بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على آله و أصحابه أجمعين
Il est devenu courant de voir des prédicateurs, ignorant ou méprisant la science islamique et l’héritage traditionnels, remettre en cause un fait acquis pour les générations passées et confirmé pendant des siècles, à savoir la vision à l’état d’éveil des anges et des prophètes. Cette nouvelle tendance en réalité ne date que de ce siècle, où le matérialisme de la doctrine salafiste a fini d’étendre ses tentacules pour faire de ces prédicateurs des hérauts d’une doctrine hétérodoxe. En effet, si l’on consulte attentivement les paroles des savants du passé, il est presque impossible de trouver l’occurrence d’une personne ayant réfuté la possibilité de voir les anges et les âmes des prophètes après leur mort physique. L’avis contraire reste au contraire anecdotique et ne peut être attribué, à notre connaissance, qu’à de rares savants s’étant isolés d’un avis unanime Il est constant au contraire qu’une telle chose est possible, au vu des preuves textuelles et de l’expérience des hommes.
La vision des anges, dans une forme quelconque, est une possibilité établie par le coran. En effet, Allah a dit, concernant sayyiduna Ibrahim ﷺ : « Quand vinrent nos messagers à Ibrahim avec la bonne nouvelle, ils dirent « Paix » il répondit « Paix ». Il ne reste pas un instant sans ramener un veau gras. Quand il vit que leurs mains ne le touchaient pas, il ne les reconnut plus et éprouva de la crainte à leur endroit » [1]
Il dit aussi : « Quand vinrent nos messagers à Lut et qu’il éprouva de la gêne pour eux, ils dirent « n’aie pas peur et ne sois pas triste. Nous allons te sauver ainsi que ta famille sauf ta femme qui sera parmi les gens détruits » [2]
Les messagers mentionnés dans ces deux versets font référence à des anges qui étaient venus visiter ces prophètes.
S’il est vrai qu’à ces deux occasions ces anges sont apparus à des prophètes, le coran atteste du fait que des non-prophètes puissent voir un ange sans nul doute et leur adresser la parole. Allah dit dans ce sens, concernant Maryam la fille de ‘Imran :
« Elle mit un voile entre eux et nous lui envoyâmes notre esprit qui se présenta à elle sous la forme d’un homme bien bâti. Elle dit : « je demande la protection du miséricordieux contre toi si tu es pieux ». Il dit : « Je suis un messager de ton Seigneur pour t’offrir un garçon purifié » [3]
Si l’on prétend que la prophétie de Maryam est un sujet de divergence parmi les savants de la ‘aqidah, cette possibilité de voir les anges pour un non-prophète est illustrée par deux autres événements.
Le premier est la vision de ces anges par sayyida Sarah, la femme de Ibrahim ﷺ dont Allah dit :
« Sa femme était debout, elle rit et on lui annonça Ishaq et après Ishaq, Ya’qub. Elle dit « Malheur à moi. Vais-je enfanter alors que je suis vieille et mon mari-ci est un vieillard ? C’est vraiment une chose étonnante ». Ils dirent : « T’étonnes-tu de l’ordre d’Allah ?... »[4]
Cette possibilité a même été accordée à des pervers notoires, c’est-à-dire les gens du peuple de sayyidina Lut ﷺ :
« Les gens de la ville vinrent avec joie. Il dit : « Ceux-là sont mes invités, ne me déshonorez pas. Craignez Allah et ne m’humiliez pas ». Ils dirent : « Ne t’avions-nous pas interdit de recevoir des gens ? »[5]
Il est clair de ce verset que les gens du peuple de sayyidina Lut ﷺ, malgré leur perversité évidente, voyaient ces anges sous la forme humaine et qu’ils reprochaient à sayyiduna Lut ﷺ de les recevoir chez lui. En effet, les anges avaient manifesté la volonté d’être vus, ce qui indique que leur vision n’est pas interdite, ni par la raison, ni par la révélation.
La sunnah confirme la possibilité pour les pieux parmi les musulmans de voir les anges sous une de leurs formes. Dans le hadith rapporté par al Bukhariy et Muslim, dans le hadith dit de jibril, ‘Umar ibn al Khattab a dit :
« Alors qu’on était assis auprès du messager d’Allah ﷺ, un homme apparut ayant des habits d’une blancheur éclatante, avec des cheveux d’une noirceur extrême, qu’aucun d’entre nous ne connaissait. Il s’approcha du messager d’Allah ﷺ et mit son genou contre son genou…» Jusqu’à ce qu’il dise : « Je restai quelques temps. Le messager d’Allah ﷺ me dit : « ‘Umar, sais-tu qui était le questionneur ? ». Je dis « Allah et son messager sont plus savants ». Il dit : « C’était Jibril qui était venu vous enseigner votre religion ».[6]
Ce hadith, dont le degré d’authenticité est mashhur, nous relate l’apparition d’un ange, sous forme humaine, à un groupe de compagnons, donc à un groupe de musulmans non-prophètes. Cette possibilité ne peut donc être réfutée, d’autant plus qu’elle est confirmée par le hadith rapporté par Muslim dans son Sahih :
« Hanzala a dit : Nous étions auprès du messager d’Allah ﷺ, il nous fit une exhortation et rappela l’enfer. Puis, je revins à la mosquée et me mis à rire avec mes enfants et jouer avec ma femme. Je sortis et rencontrai Abu Bakr. Je lui racontai ce qui m’arrivait et il dit : « J’éprouve exactement la même chose ». Nous rencontrâmes le messager d’Allah ﷺ et je lui racontai cela. Abu Bakr : « Moi aussi, cela m’arrive ». Je dis : « O messager d’Allah, Hanzala est devenu hypocrite ». Il dit : « Hanzala, chaque chose en son temps. Si vous restiez dans l’état où vous êtes pendant le rappel, les anges vous serreraient la main et vous salueraient dans la rue ». [7]
Al Suyutiy a dit en commentant ce hadith :
« Il y a ici une preuve sur la possibilité de voir les anges, comme prodige pour les awliya »[8]
L’expérience surtout conforme cette possibilité comme un prodige qu’Allah accorde à ses serviteurs. Cela veut dire qu’il est possible que le musulman voie les anges sous une forme sans que ceux-ci aient manifesté leur volonté d’être vus par eux, et cela par leur degré de rapprochement avec Allah.
Dans le Sahih de l’imam Muslim ibn Hajjaj, Salman a dit :
« On m’a informé que Jibril était venu voir le prophète ﷺ alors que Umm Salamah était à côté de lui. Il commença à parler puis s’en leva. Le prophète ﷺ demanda à Um Salamah : « qui était-ce ? » Elle dit : « c’était Dihyah ». Elle dit ensuite : « Je jure par Allah ! j’ai vraiment cru que c’était lui jusqu’à ce que j’entende le prophète ﷺ m’indiquer de qui il s’agissait réellement »[9]
An Nawawiy a dit :
« Ce hadith indique la possibilité pour un homme de voir les anges ainsi que l’occurrence d’un tel fait. Ils les voient alors sous la forme d’hommes car ils ne peuvent supporter la vue de leur forme originelle. »[10]
Dans le Musnad de l’imam Ahmed, Abu Salamah a rapporté de sayyida ‘Aishah qu’elle a dit :
« J’ai vu le messager d’Allahﷺ ayant posé ses deux mains sur les rênes d’un cheval tout en parlant avec un homme. Je lui dis : « Je t’ai vu parler avec Dihyah al Kalbiy en posant tes mais sur les rênes de son cheval et tu lui parlais ». Il me dit : « Tu l’as vraiment vu ? » Je dis « oui ». Il me répondit alors : « Ce n’était autre que Jibril et il te passe le salam ». Je dis alors : « Que la paix soit sur lui aussi, ainsi que la miséricorde d’Allah et ses bénédictions et qu’Allah le récompense comme compagnon, et quel bon compagnon et quel bon hôte ! »[11]
L’imam Ahmed rapporte de même à propos de Harithah ibn Nu’man :
« Je suis passé un jour devant le messager d’Allahﷺ alors qu’il était assis sur un siège et que Jibril était avec lui. Je le saluai et passai. Quand je fus lui, le messager d’Allahﷺ me rejoignit et dit : « As-tu vu celui qui était avec moi ? ». Je dis : « oui ». Il dit : « il s’agissait de Jibril et il te rend le salam »[12]
La vision des anges est donc possible rationnellement. Qui plus est, son occurrence est vérifiée pour les prophètes comme pour les pieux. L’imam as Suyutiy indique à cet effet :
« La vision des anges est possible à notre époque, comme prodige qu’Allah accorde à qui Il veut de ses Awliya. L’imam al Ghazaliy l’a mentionné dans al munqidh min al dalal ainsi que son élève, Abu Bakr ibn al ‘Arabiy qui était un imam des malikites dans son livre qanun al ta’wil.[13]
A l’image de la vision des anges, la vision des prophètes après leur mort physique n’est pas réfutée par la raison. Au contraire, elle est prouvée par le coran, la sunnah et l’expérience des musulmans depuis des siècles.
Allah a dit, s’adressant au prophète ﷺ:
« Nous avons donné à musa le livre, ne doute point de sa rencontre ![14]
Cette rencontre citée dans ce verset, selon une des deux interprétations acceptées, fait référence à la rencontre physique du prophète ﷺavec sayyiduna Musaﷺ, lors de son mi’raj. Or, ce mi’raj s’est fait par le corps et l’esprit, ce qui implique que le prophèteﷺ a rencontré sayyidana Musaﷺ à l’état d’éveil, après sa mort physique.
Al Samarqandiy a dit:
“Il est dit dans le rapport d’al Kalbiy : « Ne sois pas en doute de ta rencontre avec Musaﷺ la nuit de l’ascension à Jerusalem, c’est-à-dire que le prophèteﷺ a rencontré Musaﷺ à cet endroit »[15]
Ibn Juzay a dit :
«C’est-à-dire, ne doute point de ta rencontre avec Musaﷺ la nuit de d’al isra’ »[16]
Cette interprétation est confirmée par les textes de la Sunnah. Dans le Sahih de l’imam Muslim, Ibn ‘Abbas a dit :
« Le messager d’Allahﷺ a dit : je suis passé, la nuit où on m’a fait voyager, près de Musaﷺ fils de ‘Imran. Il est un homme noir, grand et trapu comme un homme de la tribu de Shabou’ah. J’ai vu ‘Isa ibn Maryamﷺ. Il est de taille moyenne, au teint tirant entre le blanc et le brun, aux cheveux laissés au vent. On m’a montré aussi Malik, le gardien du feu ainsi que le dajjal ». Ceci, parmi les signes qu’Allah lui montra : « ne sois pas en doute sur sa rencontre ».
Qatadah interprétait ce verset comme indiquant que le prophète ﷺ avait rencontré Musa » [17]
Or, le voyage nocturne du prophèteﷺ s’est fait par le corps et l’esprit et non en sommeil, comme en attestent la quasi-unanimité des savants de cette communauté.
Commentant les propos d’an Nasafiy, Sa’d al Taftazaniy a dit :
« [Le mi’raj du messager d’Allahﷺ à l’état d’éveil avec son corps jusqu’au ciel puis jusqu’à la limite qu’Allah a voulu est une vérité] C’est-à-dire qu’il est établi par une information connue de sorte que celui qui le nie est un innovateur (…) Sa parole [à l’état d’éveil] est une réfutation de ceux qui prétendent que le mi’raj s’est fait à l’état de sommeil »[18]
Dans tuhfah al murid, Al Bajuriy a dit :
« La vérité est que [isra’] s’est fait en état d’éveil, par l’esprit et le corps, par consensus des gens du second siècle ainsi que les générations suivantes de la communauté musulmane »[19]
Les récits rapportant l’évènement du isra’ sont donc, à tous points, une preuve incontestable qu’il est possible de voir des prophètes à l’état d’éveil après leur mort physique. Les hadiths rapportés sur ce sujet sont notoires et seul un pervers récalcitrant pourrait les réfuter.
Dans ce qu’a rapporté al Bukhariy dans son Sahih, le prophèteﷺ a dit :
« …le ciel fut ouvert, j’entrai et on y trouva Adamﷺ. Jibril dit : « voici ton père Adamﷺ, salue-le». Je le saluai et il me rendit le salut. Il dit « Bienvenue à un fils pieux et un prophète pieux ». Puis je fus élevé jusqu’au second ciel. On demanda à ce qu’il fut ouvert et on dit : « qui est-ce » ? Il répondit « Jibril ». « Et qui est avec toi ? » Il répondit « Muhammad ». On dit «Il a donc été envoyé ? ». Il dit « oui ». Il fut dit « Bienvenue à lui, quel excellent invité est venu ! ». Le ciel fut ouvert e une fois qu’on fut entré, on trouva Yahyaﷺ et ‘Isaﷺ, les deux cousins. Il me dit : « voici Yahyaﷺ et ‘Isaﷺ, salue les ». Je les saluai et ils me rendirent le salut disant : « Bienvenue au frère pieux et au prophète bienfaisant ».
Puis je fus élevé jusqu’au troisième ciel. On demanda à ce qu’il fut ouvert et on dit : « qui est-ce ? ». Il répondit « Jibril ». « Et qui est avec toi ? » Il répondit « Muhammad ». On dit « Il a donc été envoyé ? ». Il dit « oui ». Il fut dit « Bienvenue à lui, quel excellent invité est venu ! ». Le ciel fut ouvert e une fois qu’on fut entré, on trouva Yusufﷺ. Il me dit : « voici Yusuf ﷺ, salue-le ». Je le saluai et il me rendit le salut disant : « Bienvenue au frère pieux et au prophète bienfaisant »… »
Jusuq’à la fin du hadith où, au quatrième, cinquième, sixième et septième ciel, il rencontra des prophètes morts, à savoir Idrisﷺ, Harunﷺ, Musaﷺ et Ibrahimﷺ. Ce hadith, ainsi que les nombreux rapportés sur ce sujet, indiquant clairement la possibilité pour un vivant de voir les prophètes morts.
Si on dit : cette possibilité n’a été donnée qu’au prophète.
On répond : une telle assertion doit être prouvée. Aucun texte n’est venu limiter cette possibilité aux prophètes et aucune preuve rationnelle ne s’oppose à cette occurrence.
Bien au contraire, tout ce qui est possible pour un prophète l’est autant pour les musulmans pieux, en l’absence de spécification venant de la révélation.
Le Shaykh ‘illish al Malikiy a commenté les propos de l’auteur de ida’ah al dujunah :
« Laa majorité des gens de la sunnah considère que tout ce qui est possible comme miracle pour un prophète est possible comme prodige. Ibn al Subkiy a spécifié la généralité de cette possibilité en s’appuyant sur la position de al Qushayriy dans Man’ al mawani’ »[20]
En effet, Taj as Subkiy ainsi que al Qushayriy réduisent cette possibilité, indiquant que le prodige ne peut atteindre un certain degré, comme par exemple qu’un enfant naisse sans père.
Dans Jam’ al jawami’i, ‘Abdul Wahhab al Subkiy a dit :
« Les prodiges des saints sont vérité. Al Qushayriy a dit : « ces prodiges n’ont pas de limites sauf par exemple qu’un enfant naisse sans père »[21]
Or, même en prenant la position faible défendue par l’imam al Qushayriy, celle-ci ne s’oppose point à ce qu’un homme pieux puisse voir un prophète mort à l’image du messager d’Allahﷺ. En effet, cette position excepte uniquement les faits pour lesquels les prophètes ont défié les gens de leur époque ou ceux des époques à venir, comme le fait de ramener un livre pareil au coran. Amir al mu’minin ibn Hajar al ‘Asqalaniy a dit, prenant fait pour l’avis d’al Qushayriy :
« L’avis le plus connu parmi les gens de la sunnah est l’affirmation des prodiges dans l’absolu. Mais certains parmi les savants vérificateurs comme Abul Qasim al Qushayriy ont excepté à cette généralité les faits pour lesquels certains prophètes ont lancé un défi. Il a dit : « Ils ne peuvent pas arriver à la limite de faire enfanter sans père par exemple ». Cette position est la plus juste. Quant à l’exaucement d’une invocation dans l’instant, la multiplication de la nourriture et de l’eau, le dévoilement de ce caché des yeux, l’information d’événements futurs et ce qui y ressemble, cela est très répandu de sorte que leur occurrence par ceux à qui on attribue la sainteté est devenue habituelle. »[22]
S’il est donc établi que le prophèteﷺ a vu des prophètes morts à l’état d’éveil, seule une preuve textuelle serait à même d’infirmer cette possibilité ainsi que son occurrence pour des hommes pieux. Il est cependant clair qu’un tel texte n’existe pas. De plus, cette vision n’ayant pas le caractère d’un défi lancé aux dénégateurs, même en adoptant l’avis d’al Qushayriy, elle ne peut avoir le caractère d’un don spécifique aux prophètes.
C’est ainsi que la sunnah indique la possibilité, de voir les âmes des prophètes à l’état d’éveil.
Dans le sahih de l’imam al Bukhariy, Abu Hurayrah a rapporté du prophèteﷺ :
« Quiconque me voit en rêve me verra à l’état d’éveil. Le shaytan ne peut prendre mon apparence »[23]
Dans un autre hadith :
« Qui m’a vu a vu vrai, le shaytn ne prend jamais ma forme »
Ibn Batal al Malikiy a dit :
« [il me verra à l’état d’éveil] par cela, il veut confirmer la vision à l’état d’éveil ainsi que son authenticité et son occurrence réelle. Ce qui visé n’est pas qu’il le verra dans l’au- delà car toute sa communauté le verra à l’état d’éveil dans l’au-delà, aussi bien ceux qui l’ont vu en rêve que ceux qui ne l’ont pas vu »[24]
Par cette parole, l’imam ibn Batal, un des premiers commentateurs du Sahih de l’imam al Bukhariy, prouve que la possibilité et l’occurrence de la vision des prophètes à l’état d’éveil après leur mort n’est pas une affabulation créée dernièrement. Au contraire, cet imam mort en 449 de la hijrah montre que cette réalité est connue depuis des siècles par les savants musulmans. Ils n’ont pas cessé, au fil des siècles, d’en déclarer la possibilité. Seuls quelques gens privés cette faveur ont pu, enchaînés par leur aveuglement, leur ignorance et leur éloignement des lumières de la prophétie, prétendre à son impossibilité à des époques récentes.
En effet, l’imam al Ghazâliy, mort en 505 de la hijrah, a dit :
« les subtilités du malakut s’ouvrent à l’état d’éveil pour celui qui montre de la sincérité dans son combat intérieur et son éducation spirituelle et se débarrasse de l’emprise des passions, de la colère, des mauvais comportements et des actions vénielles. Si la personne s’asseoit dans un endroit vide et s’affranchit des voies d’accès aux sens, son œil ainsi que son audition intérieurs s’ouvrent. Son cœur devient dès lors relié au monde du Malakut. Il dira en permanence « Allah, Allah, Allah » par son cœur au lieu de sa langue. Et cela, jusqu’à ce qu’il ne se rende plus compte de lui-même ou du monde. Il sera de telle sorte qu’il ne verra rien d’autre qu’Allah, exalté soit-Il. Ces subtilités s’ouvrent et il voit à l’état d’éveil ce qu’il pourrait voir en sommeil. Il lui apparaît alors les âmes des anges et des prophètes ainsi que des images belles, adorables, majestueuses. »
Dans bahjah al nufus, l’imam ibn Abi Jamrah al Malikiy a dit, au commentaire du hadith cité :
« Le sens apparent du hadith montre indique deux règles. La première est que quiconque le voit en rêve le verra à l’état d’éveil. La seconde est l’information que le shaytan ne peut prendre son apparence. Il y a plusieurs questions. L’une d’elles est de savoir si ces informations sont valables dans l’absolu, aussi bien dans sa vie qu’après sa mort ou uniquement pendant sa vie terrestre…. Nous disons : l’énonciation est générale. Quiconque veut la limiter sans en ramener la preuve le fait arbitrairement. Certaines ont refusé de croire en cette généralité et ont dit, selon leur raisonnement limité, comment un vivant peut-il voir un mort ?
