمْ ، مُنَافِقٍ وَمُؤْمِنٍ ، نُورًا ، وَتَغْشَاهُ ظُلْمَةٌ
[14] Sourate al muttafifin, v 15
[15] Sharh sidi Zarruq ‘ala ‘aqidah al Ghazaliy
[16] Commentaire de jawharah at Tawhid par l’imam al Bayjuriy
[17] Rapporté par plusieurs auteurs et plusieurs voies et nous transcrivons la version de Muslim : قال ابن شهاب وأخبرني عمر بن ثابت الأنصاري أنه أخبره بعض أصحاب رسول الله صلى الله عليه وسلم أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال يوم حذر الناس الدجال إنه مكتوب بين عينيه كافر يقرؤه من كره عمله أو يقرؤه كل مؤمن وقال تعلموا أنه لن يرى أحد منكمربه عز وجل حتى يموت حدثنا
[18] Risalah al qushayriyah :فإن قيل: فهل تجوز رؤية الله في الأبصار في الدنيا على جهة الكرامة؟ فالجواب عنه: أن الأقوى فيه أنه لا يجوز لحصول الإجماع عليه ، ولقد سمعت الإمام أبا بكر بن فورك رضي الله عنه يروي عن أبي موسى الأشعري أنه قال: في ذلك قولان ، وذلك في كتاب الرؤية الكبير.
[19] Sourate an naml, v8
[20] Tafsir at Tabariy
[21] Ceci est la traduction appropriée et non « C’est une lumière, comment l’aurais-je vu ? ». An Nawawi précise la lecture du hadith : « une kasrah sous le Nun, et le tashdid sur le Ya » (al Minhaj fi sharh Sahih Mulim ibn Hajjaj)
[22] Al Minhaj fi sharh Sahih Mulim ibn Hajjaj
[23] Umdah al qariy sharh sahih al Bukhariy
[24] Les Sunnites ont l’habitude de designer certains grands savants par un titre qui leur est réservé. Quand on parle d’al Ustadh sans autre précision, il s’agit du savant Abu Bakr ibn Fawrak. Il fut un des trois imams qui ont établi les bases de l’école ash’arie. Il mourut en 406 de la Hijrah
[25] Mujarad maqalat abil Hassan al Ash’ariy de Imam Abu Bakr ibn Fawrak
[26] Al Irshad de l’imam al Juwayniy
[27] Sourate al an’am, v104
[28] Par la contemplation de l’œil du coeur
[29] Tafsir al bahr al madid
[30] Ce hadith a été rapporté, en différentes versions, par tous les livres majeurs de la sunnah. Nous mettons ici la version de al Bukhariy. Quant à la traduction, nous avons utilisés les mots en français qui correspondent à l’arabe, tout en sachant leur faiblesse dans le Tanzih d’Allah :عن أبي هريرة قال قال أناس يا رسول الله هل نرى ربنا يوم القيامة فقال هل تضارون في الشمس ليس دونها سحاب قالوا لا يا رسول الله قال هل تضارون في القمر ليلة البدر ليس دونه سحاب قالوا لا يا رسول الله قال فإنكم ترونه يوم القيامة كذلك يجمع الله الناس فيقول من كان يعبد شيئا فليتبعه فيتبع من كان يعبد الشمس ويتبع من كان يعبد القمر ويتبع من كان يعبد الطواغيت وتبقى هذه الأمة فيها منافقوها فيأتيهم الله في غير الصورة التي يعرفون فيقول أنا ربكم فيقولون نعوذ بالله منك هذا مكاننا حتى يأتينا ربنا فإذا أتانا ربنا عرفناه فيأتيهم الله في الصورة التي يعرفون فيقول أنا ربكم فيقولون أنت ربنا فيتبعونه ويضرب جسر جهنم
[31] Tariq al wusul ila al wilayah
[32] Mentionné par Ibn ‘Ajibah dans iqadh al himam
Le commandeur des musulmans [1] interrogea le juge Abul Walid ibn Rushd, le faqih, le qadi perspicace -qu’Allah augmente son exactitude et son intelligence et le guide vers le chemin du bien- à propos de Abil Hassan al Ash’ariy, Abi Ishaq al Isfarayiniy, Abi Bakr al Baqilaniy, Abi Bakr ibn Fawrak, Abil Ma’âliy et Abi Walid al Bajiy et de leurs opinions, eux qui ont établi la science du Kalam, ont parlé des fondements de la religion, se sont échinés à réfuter les gens de la passion, sont-ils des imams de la guidée et sur le droit chemin ou plutôt des chefs de l’ineptie et de l’égarement ? Que dis-tu des gens qui les insultent, dégradent leur rang, insultent quiconque prend de la science des ash’aris, les traitent de mécréants, se désolidarisent d’eux, leur nient la proximité d’Allah, pensent qu’ils sont dans l’égarement et enracinés dans l’ignorance ? Que faut-il leur répondre, comment faut-il les traiter et penser d’eux ? Faut-il les laisser sur leurs passions ou faut-il les obliger à cesser leurs exagérations ? Ce comportement constitue t-il une atteinte à leur foi et à leur croyance ? Peut-on toujours prier derrière eux ? Explique nous donc le degré des imams qu’on a mentionnés ainsi que leur place dans la religion. Eclaire-nous de manière complète et explicite sur le cas de celui qui leur porte atteinte et s’éloigne d’eux et sur le cas de celui qui les supporte et les aime, s’il plaît à Allah.