Il faut mettre en garde contre un tel raisonnement car il comporte deux éléments dangereux. Le premier est de refuser la parole générale de celui qui ne s’exprime point par passion. Le second est l’ignorance de la Puissance d’Allah et le fait de lui attribuer l’impotence. On dirait qu’une telle personne n’a pas entendu l’histoire de la vache dans la sourate du même nom « Nous dîmes, frappez-le par une de ses parties. C’est ainsi qu’Allah fait revivre les morts » (…) il est en effet capable de faire de la vision en rêve une cause pour le voir à l’état d’éveil. Il a été rapporté de certains compagnons, et je pense qu’il s’agit de Ibn ‘Abbas, qu’il vit le prophèteﷺ dans son rêve. Il se mit à penser à ce hadith. Une des épouses du prophète ﷺentra près de lui, et je pense qu’il s’agit de Maymunah. Il lui raconta sa vision. Elle se leva et lui rapporta un habit et un miroir et lui dit « voici un habit et voici un miroir ». Il dit alors : « j’ai regardé dans le miroir et je vis l’image du prophèteﷺ à la place de ma propre image. » Il est rapporté des salaf et des khalaf, à une quantité innombrable, qu’ils avaient vu le prophèteﷺ en sommeil. Comme ils prenaient ce hadith dans son sens apparent, ils le virent après cela à l’état d’éveil. Ils lui posaient des questions sur des choses dont ils avaient l’appréhension et il leur répondait en les rassurant. Ou bien, il leur indiquait la solution dans laquelle se trouvait la bonne issue et les choses se passaient comme décrit.
Celui qui nie cette possibilité ne peut pas échapper à une de deux qualifications : soit il nie les prodiges des awliya, soit il les affirme. S’il est de ceux qui nient les prodiges des awliya’, il n’y a pas à aller plus loin avec lui. En effet, il nie ce qui est établi par la sunnah avec des preuves claires. Nous avons évoqué cela au début de ce livre et nous avons évoqué ce qui est sur cela suffisant. S’il affirme les prodiges des saints, qu’il sache que cette vision à l’état d’éveil reste du même ordre. Il est dévoilé aux awliya’ beaucoup de choses, par la rupture de l’ordre des choses, qui relèvent des mondes supérieurs et inférieurs. On ne peut nier cette vision alors qu’on affirme de l’autre côté les autres prodiges. »[25]
Son élève al ‘Abdariy indique une chose pareille dans al madkhal :
« Certains parmi eux (les soufis) prétendent à la vision du prophète ﷺà l’état d’éveil. C’est une faveur rare et il y a peu de gens à qui cela est arrivé. Ceux-là avaient des qualités qu’il est difficile de trouver à notre époque. Je dirais même que cela est devenu presque inexistant sachant que je ne réfute pas que cela arrive aux grands dont Allah a préservé les membres et les cœurs »[26]
L’imam Abu ‘Abdillah al Qurtubiy, le mufassir, a dit dans tadhkirah ahwal al mawta :
« La mort des prophètes n’est qu’un retour vers un endroit d’où nous ne pouvons pas les atteindre, même s’ils y sont vivants, à l’image des anges. Ils sont donc présents et vivants. Nul ne les voit parmi nous sauf ceux à qui Allah a accordé un prodige en ce sens parmi ses awliya »[27]
Le Hafiz ibn Hajar al ‘Asqalaniy a abondé dans ce sens dans son commentaire du sahih d’al Bukhariy. Donnant la définition du sahabiy, il dit en effet :
« Celui qui l’a vu (le prophète ﷺ) après sa mort mais avant son inhumation, l’avis correct est qu’il n’est pas sahabiy. Sinon, on compterait comme sahabah ceux qui ont vu son noble corps dans sa tombe sanctifiée, même à notre époque. De même, celui à qui il apparaît parmi les awliya’ et qu’il le voit à titre de prodige n’est pas compté comme sahabiy… Ce qui est visé par cette vision, sur les points qu’on a évoqués plus haut et sur lesquels il y a unanimité, concerne la vision à l’état d’éveil »[28]
Le hafiz, par cette parole, répond au problème qu’il pose lui-même sur la question de la vision à l’état d’éveil. En effet, après avoir rapporté la position de ibn Abi Jamrah sur la possibilité de voir le prophèteﷺ après sa mort, il indique :
« Cette position est assez problématique. Pris dans son sens apparent, cela impliquerait que ceux qui l’ont vu soient des sahaba et que la possibilité d’être un sahabi s’étende jusqu’au jour du jugement »[29]
Al hafiz répond lui-même à cette problématique, montrant ainsi que cette vision est possible et peut se faire par dévoilement.
Dans tanwir al halak, l’imam al Suyutiy a dit:
« Tout un groupe des imams de la shari’ah a énoncé que fait partie des prodiges des saints le fait de voir le prophète ﷺ et de le rencontrer à l’état d’éveil et de prendre de lui des sciences et des dons. Parmi ceux qui ont écrit cela, des savants shafi’is mais aussi des imams parmi les malikites comme al Qurtubiy, Ibn Abi Jamrah et Ibn al Hajj dans al madkhal »[30]
En outre, l’imam al Suyutiy a rédigé un ouvrage complet sur la question, évoquant les preuves textuelles et expérimentales montrant l’occurrence d’une telle vision. Il a nommé ce livre « tanwir al halak fi imkan ru’yah al ambiya wal malak »
Dans son commentaire sur son poème jawharah at tawhid, l’imam al Laqqaniy a dit :
« Ibn Abi jamrah, al Maziriy ainsi qu’al Yafi’iy et bien d’autres ont dit que beaucoup de pieux avaient vu le prophète ﷺ à l’état d’éveil »[31]
L’auteur a ensuite longuement développé ce fait et réfuté les arguments des dénégateurs.
Ibn Hajar al makkiy a été interrogé quant à lui :
« Est-il possible de rencontrer le prophète ﷺ à l’état d’éveil ? »
Il répondit :
« Certes, oui. Cela est possible. Al Ghazâliy, Taj al Subkiy, al ‘Afif al Yafi’iy parmi les shafi’ites, al Qurtubiy, Ibn Abi Jamrah parmi les malikites ont été clairs pour dire qu’il s’agit d’un des prodiges des awliya’. »[32]
Abul fayd al Munawiy a dit de son côté :
« Les connaissants le voient dans le monde réel, à l’état d’éveil de sorte que le shaykh Abul ‘Abbas al Mursiy a dit : « Si le messager d’Allah ﷺ m’était voilé le temps d’un clin d’œil, je ne me compterais plus parmi les fuqara ». Et dans une autre version : « je ne me compterais plus parmi les musulmans ». Un parmi les awliya reprenait toutes les prières qu’il avait faites et dans lesquelles il ne l’avait pas vu ﷺdirectement, même par inadvertance. Il disait : « Celui qui ne le ﷺ voit pas dans sa prière et ne lui serre pas la main dedans, est un homme défaillant car il dispense ses flux à l’ensemble de ceux qui agissent selon sa shari’ah pour atteindre les degrés de la perfection ». Cette station, même si elle est difficile pour le commun des gens et que peu y prétendent, Allah la rend facile pour ceux qui sont destinés àl’atteindre de sorte qu’elle devient parmi les choses les plus simples»[33]
Le hafiz ‘Ali Ibn Sultan al Qariy a dit :
« Nous avons expliqué que sa vision à l’état d’éveil n’implique pas qu’il sorte de sa tombe car il s’agit d’un prodige des awliya’. Comme déjà dit, Allah leur enlève les voiles. Ni la raison, ni la législation et encore moins l’empirisme n’interdisent qu’un waliy étant au plus loin de l’orient ou de l’occident soit honoré par Allah et qu’il ne mette entre lui et son essence noble aucun obstacle ni voile alors qu’il est dans sa tombe »[34]
Dans al fawakih al dawaniy, al Nafrawiy a dit à la fin de l’ouvrage :
« Il est possible de voir le prophète ﷺ à l’état d’éveil et en sommeil par unanimité des hufaz. Ils ont juste divergé pour savoir si ce qui est vu à ce moment est son essence pure ou une projection de sa personne. La première position est cela d’un groupe alors que l’autre est défendue par al Ghazaliy, al Qarafiy, al Yafi’iy et d’autres. Les premiers ont indiqué qu’il était la lampe de la guidée et la lumière de la direction, le soleil des connaissances. A ce titre, il est vu comme peut être vu une lampe, une lumière ou le soleil, de loin. »
Dans ses fatawa, le mujtahid du madhhab de Malik, le shaykh ‘Illish al kabir a dit :
« J’ai entendu sidi ‘Ali al Khawwas dire : « Il n’est pas correct qu’une parole dite par les imams mujathid sorte de la Shari’ah selon les gens du dévoilement. Comment donc cela serait possible qu’ils sortent de la shari’ah alors qu’ils tirent leurs paroles du coran et de la sunnah, des paroles des sahabah et que du fait qu’un d’entre eux puisse rencontre l’âme du messager d’Allah ﷺ ? Et qu’il puisse l’interroger sur toute chose sur lesquelles les savants ne se sont pas prononcés, faute de preuve en lui disant : « Ceci est-elle ta parole O messager d’Allah ﷺ ? ». Cette chose se fait à l’état d’éveil. De même, ils l’interrogent sur toute chose concernant le coran et la sunnah avant de l’inscrire dans leurs livres en disant : « O messager d’Allah ﷺ, nous avons compris ceci de tel verset, nous avons compris ceci de tel de tes paroles, acceptes-tu tel hadith ou non ? ». Je dis (Shaykh ‘Illish): Ils n’agissent donc que selon l’implication de sa parole ainsi que sa propre indication ﷺ. Celui qui s’étonne sur ce qu’on a évoqué sur le dévoilement des imams et de leur rencontre avec le messager d’Allah ﷺ en tant qu’âme, nous lui disons : « tout ceci fait partie des prodiges des awliya’ »[35]
Il a parlé ainsi, attestant de la possibilité pour les pieux de voir le prophète ﷺ à l’état d’éveil, de l’interroger et a compté cela parmi les prodiges possibles accordés aux awliya.
Al Alusiy a dit dans ruh al ma’niy :
« Il est possible que cette rencontre (de sayyidina ‘Isa ﷺ après son retour sur terre) avec le prophète ﷺ soit avec leurs âmes. Il n’y a rien d’extraordinaire dans cela alors qu’il est arrivé que de nombreuses personnes accomplies de cette communauté l’aient vu à l’état d’éveil après sa mort et qu’ils aient appris de lui »[36]
Si on dit : comment est-il possible de voir les prophètes alors qu’ils sont enterrés dans leur tombe ?
En premier, la vision à l’état d’éveil ne se fait pas par le corps de celui qui est vu mais uniquement par son esprit. C’est effectivement l’avis de la majorité des savants qui se sont exprimés sur cette question. A partir de là, il n’a pas lien avec le fait que leurs nobles corps soient enterrés dans un lieu précis alors que c’est leurs âmes qui se déplacent.
En effet, la vie des prophètes dans le barzakh et leur possibilité de se déplacer et d’être vus en plusieurs endroits est affirmée par la sunnah. la mort physique libère les âmes des pieux et des prophètes qui ne sont plus astreints à la prison du corps.
Dans al Ruh, Ibn al Qayyim a dit :
« L’âme libre de la prison du corps, de ses liens, de ses contraintes par rapport aux interactions, à la force, à la finesse, à l’ardeur, à la vitesse ainsi qu’au rapprochement d’Allah et au fait de se lier à lui, cette âme libre possède des qualités que n’a pas l’âme édulcorée et emprisonnée dans les liens du corps et ses contraintes. Que dire donc quand l’âme n’est plus prisonnière du corps, qu’elle s’en sépare et qu’elle revient à la source première. Je veux dire par source première qu’elle soit une âme élevée, purifiée, grande et ayant une haute aspiration. Elle prend une dimension toute autre après sa séparation avec le corps et agit tout autrement. Il est rapporté par tawatur les visions qu’ont eu de nombreux humains sur des âmes qui, après leur mort, agissaient d’une façon impossible à réaliser quand elles étaient liées au corps. Il est arrivé que ces âmes vainquent des armées nombreuses à une ou deux ou en nombre très petit »[37]
Or, les âmes des prophètes sont vivantes dans leurs tombes où elles prient. Dans le hadith rapporté par Ibn Mas’ud, le prophète ﷺ a dit :
« Ma vie est une bonne chose pour vous, des annonces vous sont faites et vous sont rapportées. Ma mort est bonne pour vous, vos actions me sont présentées. Si je vois du bien, je loue Allah. Si je vois du mal, je demande pardon à Allah pour vous. »[38]
Cette vie dans le barzakh n’empêche en rien qu’ils puissent se déplacer d’un endroit à l’autre. Le prouve le hadith qu’a rapporté Muslim dans son sahih :
Le prophète ﷺ a dit « J’ai vu Musa ﷺ la nuit de isra’ près d’un monticule rouge. Il était debout et priait dans sa tombe ».[39]
Or, dans cette même nuit, le prophète ﷺ indique qu’il a rencontré Musa ﷺ au sixième ciel. Il indique aussi qu’il pria devant lui à al Quds. De cela, il est clair que les âmes des prophètes ne sont pas limités par les distances mais peuvent les parcourir alors que leurs corps reposent dans leur tombe.
Ahmed ibn ‘Abdil Halim al Harraniy a dit:
“ il est connu que de nombreux corps ne sont pas mangés par la terre, comme les corps des prophètes et des véridiques ou des martyrs de Uhud ou d’autres batailles. Les récits sur cela ont atteint le tawatur. Mais ce qui est visé dans ce qu’a dit le prophète concernant l’assise du mort dans sa tombe doit être interprété comme le fait que ce sont leurs âmes qui sont assis, alors qu’en apparence, leurs corps restent couchés. Ce qui conforte cela est l’information du prophète qu’il a vu, la nuit du mi’raj, certains prophètes dans les cieux. Il a vu Adam ﷺ, ‘isa ﷺ, Yahya ﷺ, Yusuf ﷺ, Idris ﷺ, Harun ﷺ, Musa ﷺ et Ibrahim ﷺ. Il a informé de même qu’il avait vu Musa ﷺ debout, priant dans sa tombe alors qu’il l’avait vu dans les cieux. Il est connu que les corps des prophètes sont dans leurs tombes, sauf ‘Isa ﷺ et Idris ﷺ. Si Musa ﷺ a été vu en train de prier dans sa tombe et qu’il fut vu au sixième ciel, peu de temps après, cela indique que ce fait ne s’applique pas à un corps. »[40]
Si l’on rétorque : comment peut-on être sûr que la personne vue est bien le prophète ﷺ et non jinn ayant pris son apparence ?
On répond : c’est la révélation qui nous informe qu’un tel cas de figure est impossible. En effet, dans le hadith déjà cité, le prophète ﷺ a dit :
« Celui qui m’a vu a vu vrai. Le shaytan ne peut prendre mon apparence ».
Il s’agit d’une indication claire que le shaytan, en tous cas et quel que soit le mode de vision, ne peut se présenter sous l’apparence du prophète ﷺ. Il ne peut non plus se présenter sous l’apparence d’un autre prophète.
Dans Mirqat al mafatih, Mula al qariy a dit :
« [Le shaytan ne peut prendre mon apparence] dans le commentaire de An Nawawiy sur Muslim, le Qadiy ‘Iyad a dit :« Allah a privilégié le prophète ﷺ de sorte que sa vision par une personne est toujours vraie. Il a interdit au shaytan de se présenter selon son apparence de sorte qu’il ne mente pas par sa langue en rêve ». De même qu’Allah a pourvu les prophètes de miracles, il a rendu impossible au shaytan de prendre leur forme, même à l’état d’éveil. Si cela arrivait, le vrai serait mélangé au faux.»[41]
Cette réponse pose cependant un autre problème. Le hadith implique-t-il que le shaytan ne puisse prendre que son apparence réelle ? ou bien, qu’il est impossible qu’il usurpe son identité dans l’absolu ? Comment donc celui qui ne l’a jamais vu pourrait-il le reconnaître ? S’il est vu avec une description autre que celle connue, est-ce que cette vision rejoint le hadith cité ?
Toutes ces questions font l’objet d’une divergence parmi les savants depuis l’époque des salaf.
Al Bukhariy a rapporté de Ibn Sirin: « si quelqu’un lui rapportait avoir vu le prophète ﷺ, il lui demandait :« Décris le moi ». S’il le décrivait selon des caractères qu’il ne connaissait pas, il disait : « tu ne l’as pas vu ».
Dans ce sens, le Qadiy ‘Iyad ibn Musa a dit : « Le hadith doit être compris comme s’appliquant à celui qui le voit selon la description qu’il avait dans sa vie et non selon une description différente de celle-ci. S’il voit quelqu’un avec une description différente, cette vision ne sera qu’une allusion et pas une réalité. »
Cette parole indique que s’il le voit sans un caractère avec lequel il est connu, comme la barbe, il ne l’aura pas vu réellement. Il aura juste vu une allusion à cette réalité.
Cependant, cet avis a été rejeté par nombre de savants qui ont considéré que la vision du prophète ﷺ est réelle, quelle que soit la forme et l’apparence dans laquelle il se montre au musulman.
An Nawawiy a dit, en effet, commentant les paroles du Qadi ‘Iyad précédemment citées :
« Ce qu’il a dit est peu consistant. L’avis correct est que c’est celui qui est vu, que ce soit selon ses caractères connus ou non, comme l’a dit al Maziriy. »
Al Qushayriy a dit, ce dont le sens est :
« Sa vision selon des caractères différents n’implique que ce ne soit pas lui réellement. Si une personne voit Allah selon une description dont Il est exempt et que la personne est certaine qu’Allah ne peut être décrit ainsi, cela n’enlèverait rien au fait qu’il L’ait vu réellement. Plutôt, cette vision doit être interprétée »
Le hafiz ibn Hajar a concilié les deux positions, considérant que les premiers ne nient pas que c’est lui qui ait été vu mais que cette vision demande seulement une interprétation des experts de la science des rêves.
Dans fath al bariy :
« Ce qui me semble correct est de concilier les deux positions. C’est-à-dire, si on le voit selon ses caractères ou la plupart de ses caractères connus, il l’a certes vu en vrai, même si ses autres caractères sont divergents. Celui qui le voit selon son apparence entière, sa vision est réelle et il n’y a point besoin d’interprétation. C’est ce qui est visé par le hadith [Il m’a certes vu]. Et cela, malgré que dans cette apparence complète, il peut y avoir des caractères manquants. L’interprétation de ce hadith inclut ce cas de figure. De sorte, il est possible de dire dans l’absolu que quiconque le voit, dans n’importe quel cas de figure, l’aura vu en réalité. »
Et donc, la différence de caractères par rapport à ce qui est connu de lui doit être attribué à celui qui le voit, car l’image dans laquelle il l’aura vu renvoie à son état intérieur.
Al Laqqaniy a dit en ce sens :
« Quiconque le voit à son état réel et sa description connue, cela indique sa piété et le fait qu’il aura le dessus sur ses ennemis… celui qui le voit avec un caractère différent ou un défaut sur son corps, cela démontre des failles dans sa religion. En effet, il est le miroir de tout ce à quoi il fait face même si son essence est à sa meilleure station et à sa perfection »[42]
Il t’apparaît donc que les savants, sur des générations et des siècles, n’ont jamais remis en cause la possibilité et l’occurrence de la vision des prophètes à l’état d’éveil. Bien au contraire, nous ne connaissons que le nom d’un seul savant ayant réfuté cette vision et il s’agit du savant yéménite Hussayn al Ahdal (mort en 855). Or, la possibilité légale et rationnelle de cette vision est confirmée par son occurrence empirique. De nombreux savants et pieux, dont il est impossible de remettre en cause les propos, en attestent directement.
Dans Khilasatul athar, l’imam al Muhibbiy a dit, à la biographie du shaykh Ibrahim al Laqqaniy :
« Shihah al Bashishiy a dit : « parmi les prodiges dont les gens ont attesté de lui (c’est-à-dire al Laqqaniy), le fait que le savantissime, le shaykh al Hijaziy se tint debout un jour durant son cours. Al Laqqaniy lui dit : « Tu pars ou tu restes ? » Il répondit : « je resterai un petit moment ». Il dit après cela : « Je jure par Allah, O Ibrahim, je suis resté à ton cours uniquement parce que j’ai vu le messager d’Allah ﷺ debout écoutant ton cours »[43]
Dans al mizan al kubra, al Sha’raniy a dit de son shaykh as Suyutiy :
« J’ai vu de la main de Jalal ad din al Suyutiy un écrit qui était avec un de ses compagnons, le shaykh ‘Abd al Shadhiliy. Il l’avait envoyé à une personne qui lui demandait d’intercéder en sa faveur auprès du sultan Qaitbay. Il y était écrit : « Sache, mon frère, que j’ai rencontré le messager d’Allah ﷺ, jusqu’à maintenant, soixante-quinze fois, à l’état d’éveil et avec les yeux de la tête. Si je n’avais pas peur d’être voilé de lui par le fait d’entrer auprès des gouverneurs pour obtenir des miettes, j’aurais intercédé pour toi auprès du sultan. Mais je suis un homme, serviteur des hadiths du prophète ﷺ et j’ai besoin de lui pour authentifier les hadiths que les experts de cette science ont rendus faibles selon leur méthode. Je ne doute point que ce bénéfice soit plus grand que ton bénéfice, mon frère »[44]
Dans al mawwahib al laduniyyah, al Qastalaniy a dit :
« J’ai vu dans le livre minah al ilahiyah fi manaqib al sadat al wafa’iyah à propos de sidi ‘Ali Ibn Sidi Muhammad al Wafa qu’il a dit : « quand j’étais un garçon de cinq ans, j’apprenais le coran auprès d’un homme s’appelant shaykh Ya’qub. Je vins un jour et je vis un homme qui récitait devant lui la sourate ad duha. Il avait un compagnon qui inclinait sa tête. Ce compagnon riait d’étonnement. Je vis alors le prophète ﷺ à l’état d’éveil et non en sommeil et il portait un habit blanc en coton. Je vis ensuite sur moi un habit blanc et il me dit : « Lis ». Je lus alors la sourate al duha et al sharh. Il disparut ensuite. Quand j’atteignis l’âge de vingt et un ans, je commençai la prière à Qarafah pour la prière de subh et je vis le prophète ﷺ devant moi. Il me fit une accolade et me dit : « quant au bienfait de ton seigneur, proclame-le ». Il me fut donné dès lors son éloquence. ».
Al Qastallaniy rajoute à cela ; « Il est clair que cette vision était aussi à l’état d’éveil »[45]
L’imam des malikites de son temps, le shaykh ‘Ali al Ajhuriy a dit dans al nur al wahhaj :
« Il nous est parvenu du shaykh Abul Hassan al Shadhiliy et de son disciple Abul ‘Abbas al Mursiy et d’autres qu’eux qu’ils disaient : « Si la vision du prophète ﷺ m’était impossible un seul instant, je ne me compterais pas parmi les musulmans. »
Il a dit de même :
« Confirme cette histoire du shaykh jalal ad din al Suyutiy (à savoir qu’il voyait le prophète ﷺ à l’état d’éveil), ce qui est célèbre de sidi Muhammad ibn Zayn, le poète du messager d’Allah ﷺ. Il le voyait à l’état d’éveil et les yeux ouverts. Quand il fit le hajj, il lui parla de l’intérieur de sa tombe. Il ne cessa d’être à cette station jusqu’à ce qu’un homme lui demanda d’intercéder pour lui auprès du gouverneur du pays. Quand le gouverneur le fit entrer et asseoir sur le tapis, sa vision du prophète ﷺ s’estompa. Il ne cessa de demander de le voir pendant longtemps jusqu’à ce qu’il le vit un jour , mais de loin. Il lui dit : « Tu veux me voir alors que tu t’asseois sur le tapis des injustes ? tu ne peux avoir accès à cela » il ne fut pas rapporté après cela qu’il le vit jusqu’à sa mort.[46]
[1] Sourate Hud, versets 69, 70
[2] Sourate al ‘ankabut, v 33
[3] Sourate Maryam, v 17, 18 et 19
[4] Sourate Hud, v 71, 72 et 73.
[5] Sourate Hijr, v 67, 68, 69 et 70
[6] Rapporté par Muslim, livre de la foi, chapitre de l’islam, de la foi et de l’ihsan
عن عمر بن الخطاب رضي الله عنه قال : بينما نحن جلوس عند رسول الله صلى الله عليه وسلم ذات يوم ، إذ طلع علينا رجل شديد بياض الثياب ، شديد سواد الشعر ، لا يرى عليه أثر السفر ، ولا يعرفه منا أحد ، حتى جلس إلى النبي صلى الله عليه وسلم فأسند ركبته إلى ركبتيه ، ووضع كفيه على فخذيه ، وقال : " يا محمد أخبرني عن الإسلام " ، فقال له : ( الإسلام أن تشهد أن لا إله إلا الله وأن محمدا رسول الله ، وتقيم الصلاة وتؤتي الزكاة ، وتصوم رمضان ، وتحج البيت إن استطعت إليه سبيلا ) ، قال : " صدقت " ، فعجبنا له يسأله ويصدقه ، قال : " أخبرني عن الإيمان " قال : ( أن تؤمن بالله وملائكته وكتبه ورسله واليوم الآخر ، وتؤمن بالقدر خيره وشره ) ، قال : " صدقت " ، قال : " فأخبرني عن الإحسان " ، قال : ( أن تعبد الله كأنك تراه ، فإن لم تكن تراه فإنه يراك ) ، قال : " فأخبرني عن الساعة " ، قال : ( ما المسؤول بأعلم من السائل ) ، قال : " فأخبرني عن أماراتها " ، قال : ( أن تلد الأمة ربتها ، وأن ترى الحفاة العراة العالة رعاء الشاء ، يتطاولون في البنيان ) ثم انطلق فلبث مليا ، ثم قال : ( يا عمر ، أتدري من السائل ؟ ) ، قلت : "الله ورسوله أعلم " ، قال : ( فإنه جبريل أتاكم يعلمكم دينكم
[7] Sahih Muslim, livre du repentir, chapitre de la persistance au repentir
أَبِي عُثْمَانَ النَّهْدِيِّ ، عَنْ حَنْظَلَةَ ، قَالَ : كُنَّا عِنْدَ رَسُولِ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ ، فَوَعَظَنَا ، فَذَكَّرَ النَّارَ ، قَالَ : ثُمَّ جِئْتُ إِلَى الْبَيْتِ فَضَاحَكْتُ الصِّبْيَانَ وَلَاعَبْتُ الْمَرْأَةَ ، قَالَ : فَخَرَجْتُ فَلَقِيتُ أَبَا بَكْرٍ فَذَكَرْتُ ذَلِكَ لَهُ ، فَقَالَ : وَأَنَا قَدْ فَعَلْتُ مِثْلَ مَا تَذْكُرُ ، فَلَقِينَا رَسُولَ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ ، فَقُلْتُ : يَا رَسُولَ اللَّهِ نَافَقَ حَنْظَلَةُ فَقَالَ : مَهْ فَحَدَّثْتُهُ بِالْحَدِيثِ ، فَقَالَ أَبُو بَكْرٍ : وَأَنَا قَدْ فَعَلْتُ مِثْلَ مَا فَعَلَ ، فَقَالَ : يَا حَنْظَلَةُ سَاعَةً وَسَاعَةً ، وَلَوْ كَانَتْ تَكُونُ قُلُوبُكُمْ كَمَا تَكُونُ عِنْدَ الذِّكْرِ ، لَصَافَحَتْكُمُ الْمَلَائِكَةُ ، حَتَّى تُسَلِّمَ عَلَيْكُمْ فِي الطُّرُقِ
[8] Qut al mughtadhiy ‘ala jami’ al Tirmidhiy, volume 3, page 165, Editions Dar al kutub al ‘ilimiyyah (DKI)
[9] Sahih Muslim, livre des mérites des sahaba, chapitre sur les mérites de Umm Salamah
معتمر بن سليمان قال سمعت أبي حدثنا أبو عثمان عن سلمان قال لا تكونن إن استطعت أول من يدخل السوق ولا آخر من يخرج منها فإنها معركة الشيطان وبها ينصب رايته قال وأنبئت أن جبريل عليه السلام أتى نبي الله صلى الله عليه وسلم وعنده أم سلمة قال فجعل يتحدث ثم قام فقال نبي الله صلى الله عليه وسلم لأم سلمة من هذا أو كما قال قالت هذا دحية قال فقالت أم سلمة ايم الله ما حسبته إلا إياه حتى سمعت خطبة نبي الله صلى الله عليه وسلم يخبر خبرنا أو كما
[10] Al Minhaj bi sharh Sahih Muslim, volume 16, page 8, Editions DKI
[11] Musnad Ahmed, livre des mérites des compagnons, les mérites de ‘Aishah, n. ° 1583
حَدَّثَنَـا أَبُو أَحْمَدَ هَارُونُ بْنُ يُوسُفَ قَالَ : حَدَّثَنَـا مُحَمَّدُ بْنُ أَبِي عُمَرَ الْعَدَنِيُّ قَالَ : حَدَّثَنَا سُفْيَانُ , عَنْ مُجَالِدٍ , عَنِ الشَّعْبِيِّ , عَنْ أَبِي سَلَمَةَ بْنِ عَبْدِ الرَّحْمَنِ قَالَ : سَمِعْتُ عَائِشَةَ رَضِيَ اللَّهُ عَنْهَا تَقُولُ : رَأَيْتُ رَسُولَ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ وَاضِعًا يَدَهُ عَلَى مَعْرِفَةِ فَرَسٍ قَائِمًا يُكَلِّمُ دِحْيَةَ الْكَلْبِيَّ قَالَتْ : فَقُلْتُ : يَا رَسُولَ اللَّهِ رَأَيْتُكَ وَاضِعًا يَدَكَ عَلَى مَعْرِفَةِ فَرَسٍ قَائِمًا تُكَلِّمُ دِحْيَةَ الْكَلْبِيَّ قَالَ : وَقَدْ رَأَيْتِيهِ ؟ قُلْتُ : نَعَمْ قَالَ : فَذَلِكَ جِبْرِيلُ عَلَيْهِ السَّلَامُ , وَهُوَ يُقْرِئُكِ السَّلَامَ , فَقُلْتُ : وَعَلَيْهِ السَّلَامُ وَرَحْمَةُ اللَّهِ وَبَرَكَاتُهُ , جَزَاهُ اللَّهُ خَيْرًا مِنْ صَاحِبٍ وَدَخِيلٍ , فَنِعْمَ الصَّاحِبُ وَنِعْمَ الدَّخِيلُ
[12] Musnad Ahmed, livre des mérites des compagnons, les mérites de harithat ibn Nu’man, n° 1462
1462 حَدَّثَنَا عَبْدُ اللَّهِ قَالَ : حَدَّثَنِي أَبِي ، قثنا عَبْدُ الرَّزَّاقِ قَالَ : أنا مَعْمَرٌ ، عَنِ الزُّهْرِيِّ قَالَ : أَخْبَرَنِي عَبْدُ اللَّهِ بْنُ عَامِرِ بْنِ رَبِيعَةَ ، عَنْ حَارِثَةَ بْنِ النُّعْمَانِ قَالَ : مَرَرْتُ عَلَى رَسُولِ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ وَمَعَهُ جِبْرِيلُ عَلَيْهِ السَّلَامُ جَالِسٌ فِي الْمَقَاعِدِ ، فَسَلَّمْتُ عَلَيْهِ ، ثُمَّ أَجَزْتُ فَلَمَّا رَجَعْتُ ، وَانْصَرَفَ النَّبِيُّ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ قَالَ لِي : هَلْ رَأَيْتَ الَّذِي كَانَ مَعِي ؟ قُلْتُ : نَعَمْ ، قَالَ : فَإِنَّهُ جِبْرِيلُ قَدْ رَدَّ عَلَيْكَ السَّلَامَ .
[13] Al Haba’ik fi akhbar al mala’ik, page 271, Editions DKI
[14] Sourate al sajdah, verset 13
[15] Bahr al ‘ulum, volume 3, page 33, Editions DKI
[16] Tashil li ‘ulum al tanzil, volume 2, page 180, editions DKI
[17] Sahih Muslim, livre de la foi, chapitre du voyage nocturne
[18] Sharh ‘aqa’id al nasafiyah page 132, Editions ihya’ al turath al ‘arabiyah
[19] Tuhfah al murid, page 229, éditions al Quds
[20] Futuhat al ilahiyyah al wahhabiyah, sharh ida’ah al dujunah, page 327, Editions DKI
[21] Jam’ al jawami’, page 389, Editions Dar ibn Hazm
[22] Fath al bariy, sharh sahih al Bukhariy, volume 7, page 443, Editions DKI
[23] Sahih al Bukhariy, livre de la vision,
من رآني في المنام فسيراني في اليقظة ولا يتمثل الشيطان بي
[24] Fath al bariy, volume 123, page 401, Editions DKI
[25] Bahjah al nufus, sharh Mukhtasar Sahih al Bukhariy, volume 4, pages 237 et 238, Editions dar al jil
[26] Al Madkhal, volume 2, page 152, Editions DKI
[27] Al tadhkirah fi ahwal al mawta wa umur al akhirah, page 127 al qamar
[28] Fath al bariy, volume 8, page 4, editions DKI
[29] Fath al bariy, volume 13, page 329, éditions DKI
[30] Al Hawiy lil fatawiy, volume 2, page 154, éditions DKI
[31] ‘Umdah al murid, sharh jawhrah al tawhid, volume 4, page 2263
[32] Fatawa al hadithiyah, page 511, Editions DKI
[33] Fayd al qadir fi sharh jami’ al saghir, volume 4, page 358, editions DKI
[34] Jam’ al wasa’il fi sharh al shama’il, chapitre de la vision du prophète ﷺ
[35] Fath al ‘Aliy al Malik, pages 92-93
[36] Ruh al ma’aniy fi tafsir qur’an al ‘azim wal sab’ al mathaniy, volume 22, page 35
[37] Al ruh, page 117, Editions DKI
[38] Rapporté par al Bazzar. Al haythamiy a dit : « ses hommes sont tous des rapporteurs dans les deux Sahih »
حياتي خير لكم تحدثون ويحدث لكم ، ووفاتي خير لكم تعرض على أعمالكم ، فما رأيت من خير حمدت الله عليه ، وما رأيت من شر استغفرت لكم
[39] Sahih Muslim, chapitre portant sur le hadith « je suis passé près de Musa… »
النبي صلى الله عليه وسلم قال: مررت - عَلَى مُوسَى لَيْلَةَ أُسْرِيَ بِي عِنْدَ الْكَثِيبِ الْأَحْمَرِ وَهُوَ قَائِمٌ يُصَلِّي فِي قَبْرِهِ
[40] Mujmu’ al fatawa ibn Taymiyya, volume 5, page 527, Editions DKI
[41] Mirqat al mafatih, sharh mishkat al masabig, volume 8, page 328, Editions DKI
[42] ‘Umdat al murid, sharh jawharah al tawhid, volume 4, page 2262, éditions DKI
[43] Khilasatul athar fi a’yan al qarn al hadiy ‘shar, volume 1, page 16, Editions DKI
[44] Mizan al kubra,volume 1, page 55, Editions DKI
[45] Al mawwahibb al laduniyyah, volume 2, page 373, editions maktabah al tawfiqiyah
[46] Al nur al wahhaf fil kalam ‘ala al isra’ wal mi’raj, page 336 et 337, editions DKI
Après avoir établi la première obligation du mukallaf, à savoir connaître les attributs d’Allah et leurs preuves, le chaykh aborde la seconde obligation qui est la connaissance de ses prophètes et de leurs attributs.
Il dit :
Est obligatoire aux nobles messagers la véridicité… la préservation et leur transmission est requise
Le chaykh aborde dans ce vers les caractères obligatoires aux messagers.
L’[obligatoire] au sens des messagers d’Allah diffère cependant de l’obligatoire concernant les attributs d’Allah. En effet, les attributs obligatoires d’Allah découlent de la raison uniquement, ou pour certains, de la raison et du texte. Ce sont donc des attributs essentiels et nécessaires rationnellement.
Mais l’obligatoire au sujet des messagers et prophètes découle plutôt de la révélation et de la législation. Il s’agit, dans leur cas, de ce que la législation n’accepte guère et cette acceptation relève d’une preuve légale et non premièrement de la raison.
Contrairement à la position des mu’tazilah et des philosophes, l’envoi des prophètes et messagers relève non pas d’une obligation, mais d’une possibilité rationnelle. Leur envoi pour sortir l’humanité des ténèbres de la mécréance vers la lumière de la foi relève en réalité de la faveur d’Allah. En effet, ce n’est que par cet envoi que les hommes sont arrivés à sa connaissance. Cependant, croire en eux est une obligation relevant de la législation.
Le prophète est un humain descendant de sayyidina Adam ﷺ, de sexe masculin, de condition libre, à qui a été révélée une législation qu’il applique mais qu’il n’est pas ordonné de transmettre. Quant au messager, il inclut les mêmes caractères à l’exception qu’il transmet obligatoirement la législation qui lui a été révélée. De là, on tire la règle que tout messager est prophète mais que tout prophète n’est pas forcément messager.
Cette définition ainsi donnée exclut donc qu’un prophète puisse être autre qu’un humain, à savoir un descendant de sayyidina Adam ﷺ. En effet, le prophète ne peut être un jinn ou un ange.
De même, le caractère de masculinité exclut qu’une femme puisse être prophète. Cependant, cette assertion est sujette à divergence. Il a été rapporté de l’imam al Ash’ariy la possibilité pour une femme d’être prophète, à l’image de sayyida Maryam ou de sayyida Hawa ou la mère de sayyidina Musa [1].
La condition de liberté exclut les esclaves à l’image de sayyidina Luqman qui ne fut point un prophète mais un waliy.
Le nombre de prophètes est de cent vingt-quatre mille ou de deux cent vingt-quatre mille selon une autre version. Parmi eux, se trouvent trois cent treize messagers, ou trois cent quatorze ou encore trois cent quinze selon une autre version.
La prophétie n’est point un degré parmi les degrés qui s’acquièrent. En effet, l’on ne devient pas prophète par le fait de multiplier les adorations, d’éviter les péchés, d’assainir son cœur et autres bonnes actions. Il s’agit plutôt d’une distinction, d’une élection provenant d’Allah et ne relevant pas de l’effort ou de la capacité du serviteur. Les musulmans ont été unanimes sur cette question, à l’exception des philosophes qui ont mécru à la religion en indiquant que la prophétie pouvait s’acquérir.
Le premier des prophètes est sayyiduna Adam ﷺ, qui est en même temps le père des humains. Le dernier et le plus noble d’entre eux est notre maître le prophète Muhammad Ibn ‘Abdillah ﷺ. Allah a dit en effet : « Muhammad n’a jamais été le père de l’un de vos hommes. Mais il est le messager d’Allah et le sceau des prophètes » [2]
Le mot « sceau » indique ici la fin du cycle de la révélation et de la prophétie. De sorte, il est impossible qu’il y ait un autre prophète après lui.
Dans la sunnah : « Il y aura trente imposteurs dans ma communauté, chacun prétendant être prophète. Pourtant, je suis le sceau des prophètes. Il n’y aura point de prophète après moi ». [3]
Cependant, à la fin des temps, reviendra notre maître le prophète ‘Isaﷺ pour rétablir la loi d’Allah sur terre et défaire le faux messie, al dajjal. Il ne viendra pas comme messager, mais comme suivant la shari’ah de l’Islam, celle donnée à sayyidina Muhammad ﷺ. Sera-t-il prophète ou Wali alors ? Les savants ont divergé sur cette question.
Les prophètes sont les plus élevés de toute la création d’Allah. Parmi eux, le prophète Muhammadﷺ est le meilleur de toutes les créatures, jinns, anges compris. Cette précellence est établie par consensus des musulmans, y compris des mu’tazilah et nul ne l’a niée si ce n’est al Zamakhshariy. Son avis est donc isolé et contraire au consensus.
Suivent dans l’ordre, comme meilleurs de toute la créature, les autres prophètes et parmi eux les gens de la fermeté (ulul ‘azm). Ceux-là sont, en dehors du prophète Muhammadﷺ, sadatuna Nuhﷺ, Ibrahimﷺ, Musaﷺ et ‘Isaﷺ. Les suivent les autres messagers et ensuite le reste des prophètes non-messagers.
Viennent dans l’ordre de préférence parmi les créatures les grands parmi les anges comme Jibril, Mika’il, ‘Israfil et ‘Azra’il.
L’avis retenu par les savants de cette science, qui est l’avis des maturidis, est que les suivants de ceux-là sont les pieux parmi les humains. Viennent ensuite le commun des gens qui sont supérieurs au commun des anges. Par le commun des musulmans, il est entendu bien sûr les pieux parmi eux et non les pervers.
Le chaykh a indiqué dans ce vers qu’il parlait des [messagers] à l’exception des prophètes car une des caractéristiques énoncées ne s’applique à ces derniers, à savoir la transmission. Le premier attribut des prophètes messagers est [la véridicité].