Le Qadi Ibn Rushd répondit : J’ai lu ta question -qu’Allah nous préserve ainsi que toi- et je m’y suis penché.
Ceux là que tu as nommés sont parmi les imams et savants du bien et de la guidée, ceux qu’il est obligatoire de suivre parce qu’ils se sont levés pour défendre la religion et mettre à terre les équivoques des gens de la déviance et de l’égarement. Ils ont clarifié les problématiques qu’ils ont soulevées et éclairci ce qui était obligatoire de croire en matière de religion. Du fait de leur connaissance des fondements de la religion, les savants ont attestés de la véracité de leur science en Allah, de ce qui lui est obligatoire, possible et impossible. De fait, on ne peut connaître les branches qu’après avoir maîtrisé les fondements. Il est donc obligatoire de reconnaître leurs mérites et d’affirmer leur position de maîtres. Il s’agit de ceux dont le messager d'Allâh ﷺ dit à leur propos : « Porteront cette science à chaque génération des gens de confiance. Ils en chasseront la falsification des extrémistes, l’ajout des menteurs et l’interprétation des ignorants » [2]. Ne pense donc qu’ils sont dans l’égarement et l’ignorance que l’idiot ignorant lui-même ou un innovateur déviant de la vérité et déjanté. Et ne les insulte ou ne leur attribue une caractéristique contraire à ce qu’ils méritent si ce n’est un pervers. Allah a dit « Ceux qui portent préjudice aux croyants et croyantes sans raison se chargent d’une calomnie et d’un péché évident » [3]. Il est donc obligatoire qu’on détrompe l’ignorant à leur propos, que l’on corrige le pervers. Quant à l’innovateur déviant de la vérité, il lui sera demandé de se repentir si son innovation est légère. S’il se repent... sinon, il sera battu jusqu’à ce qu’il se repente comme l’a fait ‘Umar ibn al Khattab avec Subaygh, qui avait été averti d’être battu à propos de sa croyance jusqu’à ce qu’il dise « O commandeur des croyants, si tu voulais me soigner, j’ai atteint l’endroit où se trouve le médicament ! Et si tu veux me tuer, laisse moi me préparer » [4]. Il le laissa alors.
Nous demandons à Allah la protection ainsi que le succès par sa Miséricorde, ainsi a parlé Muhammad ibn Rushd.
[1] Il s’agit de Abul Hassan ‘Ali ibn Yusuf ibn Tashfin, l’imam des Murabitun. Il fut élevé par son père dans l’amour de la science et la compagnie des savants. Il succéda à son père à la tête du Maghreb et de l’Andalousie et mourut en 537.
[2] Rapporté par al Bayhaqiy dans as sunan al kubra :
قال رسول الله - صلى الله عليه وسلم : يحمل هذا العلم من كل خلف عدوله ، ينفون عنه تحريف الغالين ، وانتحال المبطلين ، وتأويل الجاهلين
[3] Sourate 33 Verset 58
[4] Rapporté par Ad Darimi avec différentes chaines dans ses sunan :
عن نافع مولى عبد الله أن صبيغا العراقي جعل يسأل عن أشياء من القرآن في أجناد المسلمين حتى قدم مصر فبعث به عمرو بن العاص إلى عمر بن الخطاب فلما أتاه الرسول بالكتاب فقرأه فقال أين الرجل قال في الرحل قال عمر أبصر أيكون ذهب فتصيبك منه العقوبة الموجعة فأتاه به فقال عمر تسأل محدثة وأرسل عمر إلى رطائب من جريد فضربه بها حتى ترك ظهره دبرة ثم تركه حتى برأ ثم عاد له ثم تركه حتى برأ فدعا به ليعود له قال فقال صبيغ إن كنت تريد قتلي فاقتلني قتلا جميلا وإن كنت تريد أن تداويني فقد والله برأت فأذن له إلى أرضه وكتب إلى أبي موسى الأشعري أن لا يجالسه أحد من المسلمين فاشتد ذلك على الرجل فكتب أبو موسى إلى عمر أن قد حسنت توبته فكتب عمر أن ائذن للناس بمجالسته