L’attribut de véridicité est le fait que le messager ne fasse que rapporter de son Seigneur la vérité exclusivement. Cela veut dire que chaque information donnée par le messager correspond à ce qui est, sans doute ni erreur. En effet, il est inconcevable à leur endroit de dire autre que la vérité, même par oubli.
Leur second attribut est la [préservation], c’est-à-dire la préservation de tous leurs membres, apparents et cachés, de ce qui est interdit ou de ce qui est détestable. Ils sont de même à l’abri du désir de recourir à ces choses interdites ou détestables dans la législation.
Le messager peut accomplir un acte qui est déclaré détestable pour le commun des gens ou contraire à ce qui est préférable. Dans ce cas, son acte sera pris comme ayant une visée législative et sera à son endroit soit recommandé, soit obligatoire. L’exemple en est que le prophète ait bu ou uriné debout après avoir interdit ces actes. Dès lors, son acte en urinant ou buvant debout montre que cette interdiction n’a pas un caractère de prohibition mais de désapprobation.
La préservation des prophètes implique donc l’impossibilité de leur attribuer tout fait de turpitude. En d’autres termes, les messagers, ainsi que les prophètes, sont infaillibles et ne font pas de péché volontairement.
Cependant, cette infaillibilité mérite un développement. En effet, les musulmans se sont mis d’accord sans exception sur l’infaillibilité des prophètes et messagers concernant les grands péchés et cela, après le début de leur prophétie. Cette question ne fait pas divergence entre les musulmans, toutes tendances confondues.
Mais les savants ont divergé sur la possibilité des grands péchés avant leur prophétie et sur la possibilité et l’occurrence des petits péchés avant et après leur prophétie.
La possibilité des grands péchés avant la prophétie ne fait pas l’objet d’une divergence notable, la plupart des savants l’ayant rejetée. Quant à celle sur les petits péchés avant et après la prophétie, elle mérite d’être mise en lumière.
En effet, il convient de se référer aux savants de l’école ash’arie pour établir la position à adopter. Ce qui apparaît tout d’abord, c’est la réticence de certains imams pour trancher cette question. Dans al maqalat al Islamiyyah, parlant de l’imam al Ash’ariy, al Ustadh ibn Fawrak a dit : « Il disait que la préservation ainsi que l’erreur étaient tous deux possibles pour eux avant la prophétie. Par contre, après leur envoi comme prophète, je n’ai pas trouvé de texte de lui déclarant les petits péchés possibles à leur endroit » [4]
Dans al Irshad, l’imam al Juwayniy a dit : « Leur préservation est-elle obligatoire contre les péchés ? Je dis : « L’infaillibilité des prophètes concernant les turpitudes qui montrent le manque ou le peu de religion est obligatoire par consensus… Quant aux péchés comptés comme petits, que nous expliquerons supra, la raison ne récuse pas leur possibilité et je n’ai à ma disposition aucune preuve formelle pour la récuser. Non plus, je n’ai pas de preuve pour l’affirmer car les preuves formelles viennent des textes ou du consensus. Or, les savants ont divergé sur la possibilité des petits péchés pour les prophètes. Il n’existe pas de textes pour confirmer sa possibilité de façon certaine sans qu’il n’y ait une autre interprétation possible » [5]
Mais la possibilité des petits péchés ainsi que leur occurrence a été affirmée par les savants et est la position largement adoptée par les gens de la sunnah. Ces petits péchés sont donc possibles, selon cette position, même après la prophétie mais uniquement par inadvertance, sans jamais intenter de commettre un interdit.
L’imam ar Raziy a dit : « Ce que nous disons est que les prophètes sont préservés à l’avènement de leur prophétie des grands péchés ainsi que des petits péchés faits intentionnellement. Quant aux (petits péchés) faits par inadvertance, cela est possible » [6]
L’imam al Maziriy a dit : « Les prophètes sont préservés des grands péchés par consensus. Cependant, les gens ont divergé sur la possibilité des petits péchés » [7]
L’imam al Nawawiy a dit : « Ils ont divergé sur l’occurrence des petits péchés sur eux. La plupart des savants du fiqh, du hadith et du kalam parmi les salaf et les khalaf ont penché pour la possibilité des petits péchés à leur endroit » [8]
Cependant, nous disons : la position que nous adoptons est l’infaillibilité des prophètes avant et après leur prophétie et cette infaillibilité concerne aussi bien les grands que les petits péchés. Cette position est connue comme étant celle des maîtres soufis et certains parmi les grands savants l’ont adoptée. Le Chaykh Abu Ishaq al Isfarayiniy a dit : « Les savants ont divergé sur les petits péchés à leur endroit. La majorité a adopté la position que cela n’était pas possible. Une partie des savants a opté pour sa possibilité mais cette position n’a pas de fondement » [9]
Badr ad din al ‘Ayniy rapporte de même cette position : « Mon opinion est que les prophètes sont préservés des grands et petits péchés, avant et après leur prophétie. Quant à ce qui peut ressembler à un petit péché sur ce qui a été rapporté de certains d’entre eux, nous disons juste qu’ils ont délaissé ce qui était plus méritoire pour adopter ce qui est méritoire seulement ». [10]
Nous disons de même que ce qui est compté comme péchés pour les prophètes dans les textes de la révélation doivent être compris relativement, par rapport à leur état de prophète et non comme une désobéissance à la législation divine. De sorte, le péché attribué à un prophète peut être le fait qu’il ait été insouciant à propos d’Allah ne serait-ce qu’un instant. Or, cette négligence, si elle est comptée comme péché pour le prophète du fait de sa proximité avec Allah, ne saurait être considérée comme une désobéissance à une injonction divine.
Cette préservation des prophètes implique le fait qu’ils ne se trompent pas et ne font jamais d’erreur sur les sujets relatifs à la législation et aux règles de la religion. La conséquence de cette règle est que, pour les savants du kalam et différemment de ceux des usul al fiqh, le prophète ne fait jamais d’ijtihad mais ne parle que conformément à la révélation.
Le troisième attribut des messagers est [la transmission] qui est, à leur endroit [requise]. Cette transmission est le fait de délivrer le message qu’Allah a destiné à leur peuple dans son entièreté.
La transmission ne concerne que ce qui a pour but d’être divulgué. En effet, le messager peut recevoir trois types de révélation. La première est celle qui lui est destinée personnellement et qu’il lui est interdit de transmettre. La seconde est ce qui est destiné à une partie de la communauté qu’il peut divulguer ou non selon les capacités des gens. La troisième est celle qui est destinée à l’ensemble des gens auxquels il a été envoyé. La troisième catégorie ici seule fait l’objet de l’obligation de transmission.
Après avoir évoqué les attributs obligatoires des prophètes, le chaykh établit les actes qui sont impossibles à leur endroit. Il dit :
Est impossible le mensonge et la désobéissance… de même que la non-transmission, O toi le sagace
Le premier attribut impossible aux messagers est le [mensonge] qui est l’opposé de l’attribut de véridicité. Il leur est inconcevable de rapporter une information qui ne serait pas dans la réalité.
Le second attribut impossible au sujet des messagers est la [désobéissance] qui est le contraire de l’attribut de préservation. Cela implique d’abord l’impossibilité pour eux de commettre un interdit de leur plein gré. Cela implique de même l’impossibilité pour eux de commettre une erreur dans leur mission.
Le troisième attribut impossible aux messagers est la [non-transmission] qui serait le fait d’omettre involontairement ou de négliger volontairement une information de la révélation qui était destinée à leur peuple. Cet attribut impossible est l’opposé de l’attribut de transmission.
Après l’exposé des attributs obligatoires et impossibles, l’auteur évoque les actes possibles au sujet des prophètes. Il dit :
Est possible à leur endroit tout accident… qui n’implique pas un défaut, à l’image de la maladie
Il est [possible] à l’endroit des messagers et des prophètes tout accident lié à leur nature humaine. Ces accidents sont donc toutes les activités humaines comme le fait de manger, de dormir, de se marier, d’être fatigué, de ressentir de la douleur…
Il est possible aussi à leur endroit d’oublier mais uniquement ce qui n’est pas lié au message qu’ils doivent transmettre. Quant à ce qui concerne le message à transmettre, il est possible qu’Allah leur fasse oublier une chose mais après sa transmission.
De même, la [maladie] est possible à leur endroit. Cependant, aucun de ces accidents ne doit impliquer [un défaut] à leur endroit. Il leur est possible certes d’être malades, mais le prophète ne peut être frappé d’une maladie qui nuit à son obligation de transmission comme la lèpre, la surdité, la mutité ou toute maladie qui ferait que les gens le fuient. De même est impossible à leur endroit la cécité. Sayyiduna Ya’qub ﷺ n’a pas été frappé de cécité mais, comme l’indique le verset, ses yeux se voilèrent du fait des larmes de la tristesse. Il est de même exclu à leur endroit la folie et même l’évanouissement prolongé. Au contraire, les prophètes sont dotés de l’intelligence et de la perspicacité comme caractère intrinsèque.
L’auteur expose ensuite les preuves rationnelles qui soutiennent les attributs obligatoires et réfutent les attributs impossibles.
Il dit :
S’ils n’avaient pas été véridiques, cela impliquerait… que la divinité se trompe en les confirmant
Car leurs miracles sont comme sa parole affirmant... « ce serviteur dit vrai sur toute information »
Si la transmission était niée ou qu’ils faillent, cela obligerait… que l’interdit soit changé pour leur obéir
Si les prophètes n’avaient pas été [véridiques] dans toute information qu’ils rapportent de leur Créateur ou si les informations qu’ils rapportent étaient en contradiction avec la réalité, cela impliquerait forcément d’attribuer à Allah le mensonge. En effet, Allah a envoyé des messagers pour délivrer un message qu’Il leur a assigné. Si ce message est mensonger, cela implique de même qu’on assigne ce mensonge à celui qui a initié ce message. De sorte, le mensonge est impossible à l’endroit des prophètes. Par implication, il est obligatoire de les qualifier de véridiques.
Il est de même impossible à l’endroit des messagers de donner une information trahissant le message originel qui leur a été donné, que ce soit volontairement ou non. Si en effet ils avaient modifié le contenu du message qui leur a été délivré, ils n’auraient pas eu la confirmation de leur véridicité par Allah. En les [confirmant], Il se tromperait et un mensonge Lui serait attribué. Or, ceci est impossible au sujet d’Allah. Pourtant, Il les a confirmés en leur permettant de faire des [miracles]. Le miracle ainsi fait sous la permission d’Allah revient pour Lui a dire que le messager [dit vrai sur toute information] qu’il délivre. Les miracles des prophètes sont donc la preuve de leur véridicité.
Le miracle est tout fait qui rompt avec l’ordre naturel et qui apparaît par la permission d’Allah pour appuyer la prédication d’un prophète par lequel celui-ci défie ses contradicteurs et les rend incapables de reproduire la même chose. Cette définition implique quelques éclaircissements.
Le miracle est un fait et ce fait peut être une parole, un acte ou une abstention. Une parole miraculeuse est par exemple un verset du coran. Un acte miraculeux est par exemple la fente de la lune. Une abstention miraculeuse est par exemple le fait que le feu n’ait pas brûlé sayyiduna Ibrahim ﷺ.
La rupture de l’ordre naturel est le fait que le miracle inverse la marche naturelle des choses, marche naturelle qui est celle à laquelle l’humanité est habituée. Par exemple, empêcher le soleil de se lever alors qu’il se lève d’habitude est un miracle ou le fait de le faire se lever du côté opposé d’où il apparaît d’habitude.
On parle de miracle (mu’jizah) quand cette rupture de l’ordre naturel provient de quelqu’un se réclamant de la prophétie. Mais la rupture de l’ordre naturel peut se présenter pour autre qu’un prophète. Si cela apparaît entre les mains d’un musulman pieux, il s’agit d’un prodige (karamah). Si cela apparaît entre les mains d’un mécréant ou d’un pervers parmi les musulmans, il s’agit d’un istidraj. L’istidraj est l’apparition d’un fait extraordinaire d’entre les mains d’un mécréant ou d’un pervers ou d’un musulman ayant une croyance déviante pour l’enfoncer dans son égarement et sa perdition.
Ce miracle devra être en concordance avec le défi qu’aura lancé le prophète dans le sens où le miracle devra se produire au moment, à l’endroit et selon la modalité qu’aura définis le prophète. De même, la personne ou la chose sur laquelle ce miracle se sera produit ne devra point démentir son auteur. A titre d’exemple, un prophète présente comme miracle qu’il fera parler un animal ou un mort, cet animal ou ce mort ne devront point, une fois dotés de la parole, lui refuser le statut d’envoyé d’Allah. A contrario, ce schéma se produit inévitablement pour toute personne sujette à l’istidraj ou usant de sorcellerie. En effet, le messie trompeur, al dajjal, tuera et fera ressusciter un mort. Mais cet homme ressuscité n’en déclarera pas moins qu’il était un menteur et en aucun cas un prophète envoyé.
Le miracle doit être précédé d’un défi de sorte que le prophète prenne comme preuve de son envoi par Allah un fait sortant de l’ordinaire qu’il produirait par la permission d’Allah. Le défi est donc qu’il fasse connaître à ses contradicteurs qu’il exécutera ce fait miraculeux selon les dispositions établies et que ses contradicteurs soient informés des modalités d’exécution de ce miracle.
Enfin, le miracle devra laisser les contradicteurs du prophète incapables de reproduire une chose semblable bien qu’ayant les moyens de faire la même chose. C’est ce que l’on appelle l’I’jaz, le fait qu’à une époque donnée, nul ne puisse exécuter le fait sortant de l’ordinaire fait par un prophète malgré la présence des moyens techniques pour le faire. A titre d’exemple, le peuple de Pharaon était versé dans la sorcellerie et avait développé cette science. Pourtant, sayyiduna Musaﷺ est venu avec son bâton pour annuler leur sorcellerie et nul n’a pu, dans tout ce peuple, produire un serpent pour vaincre le sien. De même Sayyiduna ‘Isaﷺ est apparu dans une période où les progrès de la médecine étaient relativement extraordinaires. Il a guéri les lépreux, rendu la vue aux aveugles, redonné la vie à des oiseaux et ressuscité les morts. Pourtant, malgré les grands progrès de l’époque, nul n’a pu reproduire les mêmes faits.
Quant à sayyiduna Muhammad ﷺ, il a accompli des miracles qui ont été rapportés par tawatur et qu’il n’appartient à personne de nier sous peine de mécroire à l’Islam. Parmi ces miracles absolument certains, la fente de la lune évoquée dans la sourate al Qamar. De même, l’histoire du tronc de palmier qui pleurait de tristesse du fait de son abandon a recueilli le tawatur. Son miracle le plus éclatant est cependant le coran qui constitue un i’jaz continu jusqu’à la fin des temps. En effet, Allah y invite tous les humains et le jinns à se liguer pour produire un miracle pareil en termes d’éloquence, de clarté et de contenu ésotérique. Il a dit : « Si les humains et les jinns se rassemblaient pour produire un coran pareil, ils ne pourraient faire pareil même s’ils s’entraidaient » [11]
En réalité, il a été dit que le coran ne constitue pas un seul miracle mais plus de six mille deux cents miracles car chaque verset en constitue un. Mais le plus solide est que l’i’jaz minimal est de trois versets en référence à Sa Parole : « Si vous êtes dans le doute sur ce que l’on a envoyé à notre serviteur, ramenez ne serait-ce qu’une sourate pareille et appelez vos témoins si vous êtes véridiques. Et si vous ne le faîtes pas, et certes, vous ne le ferez jamais, craignez un feu dont le combustible sera d’hommes et de pierres ». [12]
Or, la sourate la plus courte du coran fait trois versets et il s’agit de la sourate al kawthar.
Tambih sur la wilaya : Le waliy (saint) est le connaissant d’Allah par ses Attributs et ses Noms, dans la mesure du possible, qui se conforme à son obéissance tout en évitant de se complaire dans les péchés.
Le mot waliy vient de l’arabe wala’ et peut avoir une double acception. Il peut signifier celui dont Allah se charge des affaires. Dans une autre acception, il peut signifier celui qui est protégé par Allah.
Le waliy acquiert une connaissance d’Allah qui établit sa proximité avec lui. Cette proximité est acquise par le biais de l’obéissance aux ordres d’Allah et à l’accomplissement des œuvres surérogatoires. Dans le hadith qudsiy : « Allâh a dit: « Celui qui montre de l’hostilité, quand bien même ce serait pour Moi, à l’un de Mes bien-aimés, Je lui déclarerai la guerre. Mon serviteur ne se rapproche pas de Moi par une chose que J’aime, comme il le fait avec ce que Je lui ai prescrit. Et Mon serviteur ne cessera de se rapprocher de Moi par les actes surérogatoires jusqu’à ce que Je l’aime; et, lorsque Je l’aime, Je serais son ouïe avec laquelle il entend, sa vue avec laquelle il voit, sa main avec laquelle il saisit et son pied avec lequel il marche. S’il Me demande, je lui donnerai ce qu’il veut et s’il sollicite Mon secours, Je le lui accorderai. » [13]
Cette obéissance n’implique pas que le waliy ne fasse pas des péchés, mêmes les grands parmi eux, que ce soit volontairement ou non. De sorte, le waliy peut faire des péchés volontairement et ces péchés ne nient pas son statut. Cependant, le waliy peut être préservé par Allah de sorte qu’il ne tombe pas dans les péchés.
Cependant, même s’il commet des péchés, le waliy ne persiste pas dedans en s’y complaisant.
La croyance à l’existence des awliya ainsi qu’en leurs prodiges est un élément du dogme des gens de la sunnah.
En effet, l’existence des awliya et de leurs prodiges est attestée dans le coran. Parmi ces prodiges, le fait que sayyida Maryam soit devenue enceinte sans contact avec un homme. Il est de ses prodiges qu’elle recevait des fruits d’hiver en été et des fruits d’été en hiver dans le temple sans intervention de quiconque.
Parmi les prodiges rapportés dans le coran, se trouve l’action de Asif ibn Barkhayah, le cousin de sayyiduna Sulaymanﷺ. Il a ramené le trône de la reine de Saba’ en un clin d’œil d’une distance de milliers de kilomètres.
Les prodiges réalisés par les awliya sont comme la continuité du miracle du prophète qu’ils suivent. Cela veut dire que l’existence même des awliya est un miracle attribué au messager dont ils suivent la révélation, comme étant une confirmation de la véracité du message de ce prophète même après sa mort.
De même, les prodiges peuvent survenir du vivant du waliy comme après sa mort. Au contraire, les prodiges accomplis par le waliy sont plus éclatants et plus nombreux après sa mort car il est débarrassé de l’obstruction du corps. Ceci est la position unanime des savants qui ont accepté la possibilité des prodiges, à l’exclusion du Chaykh Abu Ishaq al Isfarayiniy.
L’auteur aborde ensuite la preuve rationnelle des deux autres attributs, à savoir la préservation et la transmission.
La preuve de l’obligation de leur préservation de toute désobéissance volontaire est le fait que, s’ils désobéissaient, l’interdiction imposée par Allah à ses serviteurs, celle de ne point lui désobéir, aurait été annulée. En effet, ces messagers ont été envoyés pour montrer aux hommes la manière de Lui obéir. Si eux-mêmes [faillaient], cela impliquerait que la désobéissance deviendrait obéissance par imitation de leurs actions. De sorte, les serviteurs seraient ordonnés de désobéir. Cela impliquerait de même que ce qui a été interdit par Allah ne le soit plus car les messagers eux-mêmes agiraient de la sorte.
La preuve de textuelle de cette obligation se trouve au verset : « Voici ceux qu’Allah a guidés, suis donc leur voie ! ».[14] Et même : « Nous n’avons envoyé de messager si ce n’est pour qu’il soit obéi ».[15]
Tambih : Réfutation de quelques ambigüités sur l’infaillibilité des prophètes portant sur des péchés qui pourraient leur être attribués.
Certains textes du coran ou de la sunnah, pris en leur sens littéral, semblent attribuer des péchés aux prophètes. Or, cela mérite un éclaircissement. Quelques cas peuvent être étudiés sachant que le même traitement devra être appliqué pour tout texte attribuant un défaut à un prophète.
Concernant sayyiduna Adamﷺ, le coran semble lui attribuer un péché, notamment dans la sourate Ta Ha, Allah dit : « Adam désobéit à son Seigneur et se détourna » [16]
La désobéissance ici est en l’occurrence le fait d’avoir mangé de l’arbre alors que cela lui avait été interdit. De même, le fait qu’il se soit repenti après cela indique qu’il aurait commis un péché.
La réponse à cela est d’abord que cet évènement s’est passé avant la prophétie. Si on accepte que les prophètes puissent commettre des péchés dans cette période, ce péché devra être considéré comme un petit accompli dans un instant d’inadvertance. Rien n’indique que ce péché puisse être considéré comme un grand. En effet, sayyiduna Adamﷺ a été trompé par le shaytan qui lui a juré dire la vérité et ce serment l’a induit en erreur.
Si on considère par contre que les prophètes ne font point de péché, petits ou grands, l’ordre de ne pas manger de l’arbre devra être pris comme une recommandation et non une interdiction ferme. Comment donc, en effet, l’interdiction pourrait-elle exister dans le paradis où ne se trouve que ce qui plaît à l’égo ? De même, le péché ne peut exister qu’en présence d’une shari’ah. Il est clair cependant que dans le paradis, sayyyiduna Adam ﷺ n’était pas prophète et que toute législation était inexistante. Le péché ne peut donc exister comme aucune interdiction n’a été proclamée.
Quant au meurtre commis par sayyiduna Musa ﷺ, il ne peut s’agir d’un péché car il a été commis dans par accident d’abord, ensuite dans le but de protéger un innocent d’un tyran. Cela invalide donc la thèse d’un quelconque péché. Mais dans ce cas, pourquoi sayyiduna Musa ﷺ s’est-il repenti en disant : « Il s’agit de l’action de shaytan » [17] et : « Seigneur, je me suis fait tort à moi-même, pardonne-moi » [18] ?
D’un côté, la référence au shaytan n’indique point l’influence que ce dernier pourrait avoir sur quelqu’un mais plutôt, toute action qui serait mauvaise. En atteste l’utilisation dans le verset « Pareils à des têtes de shaytan ». Quant à la demande de pardon, elle est de la même nature que celle des prophètes car leurs actions, même licites, entraînent leur demande de pardon vu leur proximité avec Allah.
Une autre objection à lever est celle de sayyiduna Yunus ﷺ qui s’éloigna de son peuple au lieu de patienter avec eux. La réponse est qu’il avait transmis l’ensemble de son message et que son apostolat auprès de son peuple était terminé. La patience est une vertu recommandée et le fait que sayyiduna Yunus ﷺ n’ait point patienté ne constitue pas un péché. Son invocation « Gloire à toi, j’ai été parmi les injustes » entre dans la même catégorie que l’invocation de sayyiduna Adam ﷺ.
Il en est ainsi de toutes les interrogations pouvant survenir sur l’infaillibilité des prophètes. Ces mauvaises interprétations pouvant surgir proviennent de l’absence d’approfondissement des expressions arabes ou encore de la prise en compte de récits faux et fabriqués.
La preuve de la transmission obligatoire des messagers est identique que celle de leur préservation. En effet, si les messagers ne transmettaient pas ce qui leur été ordonné, cela impliquerait qu’ils cachent volontairement une partie du message. De même, s’ils oubliaient, ils ne pourraient délivrer le message en entier. Tout cela impliquerait qu’ils occultent le message et, comme nous avons prouvé leur véridicité, qu’Allah leur ordonne de cacher ce message. Or, une telle implication est inconcevable alors qu’Il a dit : « O messager, transmets ce qui t’a été révélé. Si tu ne le fais pas, tu n’auras pas transmis ton message » [19]
Il dit ensuite :
La possibilité des accidents sur eux, sa preuve… est leur occurrence avec l’endurance comme sagesse
Après avoir exposé les preuves rationnelles des attributs obligatoires et impossibles, l’auteur aborde celles des attributs possibles. La preuve de [la possibilité] pour les prophètes de subir des [accidents] liés à leur condition humaine, comme le fait de manger, de boire, de se fatiguer, de se mettre en colère, réside tout simplement dans leur [occurrence]. En effet, ces faits ont été rapportés des prophètes et ont été constatés par leurs contemporains. Ceux-là ont rapporté le fait que les prophètes ont été démentis, qu’ils ont été frappés, assassinés et ont souffert. De sorte, la preuve est établie qu’ils subissaient ces accidents.
Cependant, ces accidents ne concernent que leur corps car leur cœur est en permanence connecté avec Allah et rempli des lumières de la connaissance. Dans ce sens, le poète a dit :
Ne conteste guère la révélation dans son rêve… Il a un cœur qui, quand ses yeux se ferment, ne dort point
Ces accidents qui leur arrivent ne sont pas pareils à ceux qui frappent les autres humains. En effet, ces accidents pour eux comportent une [sagesse] profonde. Ils sont l’occasion d’éprouver leur [endurance] face aux tribulations de ce bas-monde, de les renforcer dans leur proximité avec Allah et de servir d’exemple aux humains qui les suivent. En effet, dans le hadith : « Les prophètes sont les plus durement éprouvés parmi les hommes. Ensuite ceux qui les suivent et ensuite ceux qui les suivent » [20]
Ces accidents sont donc pour eux un moyen de supporter les épreuves du bas-monde de sorte qu’ils ne puissent y trouver de repos si ce n’est dans la relation avec Allah. La sagesse que l’on peut tirer de ces accidents sur les prophètes est l’évanescence de cas bas-monde. Si effectivement les plus rapprochés d’Allah n’y vivent que tribulations, la preuve est apportée de son peu de valeur et de l’inanité d’y porter une grande espérance. Au contraire, si les plus rapprochés y ont subi des épreuves, cela indique à l’intelligent qu’elles sont un moyen de se détacher d’un bas-monde périssable pour prendre le viatique vers une vie dernière éternelle.
Ces accidents arrivant aux prophètes ont aussi une autre sagesse, celle d’enseigner aux hommes la manière de se comporter dans les actes licites de la vie, comme la manière de manger, de boire ou encore de s’habiller. S’il est vrai que les prophètes, même dans leurs actes anodins, n’agissent jamais sans indication d’Allah, il est donc établi que chaque mouvement qu’ils font renferme des secrets incommensurables dans la relation avec Allah, même si ces secrets nous échappent.
Après avoir exposé les attributs obligatoires, impossibles et possibles pour les prophètes ainsi que leurs preuves, le chaykh résume ces éléments à une seule parole. Il dit :
Et la parole, point de dieu qu’Allah… Muhammad a été envoyé par le Divin
Regroupe toutes ces connaissances… étant ainsi le signe clair de la foi
Elle est la meilleure formule de rappel…Absorbe-y toi toute vie et tu auras le meilleur viatique
Tous éléments évoqués concernant les attributs d’Allah et des prophètes sont condensés dans la parole :
Point de dieu qu’Allah, Muhammad est le messager d’Allah
لا اله الاّ الله محمد رسول الله
Autrement dit, la signification de cette phrase est l’exposé entier qui a été fait concernant les choses possibles, impossibles et obligatoires au sujet d’Allah et des prophètes. Cette parole, malgré sa longueur réduite, est la meilleure chose qui puisse est dite par la créature. Cela informe donc de la noblesse et de la haute valeur de cette parole.
La parole [point de dieu qu’Allah] a comme sens littéral qu’il n’y a point d’autre être qui n’a besoin de rien et dont toute chose a besoin si ce n’est Allah. Cette définition inclut donc les attributs d’Allah comme l’Etre, la Primordialité, l’Eternité, la Persistance, la Non-ressemblance aux accidents ainsi que le fait qu’Il ne soit point soumis à l’endroit, au temps, aux changements. S’Il avait besoin d’une quelconque de ses créatures, Il ne serait plus attribué de la Subsistance par Lui-même.
De cette même définition, on tire le fait qu’Il ne puisse être soumis à aucun défaut ou faiblesse. Cette impossibilité de défaut ou faiblesse oblige de Lui attribuer la Vision, l’Audition, la Parole, la Vie, la Science. En effet, s’Il n’avait point ces attributs, il serait obligatoire de lui attribuer leur contraire, c’est-à-dire des défauts.
On en tire aussi le fait qu’il puisse faire toute chose possible et qu’Il ne soit point obligé de la faire ou de la délaisser. Si une telle obligation Lui était imposée, Il serait soumis à quelque chose. Or, Il est Subsistant par Lui-même !
De même, on en tire que nulle chose dans cette existence n’a d’influence que par sa Volonté. Le feu ne brûle que par son Ordre et non par sa nature même de feu. Si les choses avaient une influence par elles-mêmes, cela impliquerait qu’Il ait besoin d’un intermédiaire pour les actionner et que ces créatures n’aient pas besoin de Lui. Or, comment cela serait-il possible alors qu’Il est Subsistant par Lui-même, sans avoir besoin de quiconque alors que tout a besoin de Lui ?
Cette possibilité de faire exister les choses possibles implique de même de lui attribuer la Science, la Volonté ainsi que la Puissance. S’Il n’avait aucun de ces attributs, Il ne pourrait certes pas existencier ce qui n’existait pas auparavant.
Cette parole indique de même son unicité. S’Il n’était pas un dieu unique, Il aurait besoin, dans n’importe quel cas de figure, d’un autre dieu pour ne pas être réduit à l’impuissance. Comment donc, alors qu’on a prouvé qu’Il était subsistant par Lui-même ?
On comprend de cela que l’existence toute entière est un accident et ne provient que de sa Volonté et de sa Puissance.
Quant à la parole [Muhammad a été envoyé par le Divin], cela englobe la croyance à l’ensemble des prophètes, des anges, des livres révélés, au jour du jugement et tout ce qu’il comporte comme affres. En effet, c’est par la mission de sayyiduna Muhammad ﷺ que l’on a eu la confirmation de ces éléments.
De cette parole, on prend l’obligation de la véridicité des messagers et le fait qu’il leur soit impossible de mentir. En effet, s’ils avaient été menteurs, ils n’auraient pas été des messagers de confiance d’Allah qui connaît le caché et l’apparent.
De même, on prend de cette parole le fait qu’ils ne puissent désobéir à Allah car ils ont été envoyés pour enseigner aux hommes comment adorer leur Seigneur par leurs actions, leurs paroles et leurs silences. Comment donc pourraient-ils Lui désobéir alors qu’Il les a choisis comme meilleurs de sa créature et modèles à suivre ?
Il est obligatoire, du fait de cette parole, de croire à tout ce qui a été rapporté par sayyiduna Muhammad ﷺ comme informations, aussi bien en général qu’en détail. Il est obligatoire de croire en tout ce qui a été rapporté de lui parmi les événements de la fin des temps et du jugement comme l’extraction des tombes, le rassemblement, la balance, le paradis, l’enfer…Cela implique la croyance que la révélation qu’il a amenée est la meilleure des législations et le chemin agréé par Allah.
De là, on prend de même le fait qu’il soit le dernier des prophètes. La fin de la prophétie implique de même la fin de la révélation. Quant à celui qui nie ce qui a été transmis de lui par tawatur ou comme étant une connaissance obligatoire de la religion, il aura mécru aussi bien à la parole [Muhammad a été envoyé par le Divin] qu’à la parole [point de dieu qu’Allah]. En effet, celui qui mécroit au prophète ﷺ et à son message aura forcément mécru en Allah.
Cette parole donc est [ le signe clair] de ce qui est dans la poitrine, à savoir [la foi]. Il s’agit d’une parole inclusive de toutes les croyances malgré sa longueur réduite. Elle est facile à mémoriser et de même à prononcer par la langue. Plutôt, elle n’est prononcée par la langue que par celui à qui Allah a voulu du bien. Par cette parole en effet, l’homme est sauvé du châtiment éternel de l’enfer car toute personne qui la prononce en toute croyance ou qui y croit sans la prononcer entrera forcément au paradis. En effet, le prophète ﷺ a dit : « Quiconque meurt en sachant qu’il n’y a de dieu qu’Allah entrera au paradis » [21]
De sorte, nul n’est considéré musulman sans l’avoir prononcée, s’il en a la capacité. Prononcer cette parole est donc obligatoire pour toute personne qui sort de la mécréance pour entrer dans l’Islam comme étant une condition de validité. Est-ce que celui qui ne le prononce pas tout en étant capable est sauvé s’il a la croyance ferme dans son cœur ? Une divergence existe et l’avis solide semble être celui de la validité de cette croyance.
Quant à celui qui a été élevé comme musulman, la prononcer est obligatoire une fois au moins dans la vie, en ayant l’intention d’accomplir cette obligation.
Il lui sera recommandé de multiplier son rappel car cette parole est [la meilleure formule] que puisse prononcer une créature pour le [rappel] d’Allah. En effet, le prophète a dit : « La meilleure chose que j’aie dite, moi et les prophètes avant moi, est « point de dieu qu’Allah, unique et sans associé » [22]
Il a dit aussi : « La meilleure formule de rappel est « point de dieu qu’Allah » [23]
De sorte, [absorbe] toi dans sa répétition pour les bienfaits immenses qu’elle comporte. Tu auras ainsi un [viatique] sûr pour qu’elle soit la dernière parole prononcée au moment de la mort. Or, le prophète a dit : « Celui dont la dernière parole est « point de dieu qu’Allah » entre au paradis » [24]
[1] Il est dit dans Tuhfah al murid que son nom est Yuhanidh.
[2] Sourate al ahzab, v 40
مَّا كَانَ مُحَمَّدٌ أَبَا أَحَدٍ مِّن رِّجَالِكُمْ وَلَكِن رَّسُولَ اللَّهِ وَخَاتَمَ النَّبِيِّينَ
[3] Rapporté par al Tirmidhiy, Ibn Abi Shaybah, Ibn Majah et d’autres
وإنه سيكون في أمتي ثلاثون كذابون كلهم يزعم أنه نبي وأنا خاتم النبيين لا نبي بعدي
[4] Al Maqalat al Islamiyyah
[5] Kitab al irshad ila qawati’ al adilah fi usul al i’tiqad
[6] ‘Ismatul ambiya’
[7] Al Mu’lim bi sharh Muslim
[8] Al minhaj fi sharh Muslim
[9] Jami’ ahkam al qur’an
[10] ‘Umdah al qariy’
[11] Sourate banu Isra’il, v 88
قُل لَّئِنِ اجْتَمَعَتِ الإِنسُ وَالْجِنُّ عَلَى أَن يَأْتُواْ بِمِثْلِ هَـذَا الْقُرْآنِ لاَ يَأْتُونَ بِمِثْلِهِ وَلَوْ كَانَ بَعْضُهُمْ لِبَعْضٍ ظَهِيراً
[12] Sourate al baqara, v 23-24
وَإِن كُنتُمْ فِي رَيْبٍ مِّمَّا نَزَّلْنَا عَلَى عَبْدِنَا فَأْتُواْ بِسُورَةٍ مِّن مِّثْلِهِ وَادْعُواْ شُهَدَاءكُم مِّن دُونِ اللّهِ إِنْ كُنْتُمْ صَادِقِينَ
فَإِن لَّمْ تَفْعَلُواْ وَلَن تَفْعَلُواْ فَاتَّقُواْ النَّارَ الَّتِي وَقُودُهَا النَّاسُ وَالْحِجَارَةُ أُعِدَّتْ لِلْكَافِرِينَ
[13] Rapporté par al Bukhariy
عن أبي هريرة رضي الله عنه قال : قال رسول الله - صلى الله عليه وسلم - : إن الله قال ( من عادى لي وليا فقد آذنته بالحرب ، وما تقرب إلي عبدي بشيء أحب إلي مما افترضت عليه ، وما يزال عبدي يتقرب إلي بالنوافل حتى أحبه ، فإذا أحببته كنت سمعه الذي يسمع به ، وبصره الذي يبصر به ، ويده التي يبطش بها ، ورجله التي يمشي بها ، وإن سألني لأعطينه ، ولئن استعاذني لأعيذنه
[14] Sourate al An’am, v 90
أُوْلَـئِكَ الَّذِينَ هَدَى اللّهُ فَبِهُدَاهُمُ اقْتَدِهْ
[15] Sourate an Nisa, v 64
وَمَا أَرْسَلْنَا مِن رَّسُولٍ إِلاَّ لِيُطَاعَ بِإِذْنِ اللّهِ
[16] Sourate Ta Ha, v 121
وَعَصَى آدَمُ رَبَّهُ فَغَوَى
[17] Sourate al qasas, v 15
هَذَا مِنْ عَمَلِ الشَّيْطَانِ
[18] Sourate al Qasas, v 16
قَالَ رَبِّ إِنِّي ظَلَمْتُ نَفْسِي فَاغْفِرْ لِي
[19] Sourate al Ma’idah, v 67
يَا أَيُّهَا الرَّسُولُ بَلِّغْ مَا أُنزِلَ إِلَيْكَ مِن رَّبِّكَ وَإِن لَّمْ تَفْعَلْ فَمَا بَلَّغْتَ رِسَالَتَهُ
[20] Rapporté par Ahmed dans son Musnad sous cette formulation :
عن أبي عبيدة بن حذيفة عن عمته فاطمة أنها قالت أتينا رسول الله صلى الله عليه وسلم نعوده في نساء فإذا سقاء معلق نحوه يقطر ماؤه عليه من شدة ما يجد من حر الحمى قلنا يا رسول الله لو دعوت الله فشفاك فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم إن من أشد الناس بلاء الأنبياء ثم الذين يلونهم ثم الذين يلونهم ثم الذين يلونهم
[21] Rapporté par Muslim
عن عثمان قال قال رسول الله صلى الله عليه وسلم من مات وهو يعلم أنه لا إله إلا الله دخل الجنة
[22] Rapporté par l’imam Malik dans al Muwatta et al Tirmidhiy :
وَخَيْرُ مَا قُلْتُ أَنَا وَالنَّبِيُّونَ مِنْ قَبْلِي : لَا إِلَهَ إِلَّا اللَّهُ وَحْدَهُ لَا شَرِيكَ لَهُ
[23] Rapporté par al Tirmidhiy
أَفْضَلُ الذِّكْرِ لَا إِلَهَ إِلَّا اللَّهُ
[24] Rapporté par Muslim
عن معاذ بن جبل ، قال : قال رسول الله صلى الله عليه وآله وسلم : " من كان آخر كلامه لا إله إلا الله دخل الجنة
Le chaykh mufassir Abu Muhammad Makkiy ibn Abi Talib fut interrogé sur l’explication de celui qui avait été sacrifié par son père Ibrahim. Etait-ce Ishaq ﷺ ou Isma’il ﷺ ?
Il répondit : La louange appartient à Allah pour ses bienfaits. Nous le remercions pour ses donc et prions sur le meilleur de sa création, le prophète Muhammad ﷺ ainsi que sur sa famille.
Les savants ont divergé au sujet de celui qui avait été sacrifié. Ceux qui disent qu’il s’agit de Isma’il ﷺ ont leurs preuves et il y a aussi des preuves provenant du coran pour ceux qui disent que c’est Ishaq ﷺ. Nous allons commencer par les preuves coraniques sur Isma’il ﷺ et les feront suivre par les preuves provenant des récits historiques.
Parmi les preuves coraniques, la parole d’Allah : « Nous lui annonçâmes Ishaq » [1], c’est-à-dire à Sarah. Elle est en effet la mère de Ishaq ﷺ sans divergence. Il dit ensuite : « Et après Ishaq, Ya’qub » [2]. Il s’agit du petit-fils et Allah a annoncé à Ibrahim ﷺ et à son épouse Sarah de la naissance de Ishaq. Il leur a annoncé donc que Ishaq ﷺ allait vivre jusqu’à ce qu’il naisse de lui un enfant nommé Ya’qub ﷺ. C’était donc le signe d’Allah pour Ibrahim ﷺ qu’Il allait allonger sa vie jusqu’à ce qu’il donne naissance à un enfant et qu’il ne mourrait pas enfant. Il est donc impossible qu’il lui ordonne de sacrifier Ishaq alors qu’il n’avait pas atteint l’âge de la puberté après lui avoir annoncé qu’il ne mourrait pas avant d’avoir lui aussi un enfant. C’est comme s’Il lui ordonnait de sacrifier celui qu’Il lui avait dit de prime abord qu’il ne serait pas sacrifié ! Or, ceci n’est point juste. Sa Parole : « quand il atteignit l’âge d’aller avec lui » [3] indique qu’il était en dessous de l’âge de la puberté et nul n’a jamais dit que Ibrahim ﷺ avait reçu l’ordre de sacrifier son enfant alors que celui-ci avait déjà un enfant qui lui était propre. Plutôt, il avait reçu cet ordre alors que l’enfant était encore petit.
De sorte, si le verset indique que Ishaq ﷺ vivrait jusqu’à ce qu’il ait un enfant, la raison n’accepte pas qu’Allah ordonne qu’il soit sacrifié alors qu’il était encore enfant après l’avoir informé qu’il ne mourrait pas avant la puberté. Ceci indique que le sacrifié n’était pas Ishaq ﷺ. Et s’il ne s’agit pas de Ishaq ﷺ, c’est forcément Isma’il ﷺ car il n’y a pas de troisième enfant.
Parmi les preuves du coran indiquant qu’il s’agit de Isma’il ﷺ, la Parole d’Allah dans la sourate as saffat, après avoir évoqué le sacrifice et la rançon : « Nous lui annonçâmes Ishaq » [4]. Or, l’on sait par consensus que Isma’il ﷺ est plus âgé que Ishaq ﷺ. Il n’a été évoqué la bonne nouvelle de Ishaq ﷺ qu’après la mention de la rançon et du sacrifice. Cela montre donc que le sacrifié était Isma’il ﷺ. Si c’est lui qui est mentionné avant l’évocation de la bonne nouvelle de Ishaq ﷺ, c’est que Ishaq n’a été annoncé à Ibrahim ﷺ qu’après avoir été testé par le sacrifice de Isma’il ﷺ et Allah les a honorés tous les deux par la rançon. C’est ce qui apparaît du sens des textes. Il a été rapporté de Ibn ‘Abbas qu’il a dit : « Allah l’a évoqué quand il a ordonné à Ibrahim ﷺ les rites du Hajj et que le shaytan se présenta à lui au moment où il s’y acheminait. Le shaytan essaya de le rattraper alors qu’Ibrahim ﷺ le dépassait. Jibril alla vers lui à la stèle de ‘Aqabah. Le shaytan se présenta alors à lui et il lui jeta sept pierres. Il continua et le shaytan se présenta encore à lui à la stèle moyenne. Il lui jeta encore sept pierres et continua. Il jeta alors Isma’il sur le côté alors qu’il avait un qamis blanc. Il lui dit : « O mon père, je n’ai pas d’autre habit comme linceul que celui-ci. Enlève-le-moi pour que tu m’en fasses un linceul ». Quand Ibrahim ﷺ se retourna, il vit à la place un bélier blanc cornu aux yeux noirs et il le sacrifia ». [5]
Ibn ‘Abbas a dit : « Tu nous vois suivre cette tradition à propos des béliers ». Il visait par cela le sacrifice du ‘id. Cela implique que le sacrifice en question a été fait à Mina et qu’il s’agit bien de Isma’il ﷺ. En effet, Isma’il ﷺ vivait dans le Hijaz et y est mort alors que Ishaq ﷺ a vécu et est mort au Sham.
Parmi les preuves du coran se trouve aussi le fait qu’Allah ait annoncé à Sarah et Ibrahim ﷺ la bonne nouvelle de Ishaq ﷺ par la bouche des anges envoyés pour détruire le peuple de Lut ﷺ. Il a ensuite répété cette bonne nouvelle pour parfaire sa compréhension dans d’autres endroits. Il a dit dans la sourate Hud : « Et sa femme était debout et elle se mit à rire. En effet, nous lui annonçâmes Ishaq » [6]. Il a dit dans al Hijr : « Ils dirent : « n’aie point peur, nous t’annonçons un enfant savant » [7]. Il dit dans al dhariyat : « Ils lui annoncèrent un enfant savant » [8]. Il a décrit Ishaq ﷺ par la science à deux endroits. Ensuite, Il ﷻ dit dans al Saffat : « Nous lui annonçâmes un enfant doux » [9]. Il a en effet décrit l’enfant ici par la douceur. La différence des deux qualificatifs indique qu’il y a deux personnes différemment décrites. La différence est que celui qui a été décrit par la science dans la sourate al Dhariyat et al Hijr est Ishaq ﷺ car cela se fit par la bouche des anges envoyés pour détruire le peuple de Lut ﷺ. En effet, la femme de Ibrahim ﷺ a été mentionnée dans la sourate al Dhariyat ainsi que dans Hud. Sarah n’est autre que la mère de Ishaq ﷺ, sans divergence. Elle est l’épouse de Ibrahim ﷺ de même. La différence des qualificatifs à propos des deux enfants indique donc qu’ils sont deux, comme le prouve l’unicité du qualificatif dans les sourates Hijr et al Dhariyat. Ce qualificatif s’applique donc à Ishaq ﷺ. Si celui qui est décrit dans al Hijr et al Dhariyat est Ishaq ﷺ sans divergence, alors, celui qui est décrit dans la sourate al Saffat est Isma’il ﷺ et c’est lui qui a été sacrifié.
Parmi les preuves du coran aussi le fait qu’Allah at évoqué dans la sourate as Saffat que Ibrahim ﷺ a dit : « Seigneur, fais-moi don d’un enfant parmi les pieux » [10]. Il demanda cela à Allah qui dit : « Nous lui annonçâmes un enfant doux ». Juste après cela, Il ﷻ évoqua Son ordre de sacrifier l’enfant. Or, Il ﷻ nous a informés dans al Hijr que Ibrahim ﷺ, quand lui fut annoncé l’enfant, ne l’accepta pas de suite et dit : « M’annoncez-vous cette nouvelle après que m’ait touché la vieillesse ? » [11]. On sait donc qu’il n’avait pas demandé cet enfant et n’en avait pas l’espoir et cet enfant n’est autre que Ishaq ﷺ sans divergence. De même, on sait que sa femme n’a pas accepté ce qui lui était annoncé, qu’elle se frappa le visage et donna comme excuse la vieillesse ainsi que l’infertilité, de la même manière que Ibrahim ﷺ avait prétexté la vieillesse. Cela montre donc que Ishaq ﷺ leur a été donné sans aucune demande de leur part. Si la demande avait été formulée par l’un deux ou des deux, ils ne l’auraient pas mis en doute ainsi car cela aurait été le moment de remercier au lieu de mettre en doute. Cela montre que celui dont l’ordre a été donné qu’il soit sacrifié dans la sourate as Saffat est Isma’il ﷺ qu’Allah lui a accordé après un désir et une demande de sa part. C’est lui qui a été choisi pour être sacrifié selon le sens littéral du verset.
Parmi les preuves du coran se trouve le fait que Ibrahim ﷺ était vieux quand lui a été annoncé Ishaq ﷺ. Prouve cela Sa Parole dans la sourate Hud, à propos de discours de Sarah la femme de Ibrahim ﷺ : « Et mon mari-ci est un vieillard » ainsi que Sa Parole dans al Hijr : « M’annoncez-vous cette nouvelle après que m’ait touché la vieillesse ? » [12]. Sarah a dit : « Vais-je enfanter alors que je suis vieille et que mon mari-ci est un vieillard ? » [13]. Les exégètes ont rapporté qu’elle avait plus de quatre-vingt-dix ans, quatre-vingt-dix-sept ans selon certains. Ibrahim ﷺ avait quant à lui cent six ans à ce moment. Dans as Saffat, la bonne nouvelle lui est venue quand il s’est éloigné de son père et des mécréants et qu’il avait brisé leurs idoles et s’était disputé avec eux. Ceci n’a été mentionné dans aucun autre endroit en y associant la bonne nouvelle. Cela montre la différence de ses états et qu’il s’agissait de deux nouvelles différentes. L’une d’elles était celle d’Isma’il ﷺ dans un état qui n’était pas celui de la vieillesse. Il n’avait point exprimé pour cela un désir ou une demande et nul ne diverge sur le fait qu’Isma’il ﷺ soit plus grand.
Si l’on confirme que la bonne nouvelle annoncée dans les sourates Hud, al Hijr et al Dhariyat est celle de Ishaq ﷺ, et que cette bonne nouvelle mentionnée à ces trois endroits a été de la bouche des anges envoyés pour détruire le peuple de Lut ﷺ, cela implique que la seconde annonce était celle de Isma’il ﷺ et c’est celle de la sourate al Saffat. Le fait que la bonne nouvelle de Ishaq ﷺ soit mentionnée dans cette sourate après la rançon montre que Isma’il est le sacrifié une fois que l’on sait qu’il y a eu deux annonces. La première a été répétée à trois endroits et l’autre à l’endroit de Isma’il ﷺ.
Parmi les preuves du coran se trouve le fait que pour certains exégètes, la Parole d’Allah dans sa louange à Isma’il ﷺ : « Il était fidèle à ses promesses » [14] soit une indication que sa fidélité est sa patience au fait d’avoir accepté d’être sacrifié et d’avoir été ferme jusqu’à dire à son père : « Fais ce qui t’a été ordonné. Tu me trouveras parmi les patients s’il plaît à Allah » [15]. Il patienta jusqu’à être jeté sur le côté, jusqu’à ce qu’il prenne le couteau et il n’est pas revenu sur sa promesse faite à son père de patienter à son égorgement jusqu’à ce qu’Allah les honore par la rançon. Ceci est la cause de la louange qu’Allah lui fait d’être fidèle à ses promesses.
Parmi les preuves relevant des textes historiques, ce qu’a rapporté Mu’awiyah ibn Abi Sufyan que le prophète ﷺ a dit : « je suis le fils des deux sacrifiés » [16], c’est-à-dire de Isma’il ﷺ car il était parmi les enfants de Isma’il. Quant au second sacrifié, il est question de ce qui est rapporté dans la vie prophétique à propos de ‘Abdullah fils de ‘Abdul Mutallib. En effet, ‘Abdul Mutallib, le grand-père du prophète ﷺ, avait fait vœu de sacrifier son fils ‘Abdullah. Quand il voulut le tuer, il vit en rêve qu’il tuait cent chamelles à la place. Il fit cela et cela fut sa rançon. C’est pour cela que le prophète ﷺ a dit : « je suis le fils des deux sacrifiés », c’est-à-dire Isma’il ﷺ et ‘Abdullah. Il fut dit qu’il avait fait le vœu de tuer un de ses enfants s’il arrivait à en avoir dix. Quand Allah lui donna dix enfants, il tira au sort et il tomba sur ‘Abdullah, le père du prophète ﷺ. Il paya en rançon cent chameaux après avoir pris conseil auprès d‘une devineresse sur cela. Abdullah était son plus petit fils et son plus aimé. Il s’agit d’une histoire longue et connue et nous n’avons pas eu besoin de la mentionner en entier, notre objectif étant de montrer les preuves.
Parmi les preuves tirées des récits historiques, l’information rapportée par tawatur que les deux cornes du bélier donné en rançon pour le sacrifié étaient accrochées à la Maison (Ka’bah) jusqu’à ce qu’Allah suscita le prophète ﷺ. Isma’il ﷺ est celui qui édifia la maison avec Ibrahim ﷺ car Allah dit : « Quand Ibrahim édifia les fondations de la maison ainsi que Isma’il… » [17]. Il est celui qui habita au Haram et qui y fut enterré. Il est donc le sacrifié pour qui le bélier a été donné en rançon du fait de la présence des cornes sur la maison qu’il avait bâtie et dans l’endroit où il avait vécu.
Ceux qui pensent que le sacrifié était Ishaq ﷺ disent : « Le bélier a été sacrifié au Sham ». Or, ceci est en porte-à-faux avec ce qu’ont rapporté des groupes de gens provenant de groupes de gens que le sacrifice se tint à Mina et que ce sacrifice est celui commémoré par les musulmans jusqu’à nos jours.
Parmi les preuves donc se trouve le fait que les musulmans se soient mis d’accord pour dire que le sacrifice s’est fait à Mina et qu’il est le sacrifice commémoré jusqu’à maintenant. Il n’y a pas de divergence que Isma’il ﷺ est celui qui était à Makkah et qu’il y vécut et y habita et que Ishaq ﷺ était au Sham et c’est là qu’il fut enterré.
Ceux qui disent que le sacrifié est Ishaq ﷺ ont réfuté la plupart de ce qu’on a exposé ici. Et nous allons évoquer leurs critiques et y répondre [18].
Ils ont pris comme preuve ce que Abu Hurayrah a rapporté du prophète ﷺ qui dit, quand la rançon fut donnée pour Ishaq ﷺ : « Allah lui a dit : « tu as maintenant tout vœu exaucé » Il répondit « oui ». Ibrahim dit à Ishaq : « Dépêche-toi, invoque avant que shaytan ne t’insuffle quelque chose ». Ishaq dit : « Allah, quiconque te rencontre parmi les premiers et les derniers sans t’associer à quoi que ce soit, pardonne-lui ». Abu Hurayrah a aussi rapporté de lui ﷺ qu’il a dit : « N’eût été un serviteur pieux qui m’a précédé, je me serais empressé de faire mon invocation ». Il fut dit : « O messager d’Allah, qui est-ce ? » Il dit : « quand Allah sauva Ishaq ﷺ de l’épreuve du sacrifice, il lui fut dit : « Demande et il te sera accordé ». Il dit : « Par Allah, je m’empresserai avant que le shaytan ne m’insuffle quelque chose. O Allah, quiconque meurt et ne t’associant rien, pardonne-lui et fais-le entrer au paradis » [19].
Ensuite, ils ont réfuté les arguments présentés plus haut. Parmi cela, il a été dit qu’il n’y a rien qui interdise à Allah d’ordonner à Ibrahim ﷺ de sacrifier Ishaq ﷺ tout en lui annonçant qu’il vivrait jusqu’à avoir des enfants. En effet, il est possible qu’Allah lui ait ordonné de le sacrifier tout en lui faisant oublier que Ishaq ﷺ vivrait jusqu’à avoir des enfants.
Parmi cela, ils ont dit aussi qu’il n’y avait pas de preuve dans Sa Parole : « Nous lui annonçâmes Ishaq » car le sens est qu’on lui annonça la prophétie de Ishaq ﷺ et cela, après l’avoir rançonné lors du sacrifice. Tout simplement, le complément d’objet (NDT : la prophétie) a été élidée de la même manière que dans le verset « Interroge la ville ». Une telle interprétation a été rapportée de Ibn ‘Abbas.
Parmi ces preuves, ils ont dit que les gens de la Tawrat et de l’Injil considèrent qu’il s’agissait bien de Ishaq ﷺ et que ces faits sont consignés dans leur livres.
Ceux qui ont prétendu qu’il s’agissait de Ishaq ﷺ ont pris aussi comme preuve le verset : « Comme il l’a complété envers tes deux ancêtres avant, Ibrahim et Ishaq » [20]. Ils ont dit que le bienfait qu’Allah a complété envers Ibrahim ﷺ est le fait qu’Il l’ait sauvé du feu. Quant à Ishaq ﷺ, c’est la rançon qui fut donnée pour son sacrifice.
Voici donc le résumé de ce qui nous est apparu à propos de cette question et Allah est plus connaisseur de la réalité de ce fait. Que la prière et le salut soient sur eux tous ainsi que sur notre prophète Muhammad, sur lui la prière la meilleure et la plus élevée ainsi que sur sa famille et sur eux le salut entier.
[1] Sourate Hud, verset71
فَبَشَّرْنَاهَا بِإِسْحَاقَ
[2] Sourate Hud, verset71
وَمِن وَرَاء إِسْحَاقَ يَعْقُوبَ
[3] Sourate as Saffat, v102
فَلَمَّا بَلَغَ مَعَهُ السَّعْيَ
[4] Sourate as saffat, v112
.وَبَشَّرْنَاهُ بِإِسْحَاقَ
[5] Rapporté par l’imam Ahmed dans son Musnad avec une chaîne authentique
إن إبراهيم عليه السلام لما أمر بالمناسك عرض له الشيطان عند المسعى ، فسابقه فسبقه إبراهيم عليه السلام ، ثم ذهب به جبريل عليه السلام إلى جمرة العقبة ، فعرض له الشيطان - قال سريج : شيطان - فرماه [ ص: 201 ] بسبع حصيات حتى ذهب ، ثم عرض له عند الجمرة الوسطى ، فرماه بسبع حصيات ، قال : قد تله . قال يونس : ولم تله للجبين ، وعلى إسماعيل قميص أبيض ، قال : أبت ليس لي ثوب تكفنني فيه غيره ، فاخلعه حتى تكفنني فيه ، فعالجه ليخلعه ، فنودي من خلفه : ( أن يا إبراهيم قد صدقت الرؤيا ) . فالتفت إبراهيم فإذا هو بكبش أبيض أقرن أعين "
[6] Sourate Hud, v71
وَامْرَأَتُهُ قَآئِمَةٌ فَضَحِكَتْ فَبَشَّرْنَاهَا بِإِسْحَاقَ
[7] Sourate al hijr, v53
قَالُواْ لاَ تَوْجَلْ إِنَّا نُبَشِّرُكَ بِغُلامٍ عَلِيمٍ
[8] Sourate al dhariyat, v23
وَبَشَّرُوهُ بِغُلَامٍ عَلِيمٍ
[9] Sourate as Saffat, v101
فَبَشَّرْنَاهُ بِغُلَامٍ حَلِيمٍ
[10] Sourate as Saffat, v100
رَبِّ هَبْ لِي مِنَ الصَّالِحِينَ
[11] Sourate al hijr, v54
.قَالَ أَبَشَّرْتُمُونِي عَلَى أَن مَّسَّنِيَ الْكِبَرُ فَبِمَ تُبَشِّرُونَ
[12] Sourate al Hijr, v54
.قَالَ أَبَشَّرْتُمُونِي عَلَى أَن مَّسَّنِيَ الْكِبَرُ فَبِمَ تُبَشِّرُونَ
[13] Sourate Hud, v72
أَأَلِدُ وَأَنَاْ عَجُوزٌ وَهَـذَا بَعْلِي شَيْخاً
[14] Sourate Maryam, v54
إِنَّهُ كَانَ صَادِقَ الْوَعْدِ
[15] Sourate as Saffat, v102
يَا أَبَتِ افْعَلْ مَا تُؤْمَرُ سَتَجِدُنِي إِن شَاء اللَّهُ مِنَ الصَّابِرِينَ
[16] Nous n’avons trouvé aucune mention de ce hadith si ce n’est dans les livres d’histoire. Il n’a donc pas de fondement et est forgé. Allah demeure le plus savant
[17] Sourate al Baqarah, v127
وَإِذْ يَرْفَعُ إِبْرَاهِيمُ الْقَوَاعِدَ مِنَ الْبَيْتِ وَإِسْمَاعِيلُ
[18] Par esprit de concision, nous éludons la réponse du Chaykh aux arguments exposés. Le but est effectivement de montrer l’existence d’une divergence et non donner plus de poids à un avis sur l’autre.
[19] Rapporté par al Tabaraniy dans al Awsat avec une chaîne faible. Ab Hatim a dit : « c’est un hadith munkar »
: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم : " إن الله خيرني بين أن يغفر لنصف أمتي أو شفاعتي ، فاخترت شفاعتي ، ورجوت أن تكون أعم لأمتي ، ولولا الذي سبقني إليه العبد الصالح لعجلت دعوتي ، إن الله لما فرج عن إسحاق كرب الذبح ، قيل له : يا إسحاق ، سل تعطه قال : أما والله لأتعجلنها قبل نزعات الشيطان ، اللهم من مات لا يشرك بك شيئا وأحسن فاغفر له ، وأدخله الجنة ".
[20] Sourate Yusuf, v6
وَيُتِمُّ نِعْمَتَهُ عَلَيْكَ وَعَلَى آلِ يَعْقُوبَ كَمَا أَتَمَّهَا عَلَى أَبَوَيْكَ مِن قَبْلُ إِبْرَاهِيمَ وَإِسْحَاقَ
Il fut demandé au chaykh ‘Abdul Karim al Sarghiniy : « Qu’est ce qui est préférable dans la prière sur le prophèteﷺ, le fait de se limiter à ce qui a été rapporté ou bien le fait de rajouter le mot « maître » (sayyid) ? Et si l’ajout est préférable, est ce que celui qui le pratique sera récompensé ou bien la récompense est exclusive pour celui qui s’arrête à la relation (du hadith) ?
Il répondit, en résumé qu’il était préférable de s’en tenir à la relation du hadith ; que cela tenait au fait que le prophèteﷺ n’avait pas rajouté le terme sayyid quand les sahaba lui demandèrent comment prier sur lui ; que les sahaba se sont limités à cela ; et que la récompense ne parvenait qu’à celui qui se limitait aux termes du hadith sans rajouter le terme sayyid ; que si cela avait été recommandé, nous en aurions été informés et qu’il valait mieux sortir de la divergence sur cette question en se limitant au terme du hadith.
Le chaykh Mahdiy al Wazzaniy répondit, réfutant cette fatwa : « Je dis : A Allah nous demandons la protection ! La parole du prophèteﷺ en répondant à la question des sahaba, en disant : « dîtes… » [1] n’implique pas qu’on ne puisse accomplir ce commandement que par cette forme. En effet, la réponse à une question précise n’interdit pas qu’il y ait une autre réponse possible, comme cela est confirmé dans la science des fondements du fiqh. C’est pour cela que les savants de l’Islam, dans leurs premiers écrits, ont utilisé des formules qui renseignent sur sa grandeur pour suivre son exemple et ils ne sont pas limités aux formules rapportées de lui uniquement. Ceci est très connu dans les livres de hadiths et bien d ‘autres. Cette tendance a été confirmée dans l’introduction de Jam’ al Jawami’. L’imam connaissant, notre maître ‘Abdus salam ibn Mashish a utilisé une prière différente des relations de hadith. Cela renseigne sur l’accomplissement de l’ordre donné par ces prières et aussi sur leur science que l’ordre était exécuté par toute ce qui indique la considération et la grandeur. Le fait que les sahaba se soient limités aux formules rapportées de lui n’interdit pas d’user d’autres. Ils ont plutôt visé par cela le fait d’agir selon ce qu’ils avaient entendu de luiﷺ. Le moyen par lequel on accomplit un objectif n’interdit pas d’user d’un autre comme cela est connu dans la science des fondements.
Quant à la parole de an Nawawiy et Zarruq : « prier sur luiﷺavec ce qui a été rapporté est préférable » ne signifie pas que rajouter le terme sayyid est interdit, vu qu’ils ne l’ont pas précisé. Le sens de leur parole est que la prière sur luiﷺ en utilisant les formules rapportées de lui est préférable qu’avec d’autres formules et plus sain. Il n’y a point de doute cependant que celui qui utilise les mots rapportés de lui et y ajoutant le terme sayyid en cherchant à se conformer à la Parole d’Allah : « Ne faîtes pas de l’appel du messager entre vous comme votre appel entre vous » [2], ou bien en adoptant le comportement adopté dans Sa Parole : « O toi le prophète » et « O toi le messager ».
Il est dit dans al shifa’ : « le sens du premier verset est qu’il est obligatoire que son appelﷺ soit différent de l’appel des gens entre eux. C’est pour cela qu’a opté l’imam Abul Muzaffar al Isfarayiniy ainsi que nos chuyukh. C’est cela qu’a dit aussi Abu ‘Umar ibn ‘Abdil Barr ».
La preuve que faire montre de convenance (adab) doit être mis en avant en ce qui le concerneﷺ est son approbation du meilleur de cette communauté-après son prophète-, Abu Bakr as siddiq, radiya Allah ‘anhu, quand il dit : « le fils de Abu Quhafah n’a point à être devant le messager d’Allahﷺ» en réponse à sa parole ﷺ: « O Abu Bakr, qu’est ce qui t’empêche de rester quand je te l’ordonne ? » [3].
Sa parole : « la récompense n’est donnée qu’à celui qui prie sur lui par une prière rapportée » est une parole interdite. La récompense est liée à l’exaltation de sa grandeur et de sa considération et cela, avec tout ce qui peut y amener. Il n’a été rapporté le caractère cultuel de certaines formules que dans le livre d’Allah. C’est pour cela qu’a été ellipsé le complément du verbe car il s’agit d’un ordre général exprimé dans sa paroleﷺ: « quiconque prie sur moi une prière, Allah prie sur lui dix fois pour cela » [4]. Les chaînes de ce hadith sont multiples avec ce sens et plusieurs formulations. Dans aucune, il n’a été rapporté que la récompense était limitée uniquement à une formule relatée dans le hadith. Cette question n’est pas de celles qui font l’objet d’une détermination légale dont l’obtention des fruits est liée à un nombre déterminé comme la zakat al fitr ou les baqiyat as salihat. En effet, la détermination de la mesure de ceux-là est affirmée par une parole claire et non comme une réponse à une question donnée.
Certes, ce qui a été rapporté comme prière sur lui et sa famille après le ‘asr du jour de jumu’ah ainsi que ce qui rapporté comme compensation, comme nous l’expliquerons plus loin, est un mensonge inventé.
Sa parole : « si cela avait été recommandé, il nous l’aurait expliqué car il s’agit de législation… ». Le coran l’a affirmé, et le prophèteﷺ l’a confirmé et cela suffit comme explication.
Quant à sa parole : « ce qu’a rapporté al Hattab d’eux s’accorde… » non, plutôt, cela ne s’accorde pas ! En effet, al Ubbiy est de ceux qui ont déclaré le caractère admirable de l’ajout du mot sayyid et il a dit : « La formulation utilisée de sayyid ou de mawla dans la prière sur le prophèteﷺ est une bonne chose si ce n’est plus. Ce qui le supporte est la parole authentique rapportée de lui : « je suis le sayyid des enfants de Adam ». Ibn ‘Abdis salam a demandé à ce que l’on châtie une personne qui avait dit : « on ne le dira pas (le mot sayyid) dans la prière. Si on la dit, la prière est invalide ». Cette personne se cacha jusqu’à ce qu’on intercédât pour lui. »
Cela amène à réfléchir. Est ce qu’il y a une différence entre ce gueux et celui qui a dit qu’il n’y aura pas de récompense pour celui qui rajoute ce qui n’est pas rapporté dans le hadith ? Ce qu’il apparaît est que dire cela n’est pas fondé. Al Burzuliy a dit sur celui qui appelait à cela : « Il est le plus ignorant des ignorants ». L’auteur d’al Qamus a préféré le délaisser dans la prière tout en demandant de le dire hors d’elle. Al Hattab a dit : « Ce qu’il m’apparaît, et que je fais dans et hors de la prière, est de dire le terme sayyid et Allah est plus savant ».
Sa parole : « il n’a pas été rapporté le terme sayyid dans la chaîne… ». Cela est réfuté par ce qu’a rapporté ‘Iyad dans al shifa’, textuellement : « Ibn Mas’ud disait : « quand vous priez sur le prophèteﷺ faîtes vos meilleurs prières sur lui. Vous ne savez pas si elles ne lui seront pas présentées. Dîtes : O Allah, envoie ta prière, ta miséricorde et ta bénédiction sur le maître (sayyid) des envoyés, l'imam des pieux, le sceau des prophètes, Muhammad, ton serviteur et messager, l'imam vers le bien, le conducteur vers le bien, le messager de la miséricorde. Allah, ressuscite-le à la station de louange que lui jalouseront les premiers et les derniers » [5].
La preuve des bienfaits cités est comprise dans le terme sayyid qu’il a rajouté à cette version.
[…]
Sa parole : « celui qui se limite au terme du hadith, en délaissant l’ajout, sort ainsi de la divergence… ». Vouloir sortir de la divergence est une chose acceptée par tous. Mais comment serait-il possible dans ce cas d’en sortir en se limitant à l’une seule des opinions divergentes sans prendre en compte la position qui préfère les convenances à la relation du hadith ? On ne peut arriver à sortir de la divergence qu’en ramenant les deux positions, l’une contraire et l’autre conforme. C’est-à-dire, en faisant deux prières sur le prophèteﷺ l’une avec le terme sayyid et l’autre en le délaissant.
Il en résulte que ces deux voies sont toutes deux louables et que celui qui les emprunte est récompensé. A chacun, Allah a réservé un bien. Ce que je dis et que je fais dans la prière rituelle et en dehors est de mettre en avant les convenances, en suivant en cela le coran majestueux, en adoptant son comportement et en prenant comme modèle Abu Bakr, radiya Allah ‘anhu et Allah demeure le plus Savant.
Il a dit aussi : « Quand j’ai écrit cela, après un temps, j’ai trouvé la même chose dans le qawa’id du chaykh Zarruq ainsi que dans al Qamus ». Les gens ont divergé sur l’ajout du mot sayyid ainsi que sur la manière de prière sur luiﷺ. Ce qui obligatoire est de se limiter à la formulation quand on vise l’aspect cultuel et qu’on la rajoute quand on vise sa magnificence.
J’ai trouvé un texte du connaissant d’Allah Sidi ‘Abdu Rahman ibn Muhammad al Fasiy dans sa hashiyah sur dala’il al khayrat, après qu’il ait choisi de mettre en avant les convenances et en l’appuyant sur l’interdiction de sayyidina ‘Ali, karamma Allahu wajhah, contenant ceci : « As Suyutiy a été interrogé sur le hadith : « ne précédez pas mon nom de sayyid dans la prière ». Il répondit que ce hadith n’était pas authentique ». Il dit : « Il n’a pas prononcé le terme de sayyid par détestation de la gloriole. C’est pour cela qu’il a dit : « je suis le sayyid des fils d’Adam et cela sans orgueil ». Il est obligatoire pour nous de le grandir et de le considérer. C’est pour cela qu’Allah a interdit qu’on l’appelle par son prénom comme l’on s’appelle en général entre personnes » Fin de citation.
La louange est à Allah. Ce qu’a indiqué le savant savantissime et qui a été cité dans sa partie importante est que la convenance est de dire sayyid. Tout ce qui montre la haute considération est excellent et pour preuve, les écrits des imams devanciers et tardifs. Nul besoin donc de les rapporter. Quiconque fait le tasyid dans la prière ou hors d’elle sera récompensé. En effet, le sens de ce qui est appréciable dans la législation est ce qui récompensé. C’est vérité vraie, sans aucun doute. C’est aussi la preuve de l’amour complet, qu’Allah nous fasse de ses gens.
Comment donc de pas faire le tasyid alors qu’il est la source de la miséricorde, le berceau de l’existence et le pôle du cercleﷺ ? Allah lui a montré de la considération dans son livre majestueux, une considération sans limite qui est confirmée par le fait qu’Il ne l’appelle pas dans le coran par son prénom. Tout cela, par considération pour lui. Le confirme aussi la parole du véridique ainsi que celle de sayyidina ‘Aliy, radiya Allahu ‘anhuma. L’imam al Hattab a préféré dire le terme sayyid dans l’absolu, même si le fait de se tenir à la relation est une voie possible.
Qu’Allah nous fasse de ceux qui aiment le prophète ﷺ ainsi que vous-mêmes.
Extrait de al nawazil al jadidah al kubra, connu sous le nom de al mi’yar al jadid li jami’ al mu’rib du chaykh Mahdi al Wazzaniy al Fasiy
[1] En référence au hadith rapporté dans les deux sahihs : « O messager d’Allah, on nous a enseigné comment te saluer, mais comment prier sur toi ? ». Le prophète ‘alayhis salatu was salam leur enseigna alors la salat al ibrahimiyyah, selon ses différentes versions.
[2] Sourate an nur, v 63
لَا تَجْعَلُوا دُعَاء الرَّسُولِ بَيْنَكُمْ كَدُعَاء بَعْضِكُم بَعْضاً
[3] En référence au hadith où il est relaté que sayyiduna Abu Bakr, ayant commencé la prière comme imam, se retira pour laisser sa place au prophète ‘alayhis salatu was salam, malgré que ce dernier lui ait demandé de rester. Rapporté par al Bukhariy, les auteurs des sunan et Malik
عن سهل بن سعد الساعدي أن رسول الله صلى الله عليه وسلم ذهب إلى بني عمرو بن عوف ليصلح بينهم فحانت الصلاة فجاء المؤذن إلى أبي بكر فقال أتصلي للناس فأقيم قال نعم فصلى أبو بكر فجاء رسول الله صلى الله عليه وسلم والناس في الصلاة فتخلص حتى وقف في الصف فصفق الناس وكان أبو بكر لا يلتفت في صلاته فلما أكثر الناس التصفيق التفت فرأى رسول الله صلى الله عليه وسلم فأشار إليه رسول الله صلى الله عليه وسلم أن امكث مكانك فرفع أبو بكر رضي الله عنه يديه فحمد الله على ما أمره به رسول الله صلى الله عليه وسلم من ذلك ثم استأخر أبو بكر حتى استوى في الصف وتقدم رسول الله صلى الله عليه وسلم فصلى فلما انصرف قال يا أبا بكر ما منعك أن تثبت إذ أمرتك فقال أبو بكر ما كان لابن أبي قحافة أن يصلي بين يدي رسول الله صلى الله عليه وسلم فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم ما لي رأيتكم أكثرتم التصفيق من رابه شيء في صلاته فليسبح فإنه إذا سبح التفت إليه وإنما التصفيق للنساء
[4] Rapporté par Ahmed et an Nasa’iy
عَنْ أَنَسِ بْنِ مَالِكٍ قَالَ : قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ : " مَنْ صَلَّى عَلَيَّ صَلاةً وَاحِدَةً صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ عَشْرًا
[5] Rapporté par Ibn Majah avec un chaîne hassan
إذا صليتم على رسول الله صلى الله عليه وسلم فأحسنوا الصلاة عليه فإنكم لا تدرون لعل ذلك يعرض عليه قال فقالوا له فعلمنا قال قولوا اللهم اجعل صلاتك ورحمتك وبركاتك على سيد المرسلين وإمام المتقين وخاتم النبيين محمد عبدك ورسولك إمام الخير وقائد الخير ورسول الرحمة
بسم الله الرحمن الرحيم
الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين
Nous nous arrêtons aujourd’hui sur une des qasai’d les plus connues, si ce n’est la plus connue, du monde. Il s’agit de celle dénommée al Burdah. Nous procéderons au commentaire des vers de la partie traitant de la naissance du messager d’Allah,’alayhis salatu was salam. En effet, nous trouvons étonnant qu’il y ait un ostracisme à notre époque à parler des miracles liés à sa naissance alors qu’ils sont prouvés par de nombreux textes. Vouloir ôter au prophète ‘alayhis salatu was salam tout caractère spécial et en faire un simple homme est assurément une des causes de la tiédeur spirituelle des musulmans.
Le poète célèbre le pur lignage du plus pur des purifiés, lignage exempt de tout reproche et de tout doute. En effet, depuis Isma’il, les ancêtres du prophète ‘alayhis salatu was salam sont tous nés d’un mariage licite et nul n’a été engendré par l’adultère ni ne s’y est abaissé. Il est dit dans le hadith « J’ai été engendré hors de la fornication de la jahiliyyah. Je n’ai été engendré que par des mariages conformes à l’Islam »[1]. Il a dit aussi : « j’ai été engendré par le mariage et aucun de mes ancêtres n’a été engendré par la fornication, de Adam jusqu’à mon père et ma mère. Je n’ai en rien été entâché par les mariages des gens de la jahiliyyah » [2]. Son lignage est donc pur, le plus pur parmi les arabes. Il est tel : Muhammad ibn Abdillah ibn ‘Abdil Muttalib [3], ibn Hashim [4] ibn ‘Abdil Manaf [5] ibn Qusay [6] Ibn Kilab [7] Ibn Murrah ibn Ka’b ibn Lu’ay ibn Ghalib ibn Fihr [8] Ibn Malik Ibn Nadr [9] ibn Kinanah ibn Khuzaymah ibn Mudrikah ibn Ilyas ibn Mudar ibn Nizar [10] ibn Ma’d ibn ‘Adnan.
C’est ici que s’arrête la généalogie connue du prophète ‘alayhis salatu was salam et quiconque va au-delà aura menti. Ibn Mas’ud a dit « les généalogistes ont menti » dans leur prétention à remonter plus loin que ‘Adnan. L’imam Mlaik fut interrogé sur quelqu'un qui remonte sa généalogie plus loin qu’Adnan et se trouve des ancêtres jusqu’à sayyidina Adam, ‘alayhis salam et il dit « qui l’en a donc informé ? ».
Sa naissance bénie a donc [ démontré la noblesse de son lignage] qui était connu parmi les arabes. [quel excellent début] c’est-à-dire quelle excellente ascendance, remontant à Adam ‘alayhis salam et exempte de tout défaut ! et de même [ quelle excellente fin] c’est-à-dire quelle excellente descendance ! Il s’agit ici de sayyiduna ‘Abdullah et non du prophète lui-même ‘alayhis salatu was salam car son lignage ne s’arrête pas à lui mais à ses enfants. Il s’agit aussi de Ahlul bayt car, comme il est dit dans le hadith : « le lignage de tout enfant de sa mère se fait par son père, sauf celui de Fatimah. Je suis leur lignage et leur père. » [11].
[le jour] béni de sa naissance qui est tombé l’année de l’éléphant, cinq jours après l’évément de l’éléphant en question. Cette naissance s’est déroulée au mois de Rabi’ al awwal selon l’avis le plus répandu et le plus solide. Les gens ont aussi divergé sur le jour de cette naissance, certains portant la position qu’il n’était pas précis et qu’il s’agissait seulement d’un lundi de ce mois. L’avis le plus soutenu est que le jour est précis sauf que les tenants de cette position ont divergé entre eux. Il a été dit qu’il était né aux deux premiers jours, après le huitième jour ou même au dix de ce mois et d’autres dates. Les gens de la Mecque avaient l’habitude cependant de visiter la maison de sa naissance le douzième de Rabi’ al Awwal et c’est l’avis reconnu qui a été adopté par ibn Ishaq. Ce jour de sa naissance, le peuple des [ Perses] a découvert par le biais de la [divination] et l’aide de ses sorciers que leur peuple allait etre frappé par[les maux et les châtiments].
La naissance du prophète ‘alayhis salatu was salam fut accompagnée de signes éclatants dont le monde entier fut témoin. Toute personne doué de perspicacité sut alors q’un événement inédit s’était produit. Parmi ces signes éclatants, se trouve que le [palais] du roi des perses, dont le titre est [Kisra] en arabe, de son vrai nom, Anwashrawan ibn Qibad, s’écroula en cette nuit. En effet, la naissance du prophète ‘alayhis salatu was salam se passa de nuit. De fait, la nuit où ses lumières visitèrent le monde est la meilleure de toutes les nuits, meilleure que la nuit d’al Qadr. L’écroulement du palais de Chosroès marqua cet événement de même que le fait que les [armées] de Chosroès furent à jamais dispersées, c’est-à-dire qu’il lui fut impossible de regrouper son armée comme il lui fut impossible de recosntruire son palais détruit. Or son armée était connue comme comptant un nombre imposant d’hommes. Cette armée resta ainsi dispersée jusqu’à l’entrée des musulman en Perse et la conquête de ce pays par les armées des musulmans aux temps de sayyidina ‘Umar ibn al Khattab.
[Le feu] qui est mentionné ici est celui qu’adoraient les Perses. En effet, ce feu sacré pour eux avait à sa disposition des serviteurs qui l’alimentaient jour et nuit. Il ne s’était pas éteint depuis mille ans, deux mille ans selon d’autres versions. La naissance de l’Elu de la création marqua en même temps l’extinction de ce feu par la disparition de ses [flammes], comme un signe de l’extinction prochaine du royaume de Perse et des fausses divinités adorées. C’est pourquoi l’auteur use de personnification et décrit l’extinction du feu par [dépit de lui]. Le dépit est causé soit par le prophète lui-même ‘alayhis salatu was salam, ou par sa naissance ou encore pour le palais de Chosroès qui s’était écroulé sans espoir de jamais se relever. Quant au [fleuve], il s’agit de l’Euphrate qui est un fleuve qui arrosait le pays de Perse. La naissance du messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam a sonné le glas de la puissance de ce peuple de telle sorte que même le fleuve demeura [hagard] et cela, par la grande [frayeur] qui s’abattait dans le cœur des gens du polythéisme.
[Sawah] était une ville de Perse qui se trouvait entre Hamadan et Ray (actuel Téhéran). Ce qui est visé ici n’est pas la ville elle-même mais ses habitants, à l’image du verset « interroge la ville ». Les gens de cette ville furent donc affligés par la [disparition] de la rivière qui la bordait. C’est-à-dire, à la naissance du dernier des messagers, ‘Alayhis salatu was salam, cette rivière fut tarie d’un coup, comme par évaporation subite. Il s’agissait en fait d’une grande rivière sur les bords de laquelle florissaient des villes et dont il est rapporté qu’elle faisait jusqu’à dix miles arabes de long et de large. Du fait du retrait des eaux de la rivière, tout [assoiffé] qui venait y étancher sa soif ou y prendre l’eau comme à son habitude fut [ déçu] car, de là où s’ébattaient des eaux mugissantes, il ne restait plus que de la boue.
Le poète fait référence aux événements déjà décrits. Le [feu] sacré des perses s’était éteint. On aurait dit donc qu’il y avait en lui de l’humidité, comme il y en a dans l’eau, et tout ceci par [tristesse] de la défaite prochaine du polythéisme. Quant à [l’eau] de la rivière de Sawah, qui s’était évaporée en un temps très court, on aurat dit qu’il y avait en elle un [feu] qui l’a rendue [bouillante] et l’a évaporée.
Ces événements liés à la naissance du messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam ne sont en rien des légendes. En effet, al Bayhaqiy et Abu Nu’aym rapportent dans leur dala’il an nubuwwah respectif, que Haniy al Makhzumiy a dit : « Quand ce fut la nuit de la naissance du messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam, le palais de Chosrès trembla et quatorze balcons en tombèrent. Le feu des perses s’éteignit alors qu’il ne s’était pas éteint depuis mille ans. La rivière de Sawah vit ses eaux baisser… »
A l’annonce de la naissance du messager d’Allah, ‘alayhis salatu was salam, les [jinns] se mirent à pousser des cris dans les montagnes et les vallées où ils habitent. Quant à la [lumière], il s’agit tout simplement de la lumière prophétique qui devint [éblouissante] pour tout doué d’esprit, par le fait qu’elle se manifestait dans ce monde. Que non, elle n’a cessé d’être manifestée dans le monde en réalité. Seulement, elle se manifestait, par la naissance terrestre du prophète ‘alayhis salatu was salam, dans sa totalité et sa complétude et c’est pourquoi elle était éblouissante. Le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam a dit : « … (ma mère) a vu, quand je naquis, une grande lumière qui a éclairé jusqu’aux palais du Cham » [12]. Par sa naissance donc, la lumière de la [vérité] apparaissait en son sens, c’est-à-dire par la venue de la guidée, et en parole, c’est-à-dire en homme de chair et d’os.
[aveugles et sourds], les gens restent détournés de cette lumière qui est pourtant la lumière de la guidée par laquelle Allah a parachevé l’Islam. L’auteur semble ici s’adresser à tous ces aveugles qui n’ont pas cru à l’apparition de la vérité, aussi bien en sens qu’en parole. C’est-à-dire, ceux qui ont réfuté la lumière avec laquelle le prophète ‘alayhis salatu was salam est venu et ceux qui ont réfuté sa prophétie en tant qu’homme. Ces deux catégories de personnes sont donc restées aveugles et sourdes. Ils n’ont pas fait attention aux bonnes nouvelles que ces deux apparitions leur donnaient. L’apparition en sens, qui est l’apparition de sa lumière dans le cœur des doués d’esprit, les guide jusqu’aux jardins du Tawhid. Quant à l’apparition en parole, c’est-à-dire l’apparition physique du prophète ‘alayhis salatu was salam, elle guide quiconque y croit dans les jardins du paradis. De même, aveugles et sourds, ils ne purent pas voir les [signes] évidents des malheurs dont ils étaient avertis. Comprends donc !
Le poète continue sa diatribe contre ceux qui ont nié la prophétie de sayyidina Muhammad ‘alayhis salatu was salam ainsi que sa lumière. Ces gens sont restés aveugles et sourds, bien que les [devins] de leur peuple les ont informés de son apparition. Cela montre leur grand degré d’égarement et de reniement des signes d’Allah. Ces devins leur ont pourtant montré que leurs [cultes] n’étaient pas sur la voie droite mais étaient plutôt recourbés sans jamais pouvoir se redresser [13]. Ceci montre leur obstination dans le faux, malgré l’apparition évidente de la vérité par la personne du prophète ‘alayhis salat was salam et sa lumière, comme le dit clairement le chaykh.
Malgré les signes évidents déjà apparus, le gens n’ont pas cru au caractère spécial de ce jour où le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam est né. Pourtant, ce jour là, [les météores] sont tombés du ciel, à la poursuite des chayatin qui s’y postent pour glaner quelque information. En effet, le jour même de la naissance de sayyidina ‘Isa, ‘alayhis salam, les chayatin avaient été chassés du troisième ciel. De sorte qu’ils se postaient aux cieux les plus bas. Mais à la naissance du messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam, ils furent chassés de tout le ciel par une pluie de météores . C’est pourquoi il est dit dans le coran « Quiconque s’y poste pour écouter maintenant y trouve un météore comme gardien », c’est-à-dire pour le chasser et l’empêcher de prêter l’oreille à ce que notent les anges. Malgré cette pluie de météores tombant [du ciel], les gens restèrent dans leur aveuglement. Cette pluie de météores s’était accompagnée en même temps de la chute des idoles des mécréants. Pendant que les chayatin étaient chassés du ciel, les idoles des mécréants se cassaient et tombaient des socles sur lesquels elles étaient posées. Les négateurs ont vu ces signes et sont restés dans leur aveuglement.
Cette pluie de météores avait comme destination les shayatin qui se postaient au ciel. Elles leur tombèrent dessus [jusqu’à ce qu’ils] finissent de les chasser de leurs postes d’observation. Ainsi, le ciel, qui est le lieu d’où descend [la révélation], fut assaini de la présence des shayatin, qui ne pourraient plus ainsi s’y immiscer pour obtenir aucune information relative au message d’Allah. Ces météores ne s’arrêtèrent pas là car [d’autres] prirent le relai et vinrent s’abattre sur les shayatin sur la terre même.
Harcelés ainsi, poussés dans leur retranchements, les shayatin n’eurent d’autre choix que de fuir. Ainsi, dans leur débandade, ils ressemblaient aux [héros] qui composaient l’armée de [Abrahah], le roi du Yémen qui avait subi un sort semblable. En effet, Abrahah, dont le nom signifie « au blanc visage », était un roi du Yémen vassal de celui d’Ethiopie. Il voulut, l’année de la naissance du prophète ‘alayhis salatu was salam, attaquer la Mecque. Le pèlerinage qui s’y déroulait drainait tout le commerce de la péninsule arabique et rétrogradait le Yémen. Il voulut donc s’emparer de la Ka’bah et la détruire pour mettre fin au commerce qui enrichissait la cité. Arrivé devant les montagnes de la Mecque, lui et son armée furent attaqués par des volées d’oiseaux qui leur jetaient des pierres. Cette grande armée fut donc défaite et ses héros prirent la fuite avant d’avoir atteint leur but. Les shayatin, dans leur fuite des météores célestes, ressemblaient à cette armée défaite elle aussi par des pierres. L’auteur fait référence à cette histoire car elle fait partie des signes évidents de la naissance du messager d’Allah, ‘alayhis salatu was salam. En effet, il naquit quelques jours après cet événement. Dans leur fuite aussi ainsi que leur défaite, les shayatin ressemblaient à cette [armée] qui n’est autre que l’armée des Mecquois sur qui [il] c’est-à-dire, les messager d’Allah lui-même, ‘alayhis salatu was salam [jeta des pierres] qui furent les prémices de leur défaite lors de la bataille de Badr. Ces pierres furent jetées de ses [paumes] nobles et c’est pourquoi Allah dit : « ce n’est pas toi qui a jeté quand tu as jeté, mais c’est Allah qui a jeté ». Cette armée mecquoise aussi fut battue par cette poignée de pierres car il est rapporté dans le hadith que nul de ceux qu’elles avaient touchés n’avait survécu à cette bataille et qu’ils étaient tous morts défigurés.
Ces pierres qu’il [jeta] avaient en fait prononcé le tasbih entre ses mains une fois qu’il les eut prises. Il s’agit ici d’un de ses miracles éclatants qui attestent de la révérence que lui portaient les objets, bien loin de l’insouciance dont font preuve les humains. Ces pierres, qui étaient honorées par ses mains bénies , firent la [louange] d’Allah pour le bienfait de se retrouver dans [ ses paumes]. Le poète compare ce jet de pierres au sort qui fut celui d’un des prophètes d’Allah, à savoir sayyidina Yunus, ‘alayhis salam. Il fut [jeté], lui qui fut un [louangeur] d’Allah hors des entrailles d’un grand poisson qui l’avait avalé. Envoyé à son peuple, il fut excédé de leur mécréance, s’éloigna d’eux et leur promit le châtiment. Il monta sur un bateau qui refusa de s’avancer en pleine mer. Le sort le désigna pour être jeté par-dessus bord pour que le bateau reprenne sa route. Il fut ainsi avalé par ce poisson. Allah dit : « s’il n'avait pas été parmi les gens de la louange, il serait resté dans son ventre jusqu’au jour de la résurrection ». En effet, sayyiduna Yunus resta dans les ténèbres et l’isolement du ventre de ce poisson pendant quarante jours, comme il est rapporté. Ce nombre n’est certes pas anondin, car correspondant à celui de la réalisation spirituelle. Il finit cette période de retraite par une louange qui est mentionnée par Allah « louange à toi, j’ai été parmi les injustes ». De fait, il fut rejeté hors du [ventre de l’avaleur], c’est-à-dire du poisson qui lui servit de khulwah.
Nous clôturons ici ce commentaire des vers de la Burdah. La louange appartient à Allah à son début et à sa fin.
مولاي صل وسلم دائما ابدا على حبيبك خير الخلق كلهم
ياربي صلي على محمد وعلى ساداتنا الـه وصحبه الكـرام
[1] Rapporté par al Bayhaqiy dans ses sunan avec une chaîne hassan
[2] Rapporté par at Tabaraniy dans al awsat avec une chaîne hassan
[3] De son vrai nom Shaybah, selon la version la plus authentique
[4] De son vrai nom ‘Amru
[5] De son vrai nom Mughirah
[6] De son vrai nom Majmu’. D’autres noms ont été donnés comme Yazid et Zayd
[7] De son vrai nom Hakim
[8] De son vrai nom Quraysh. C’est de lui que la tribu de Quraysh tire son nom
[9] De son vrai nom Qays
[10] De nizr, qui veut dire peu. Il est rapporté que quand il naquit et que son père vit la Lumière muhammédienne entre ses yeux, il fut pris d’une grande joie et donna des festins. Il dit cependant « tout ceci est bien peu pour cet enfant ». De cela, il fut nommé nizar
[11] Rapporté par at Tabaraniy dans al kabir
[12] Rapporté par Ahmed, al Bazzar, Ibn Hibban
[13] C’est le sens littéral de l’hémistiche que nous avons traduit par « que leurs cultes faux n’alalient point se relever »
بسم الله الرحمن الرحيم
الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين
Allah dit : « par ta vie, ils se perdent dans leur délire. » (Verset 72, sourate al Hijr)
Le mot « ‘amru » est mis au cas nominatif et constitue le mubtada’ alors que le khabar est ellipsé. Il semble dire par cette forme grammaticale : « je jure par ta vie » ou même « Que ne juré-je pas par ta vie ! » La forme appropriée est celle de l’ellipse car elle correspond plus au serment.
Le sens de ce verset est : Par ta vie, O Muhammad, les mécréants de ton peuple, ceux de Quraysh, "dans leur délire", c’est-à-dire leur égarement, "se perdent", c’est-à-dire sont dans un doute évident.
Ibn ‘Abbas a dit : « Allah n’a pas créé, façonné, formé une créature plus noble à Ses Yeux que Muhammad. Et jamais ne n’ai entendu qu’Allah ait juré sur la vie de quelqu’un si ce n’est sur celle de Muhammad. »
Normalement, « ‘amru » s’écrit avec la voyelle « Ou » (dammah) sur la lettre « ‘ayn » parce que son origine est le mot « ‘umur » qui signifie l’âge ou la vie. Quand on dit « par ma vie », en réalité, on ne fait que jurer sur la longueur de sa propre vie. Par contre, quand on met la voyelle « a » (fathah) sur la lettre « ‘ayn », on jure par quelqu’un de spécifique. Et c’est l’usage qui le plus communément fait. Donc, Allah a visé directement le prophète (‘alayhis salatu was salam) dans ce serment comme s’Il disait : « par ce qui te reste à vivre dans le bas-monde, O Muhammad ! »
Abu Juza’ a dit : « Allah n’a point juré sur la vie d’un autre que Muhammad car il s’agit du plus noble des hommes auprès de Lui. »
Il a dit dit aussi : « son sens est "par ta vie O Muhammad, les Quraysh se répandent dans leur délire." »
Al Hidayah ila bulugh al nihayah du shaykh Makkiy ibn Abi Talib
Il est rapporté dans Muslim selon le hadith de ibn ‘Umar que le Messager d’Allah ﷺ a dit : « La prière dans ma mosquée-ci est meilleure que mille prières dans toute autre mosquée sauf la mosquée al Haram. » Les savants ont divergé sur la signification de cette exception selon leur opinion sur la préférence entre Makkah et Madinah.
L’opinion de Sufyan ibn ‘Uyaynah, de ash Shafi’iy, de Ahmad –selon la version la plus authentique- de Ibn Wahb, de Matraf, de Ibn Habib- les trois étant malikites-, et l’opinion rapportée par al Saji selon ‘Ata’ ibn Abi Rabah, celle des mecquois et des gens de Kufah, celle rapportée par ibn ‘Abdil Barr de ‘Umar, de ‘Ali, de Ibn Mas’ud, de Abu Darda’, de Jabir, de Ibn Zubayr, de Qatadah et de la majorité des savants, Makkah est meilleure et plus méritoire que Madinah. De même, la mosquée de Makkah est meilleure que celle de Madinah car les endroits sont préférables à d’autres par rapport à la valeur des adorations qui y sont accomplies.
Ibn ‘Abdil Barr a déclaré avoir rapporté de Malik ce qui indiquerait sa préférence sur Makkah par rapport à la terre entière. Il a dit ensuite : « par contre, ce qui est connu parmi nos compagnons (les malikites) est que son opinion est sa préférence sur Madinah ». En effet, Malik a dit : « Madinah ainsi que sa mosquée sont meilleures que les autres endroits de la terre ».
Nos compagnons ont pris comme preuve pour préférer Makkah le hadith de ‘Abdullah ibn al Hamra’ qui entendit le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam dire, alors qu’il était sur sa monture : « Par Allah, tu es la meilleure terre d’Allah et la plus aimée d’Allah. Si on ne m’avait pas expulsé de toi, je ne serais jamais sorti » [1]. At Tirmidhi dit, après l’avoir rapporté: « c’est un hadith hassan sahih ». Ibn ‘Abdil Barr a dit : « c’est le plus authentique qui ait été rapporté à ce propos. Ceci est clair pour en finir avec la divergence ».
Selon ash Shafi’iy et la majorité, son sens est [2] : « sauf la mosquée al Haram car la prière dedans est meilleure que la prière dans ma mosquée »
Par contre, selon Malik et ceux qui ont la même opinion, son sens est: « sauf la mosquée al Haram car la prière dans ma mosquée est préférable mais de moins de mille degrés ».
Selon ‘Abdullah ibn Zubayr, le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam a dit : « La prière dans ma mosquée-ci est meilleure que mille prières dans toute autre mosquée, sauf la mosquée al Haram. La prière dans la mosquée al Haram est meilleure de cent prières qu’une prière dans celle-ci » [3]. Ahmed l’a rapporté ainsi qu’Ibn Hibban dans son Sahih qui rapporte l’ajout « c’est-à-dire dans la mosquée de Madinah ». Al Bazzar l’a rapporté avec la version : « La prière dans ma mosquée-ci est meilleure que mille prières dans toute autre sauf la mosquée al Haram. Elle la dépasse de cent ». Al Mundhiriy a dit: « sa chaîne est authentique ».
Ce sur quoi se basent les malikites est ce qu’a rapporté ibn Habib dans al Wadihah, que le messager d’Allah ‘alayhis salatu was salam a dit : « La prière dans ma mosquée est comme mille prières dans toute autre. La prière de Jumu’ah dans ma mosquée est comme mille jumu’ah dans toute autre. Le Ramadan dans ma mosquée est comme mille Ramadan dans toute autre ».
L’avis de ‘Umar ibn al Khattab ainsi que de certains compagnons et la plupart des médinois – comme l’a noté le Qadiy ‘Iyad- est que Madinah est meilleure. Il s’agit aussi d’une des deux versions rapportées de l’imam Ahmed.
Par contre,les savants sont unanimes pour dire que l’endroit qui enserre son noble corps, ‘alayhis salatu was salam, est le meilleur endroit sur terre, encore meilleur que la Ka’bah comme l’ont dit Ibn ‘Asakir, al Bajiy et Qadiy ‘Iyad. Taj as Subkiy a noté de Sayyid as Samhudiy qui rapporte dans Fada’il al Madinah selon ibn ‘Aqiliy al hambaliy que cet endroit est même meilleur que le ‘Arsh (le trône d’Allah). Al Fakihaniy a clairement explicité sa préférence sur les cieux et a dit : « Je dis que (sa tombe) est meilleure que tous les endroits des cieux et je n’ai jamais vu un seul réfuter cela. Ce que je crois est que, si cette question avait été présentée aux savants de la communauté, nul d’entre eux n’aurait divergé sur cela. Il a été dit que le mérite des cieux se trouve dans le fait d’avoir été créés en premier. Si quelqu’un disait : toute la terre est meilleure que les cieux réunis du fait qu’il, ‘alayhis salatu was salam, y est et qu’il n’en est jamais séparé. Cet avis est selon moi le plus solide et le plus authentique ».
Beaucoup ont tenu la position de la préférence de la terre par le fait que les prophètes ‘alayhim as salam ont été créés en majorité à partir d’elle et qu’ils y sont enterrés. Cependant an Nawawi a dit : « La majorité a adopté la préférence du ciel sur la terre, à l’exception du lieu qui enserre son corps, ‘alayhis salatu was salam »
Cependant, un doute peut être émis sur le consensus qui a été évoqué sur la préférence du lieu qui enserre son corps, ‘alayhis salatu was salam, sur tous les autres lieux de la terre. Ceci peut etre soutenu par ce qu’a dit le chaykh ‘izz ad din ibn ‘Abdis Salam dans la préférence de certains endroits à d’autres, en disant que les endroits ainsi que les moments sont tous égaux sans aucune préférence de l’un sur l’autre. Il ne peut y avoir de préférence que sur la base de ce qui s’y passe et non par un caractère spécifique à l’endroit ou au moment. Il a dit: « la préférence d’un endroit ou d’un moment ne se fait que par une grâce qu’Allah permet à ses serviteurs d’y recevoir, par sa Générosité et sa Longanimité. La préférence qui peut exister dans un endroit ou un moment est à l’aune de la récompense qu’Allah accorde à ses serviteurs qui y oeuvrent », en résumé de ce qu’il a dit.
Mais Taqiy ad din as Subkiy a dénoué le problème en résumant : « ce qu’il a dit n’exclut pas que la préférence puisse découler d’une autre chose que d’une œuvre pieuse. En effet, sur la tombe du messager d’Allah, ‘alayhis salatu was salam, descendent en permanence la miséricorde, la satisfaction d’Allah ainsi que les anges. Cette tombe est certes chère auprès d’Allah et son occupant reçoit ce dont aucun esprit ne peut atteindre la réalité. Ces faits ne se passent pas pour un autre endroit que celui-ci, comment donc ne serait-il pas le meilleur endroit de la création ? Pour nous, la raison ne se trouve pas dans le fait d’œuvrer car cette tombe n’est pas une mosquée et n’a pas le statut de mosquée. Seulement, Nous disons que ce statut lui revient par la présence du prophète ‘alayhis salatu was salam.
Aussi, il est possible que l’œuvre pieuse soit multipliée près de cette tombe car il n’y a pas de doute que le prophète ‘alayhis salatu was salam est vivant, comme on l’a déjà dit. Or, ses actions pieuses sont multipliées plus que n’importe quel autre et il n’est pas exclu que les nôtres le soient près de lui».
Il dit aussi : « Celui qui comprend cela aura le cœur ouvert sur les paroles de Qadiy ‘Iyad concernant la préfèrence de l’endroit qui enserre son noble corps, ‘alayhis salatu was salam en deux volets :
Extrait de Mawwahibb al laduniyyah bil minah al muhammadiyah du chaykh Shihab ad din al Qastallaniy
[1] Rapporté par At Tirmidhiy et Ibn Majah
[2] C’est-à-dire, le hadith précédemment cité : « la prière dans ma mosquée-ci est meilleure que mille prières dans toute autre mosquée sauf la mosquée al Haram »
[3] Rapporté par ibn Majah